Côte d’Ivoire – CEI : Autorité électorale ou simple bureau de poste ?

La démocratie se nourrit du respect des règles, surtout lorsqu’il s’agit d’un processus aussi crucial que l’élection présidentielle. En Côte d’Ivoire, la Commission Électorale Indépendante (CEI) donne pourtant l’impression de se dérober à ses responsabilités, se contentant de recueillir les candidatures sans filtrer celles qui ne respectent pas les textes. Elle ressemble de plus en plus à un simple bureau de poste, acceptant des « courriers » non affranchis faute de vérification.

Des textes qui lui donnent pourtant des armes

Contrairement à ce qu’elle semble laisser entendre, la CEI n’est pas un expéditeur passif. Le Code électoral ivoirien lui confère des prérogatives précises pour contrôler la recevabilité des dossiers :

Article 51 : chaque candidature doit être accompagnée d’une déclaration signée et légalisée, ainsi que du parrainage requis (1 % de l’électorat local dans au moins 50 % des régions ou districts).

Article 54 : la déclaration doit impérativement être assortie de la liste des électeurs ayant parrainé le candidat, faute de quoi la candidature est irrecevable.

Article 53 : énumère les pièces obligatoires à fournir : identité complète, nationalité, filiation, domicile, profession, symbole et sigle pour le bulletin de vote…

Article 52 : précise que la CEI reçoit les candidatures, les vérifie selon les obligations légales, puis les transmet au Conseil constitutionnel.

Ces articles montrent clairement que la CEI a un rôle actif et essentiel dans la première sélection des candidatures. Elle est responsable, en amont, de l’application stricte des critères de recevabilité prévus par la loi.

Mais la CEI se défausse sur le Conseil constitutionnel

Certes, le Conseil constitutionnel est l’organe ultime qui valide ou rejette les candidatures. Mais cela ne dispense nullement la CEI de vérifier au préalable les dossiers. Or, il a été constaté que des candidatures de prétendants non inscrits sur la liste électorale ou n’ayant pas l’âge requis de 35 ans ont tout de même été acceptées.

Pourtant, selon l’article 55 de la Constitution de 2016, tout candidat doit avoir au moins 35 ans. Accepter de tels dossiers ne relève donc pas d’une simple courtoisie envers le Conseil constitutionnel : c’est une négligence grave qui interroge. Pourquoi la CEI semble-t-elle si fébrile lorsqu’il s’agit de trancher, notamment face à l’opposition ?

Le temps est venu de rappeler la CEI à ses obligations

La CEI doit cesser de se comporter comme un simple guichet de réception. La loi lui impose de refuser immédiatement toute candidature incomplète ou non conforme (âge, parrainage, pièces justificatives). Elle ne peut pas se défausser systématiquement sur le Conseil constitutionnel. La démocratie ne peut tolérer une telle passivité.

Conclusion

La loi n’est pas un jeu où l’on laisse passer des dossiers bancals en espérant que d’autres feront le tri. Si la CEI continue à ignorer sciemment ses prérogatives, elle ne sera plus perçue que comme un bureau de poste frileux, incapable de protéger les fondements de notre démocratie.

Soumahoro Alfa Yaya
Journaliste – Diplômé de Master ISTC Polytechnique Abidjan
Ancien Directeur de la Communication et des Relations Publiques
Ministère des Affaires Étrangères de Côte d’Ivoire

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