Dette publique élevée et déficits massifs : l’économie française jugée « insoutenable »

Un Premier ministre qui s’exprime six fois à la radio et à la télévision en une seule soirée, voilà qui est exceptionnel. Hier soir, François Bayrou a estimé nécessaire de multiplier les interventions médiatiques pour convaincre ses compatriotes de la nécessité de mesures d’austérité.

Avec un déficit budgétaire supérieur à 5 % du produit intérieur brut (PIB), la France affiche le niveau le plus élevé de la zone euro. Sa dette publique figure également parmi les plus importantes, juste derrière l’Italie et la Grèce.

Le chef du gouvernement souhaite donc réaliser 44 milliards d’euros d’économies afin de réduire ce déficit. Mais les mesures envisagées s’avèrent difficiles à mettre en œuvre et provoquent déjà d’importantes turbulences politiques.

Une croissance à l’arrêt

Comme beaucoup de pays, la France a accumulé des déficits à cause des aides liées à la pandémie de COVID-19 et des efforts pour amortir la crise énergétique née de la guerre en Ukraine. « Dans la plupart des États, ces déficits ont été réduits grâce à la suppression progressive des aides », explique Maartje Wijffelaars, économiste chez Rabobank. « Mais la France a moins bien réussi à cet égard. »

Selon elle, l’Hexagone dépense trop, notamment en aides sociales : « Une part importante de l’argent est consacrée aux allocations, bien plus que dans d’autres pays. C’est intenable », souligne-t-elle, rappelant que les Français figurent déjà parmi les contribuables les plus taxés d’Europe.

L’économie française donne par ailleurs des signes inquiétants. « La consommation des ménages est en baisse, les investissements sont faibles et les exportations n’apportent aucun bénéfice. La croissance est au point mort », observe Bert Colijn, économiste chez ING.

Quand Berlin investit, Paris s’impose l’austérité

L’Allemagne, également en difficulté économique, a récemment annoncé un plan d’investissement massif pour relancer la croissance. « Berlin empruntera davantage pour cela, mais la France aura plus de mal, car elle doit absolument contenir ses dépenses », avertit Colijn.

La dette pèse de plus en plus lourd

Un déficit budgétaire élevé entraîne une spirale dangereuse. Les charges d’intérêts de la France ont déjà doublé en cinq ans, conséquence directe de la hausse des taux sur les marchés. « Si le déficit ne diminue pas, cette tendance va s’aggraver », alerte Wijffelaars, soulignant que les investisseurs exigent désormais des taux plus élevés face à la perte de confiance dans la signature française.

Dans le même temps, les pays européens se sont engagés à investir davantage dans la défense. « Si la France n’est pas en mesure d’honorer cet engagement, c’est toute l’Europe qui en pâtira », prévient-elle.

Sous la surveillance de Bruxelles

Selon les règles européennes, le déficit public ne doit pas dépasser 3 % du PIB. En concertation avec la Commission européenne, Paris s’est engagé à ramener son déficit sous ce seuil d’ici 2030. « Cela suppose des réductions progressives, année après année. Mais si les coupes annoncées par Bayrou ne sont pas appliquées, la France prendra déjà du retard et Bruxelles tirera la sonnette d’alarme », ajoute l’économiste.

Pas une faillite, mais des années difficiles

Pour autant, les experts écartent le scénario d’une crise à la grecque. « La France n’est pas menacée de faillite », tempère Bert Colijn. « Mais elle restera confrontée à des difficultés économiques persistantes dans les années à venir. »

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