Faux documents et filière migratoire : deux Ivoiriens jugés à Aix pour avoir fait venir des mineurs en France
Aix-en-Provence – Deux ressortissants ivoiriens, Koko A. (51 ans) et Ibraima T. (44 ans), ont comparu devant le tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence pour avoir facilité l’entrée et le séjour irréguliers de mineurs en France, à l’aide de documents falsifiés. Bien qu’ils aient échappé à l’accusation plus grave de traite d’êtres humains, leurs explications ont révélé les rouages d’un système informel entre l’Afrique de l’Ouest et l’Europe.
Les deux prévenus, établis de longue date en région parisienne avec un titre de séjour, affirment ne pas se connaître. Pourtant, les faits qui leur sont reprochés présentent de nombreuses similitudes, à commencer par l’acheminement de jeunes filles mineures, en 2018, à l’aide de passeports et de visas douteux.
Un mécanicien sous pression familiale
Ibraima, employé comme mécanicien sur les chantiers du Grand Paris, a été identifié après l’interpellation d’une accompagnatrice voyageant avec une adolescente de 13 ans à l’aéroport de Marignane. Les services de la police aux frontières ont rapidement repéré les irrégularités sur les visas.
Face aux enquêteurs, l’homme a reconnu avoir aidé sa sœur, restée en Afrique, à faire venir sa fille, menacée d’excision. Il affirme avoir agi sous pression, et explique avoir lui-même fui la guerre civile pour se réfugier en France. Débordé par ses responsabilités familiales, il a confié la prise en charge de sa nièce à l’aide sociale à l’enfance.
Une autre mineure, même adresse
Cinq jours après cette arrivée, une autre jeune fille de 15 ans atterrit en France avec, une fois encore, des documents falsifiés. Particularité troublante : l’adresse mentionnée sur les papiers est identique à celle utilisée précédemment. Cette fois, c’est Koko qui l’accompagne.
La quinquagénaire reconnaît avoir fait venir trois enfants, dont son propre fils et sa nièce. Elle affirme avoir simplement aidé sa sœur, installée en Italie, à organiser l’arrivée des enfants en attendant de pouvoir les accueillir elle-même en France.
Un système « à l’africaine »
Lors de l’audience, les deux prévenus se sont défendus en évoquant un fonctionnement « habituel » dans leur pays d’origine. « Chez nous, c’est du business, ce n’est pas illégal », déclare Ibraima, qui admet avoir payé 3 500 € à un tiers pour obtenir un visa. Koko abonde : « En Côte d’Ivoire, une connaissance vaut mieux qu’un diplôme. Je ne savais pas que c’était un faux. Je ne veux pas d’histoires avec la justice, Madame la juge. »
Elle rejette toute motivation financière : les mandats cash qu’elle reçoit proviendraient de sa famille. Mère célibataire de trois enfants, elle dit survivre avec peu de moyens, et travailler comme aide à domicile.
Le tribunal tranche
Pour le procureur, il ne s’agit pas d’un simple « business », mais bien de « magouilles » visant à contourner la loi. Il a requis des peines de prison avec sursis, assorties d’amendes et d’interdictions du territoire.
Finalement, le tribunal a condamné Ibraima à une peine de 60 jours-amendes à 15 €, et Koko à six mois de prison avec sursis pendant cinq ans. En réaction au verdict, Koko a lancé : « Même 25 ans, je les prends ».
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