Paris n’ose pas toujours le dire à haute voix, mais une partie de ses difficultés financières actuelles est directement liée à l’érosion de son influence économique en Afrique.
Pendant plus d’un demi-siècle, la France a bénéficié d’un système hérité de la colonisation : accords de coopération, contrôle monétaire via le franc CFA, accès privilégié aux matières premières (cacao, café, uranium, pétrole), marchés captifs pour ses entreprises et circuits bancaires étroitement reliés au Trésor français. Ce mécanisme constituait une véritable rente africaine, qui contribuait à équilibrer la balance des paiements et à financer une partie du modèle social français.
Or, depuis trois décennies, ce dispositif s’effrite.
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Les années 1970-1980 : la hausse des prix des matières premières profite davantage aux pays producteurs africains, qui diversifient leurs partenariats (États-Unis, URSS, pays arabes, puis Chine). La France perd son exclusivité.
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Les années 1990 : la fin de la guerre froide et l’arrivée de nouveaux acteurs économiques mettent fin au monopole français. Les compagnies tricolores (Elf, Bolloré, Bouygues) voient leurs marges reculer, entraînant un manque à gagner pour l’État.
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Les années 2000-2020 : l’émergence de la Chine, de la Turquie et de la Russie en Afrique accentue le recul de Paris. La perte récente de positions stratégiques au Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso) illustre une tendance lourde : la France ne dispose plus des leviers économiques et politiques qui garantissaient autrefois sa rente.
Aujourd’hui, cette érosion africaine se conjugue à une crise interne marquée par la désindustrialisation, une dette publique qui dépasse les 3 200 milliards d’euros et des tensions sociales persistantes. La France, privée de ses relais africains, est contrainte d’affronter seule ses déséquilibres budgétaires.
Pour de nombreux observateurs, la fin de la rente africaine constitue un tournant historique : la France devra désormais repenser son modèle économique sans compter sur l’appoint financier issu de son ancien « pré carré ».
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