Les indécentes supplications de Patrick Achi
Par Jean-Claude Djéréké
Quand Patrick Achi, ancien ministre et ex-secrétaire général de la présidence, implore publiquement Alassane Ouattara de « ne pas les abandonner », la scène frôle l’indécence. Ce n’est ni un acte de loyauté patriotique, ni une analyse politique éclairée, mais bien le signe flagrant d’une panique généralisée au sein d’une élite consciente que la fin de règne approche… et avec elle, la fin des privilèges.
Ce cri du cœur d’Achi n’est pas motivé par l’intérêt national, mais par la crainte de devoir rendre des comptes, de perdre l’accès aux leviers de l’État et aux confortables dividendes qu’offre un pouvoir confisqué.
Le même Achi, qui affirmait naguère avoir tourné le dos à Henri Konan Bédié faute d’« alternative crédible », soutient aujourd’hui un homme englué dans un troisième mandat, obtenu en violation manifeste de la Constitution. Où est passée la cohérence politique ? Où est le courage intellectuel de celui qui se présentait comme technocrate au service du développement ? L’ancien haut fonctionnaire semble avoir cédé à la tentation du confort, troquant l’intégrité pour la servilité, la vérité pour le carriérisme.
Il est bon de rappeler qu’en 2010, Alassane Ouattara promettait qu’un seul mandat de cinq ans suffirait à transformer la Côte d’Ivoire. Quinze ans plus tard, la fracture sociale s’est creusée, les libertés ont reculé, et l’économie est accaparée par une minorité d’affairistes. Malgré ce constat amer, certains, comme Achi, persistent à appeler de leurs vœux un quatrième mandat, foulant aux pieds la morale, le droit et le bon sens.
Pire, Patrick Achi a un jour tenté de se forger une légende : celle d’un enfant pauvre devenu grand par son seul mérite. Une fable savamment construite pour séduire l’opinion, mais que ceux qui le connaissent savent éloignée de la réalité. Pourquoi une telle mise en scène ? Pour masquer l’opportunisme ? Pour enjoliver un parcours où l’ascension s’est faite moins par l’excellence que par l’allégeance ?
Ce type de posture illustre le cynisme d’une classe politique qui instrumentalise la misère qu’elle contribue à entretenir. Une élite qui s’agrippe au pouvoir non pour servir, mais pour se servir, quitte à supplier publiquement le chef de ne pas lâcher les rênes.
Dans cette mascarade de loyauté, le pays, lui, attend un vrai souffle démocratique, une rupture avec ces vieux réflexes d’alignement aveugle et de calculs personnels. Car la Côte d’Ivoire vaut mieux que des élites apeurées par la perspective de la reddition des comptes.
Jean-Claude Djéréké – Universitaire et analyste politique
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