La région du Bounkani, à l’extrême Nord-Est de la Côte d’Ivoire, fait face depuis quelques jours à l’arrivée massive de déplacés venus de l’Ouest du Ghana voisin, théâtre d’un violent conflit intercommunautaire.
Selon les premières estimations, environ 5 000 personnes – en majorité des femmes et des enfants – ont franchi la frontière pour trouver refuge sur le territoire ivoirien. Les localités de Galso et de Vonkoro figurent parmi les zones d’accueil les plus sollicitées, avec des centaines de familles déjà hébergées par les populations locales.
Des sources administratives précisent que des dispositions sécuritaires sont en cours afin de renforcer la surveillance de la frontière et d’empêcher toute infiltration d’éléments armés susceptibles de déstabiliser la zone. Parallèlement, des mesures d’assistance d’urgence ont été enclenchées pour répondre aux besoins immédiats des déplacés, visiblement éprouvés par plusieurs jours de marche et présentant des signes de grande vulnérabilité.
Un geste de solidarité royale
Mercredi 28 août, Sa Majesté Niguê-Gbliman, roi du Bounkani, a manifesté sa solidarité envers les déplacés ghanéens installés à Vonkoro, en leur faisant parvenir un important don de vivres.
La cérémonie de remise s’est déroulée au nom du souverain, par une délégation royale conduite par le chef de la province de Niandégué, Amadou Ouattara. Le don comprend une tonne de riz, des cartons de tomate concentrée, des bidons d’huile, des cartons de cubes d’assaisonnement et du sel.
Ce geste humanitaire, salué par les bénéficiaires et les autorités locales, traduit la volonté du roi de perpétuer la tradition d’accueil et de fraternité entre les peuples frontaliers.
Vers un appui renforcé
En attendant une mobilisation humanitaire plus large à l’échelle nationale et internationale, les autorités locales et les chefs traditionnels multiplient les initiatives de soutien pour soulager les déplacés, répartis dans plusieurs villages de la région et vivant dans des conditions de grande précarité.
Ce nouvel afflux transfrontalier illustre une fois encore les conséquences humanitaires directes des tensions communautaires dans la sous-région, qui frappent en premier lieu les populations les plus vulnérables.
(avec AIP / on/kp)
The traditional Gonja chief of Sawla, in a meeting today with the Inspector-General of Police and the military GOC northern command, alleged that mercenaries from Burkina Faso and Ivory Coast crossed the border and assisted their Brifor tribesmen against the Gonjas in Gbiniyiri. pic.twitter.com/U3HligtrvQ
— Alhaji Gbangbanku (@EliasuAlhaji) August 26, 2025
Photo Une / Véhicules blindés à un poste de contrôle militaire à Bawku, dans le nord du Ghana, en 2022. © Nipah Dennis/AFP
JNIM footage of the attack against the VDP forces in Bittou near the Ghanaian border. Earlier, there had been attacks in Mogande, Garanga, and Mogomnore, all on the border with Ghana. https://t.co/94cB66OY8P pic.twitter.com/LWhK8Rnpk3
— Alhaji Gbangbanku (@EliasuAlhaji) August 25, 2025
Pour mieux comprendre le conflit en cours
1. Un enjeu sécuritaire majeur
- Le conflit intercommunautaire à Bawku et dans l’Ouest du Ghana révèle la fragilité sécuritaire dans une zone déjà exposée aux menaces régionales (Sahel, Burkina Faso, Mali, Niger).
- Les violences locales peuvent devenir une brèche pour des groupes armés transfrontaliers (trafiquants, jihadistes) qui exploitent la porosité des frontières.
- Le déploiement de blindés et de forces militaires traduit la volonté d’Accra de contenir une escalade qui pourrait déstabiliser le nord du pays.
2. Un enjeu social et identitaire
- À l’origine, les violences de Bawku s’enracinent dans une dispute historique entre groupes ethniques (principalement Mamprusi et Kusasi) autour du contrôle de la chefferie traditionnelle.
- Ces rivalités identitaires, souvent manipulées politiquement, menacent la cohésion nationale et fragilisent la coexistence entre communautés.
- La répétition des affrontements accentue la méfiance et provoque des déplacements de population, comme vers la Côte d’Ivoire (Bounkani).
3. Un enjeu humanitaire
- Des milliers de personnes fuient les violences, créant une crise humanitaire interne et transfrontalière.
- L’accueil de déplacés par des pays voisins (comme la Côte d’Ivoire) met en évidence l’incapacité du Ghana à protéger certaines de ses populations.
- Cela peut affecter l’image d’un pays jusque-là perçu comme un îlot de stabilité en Afrique de l’Ouest.
4. Un enjeu économique
- Le nord du Ghana, déjà économiquement fragile, voit ses activités agricoles et commerciales perturbées.
- Les corridors transfrontaliers (vers le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Togo) sont stratégiques pour le commerce régional. Toute insécurité prolongée risque d’asphyxier l’économie locale et de décourager les investissements.
5. Un enjeu politique et diplomatique
- Le gouvernement d’Accra est mis au défi de prouver sa capacité à maintenir l’unité nationale et la paix sociale.
- Toute faiblesse pourrait être exploitée par l’opposition politique en vue des élections générales de 2028.
- Sur le plan diplomatique, le Ghana, qui se présente comme médiateur régional (Mali, Burkina Faso, Niger), pourrait voir sa crédibilité affaiblie si le conflit interne s’enlise.
Commentaires Facebook