Guinée: répression croissante contre les voix critiques du régime Doumbouya

Dérive autoritaire : L’avocat Mohamed Traoré enlevé et torturé, la profession judiciaire se rebelle

En Guinée, la répression contre les voix dissidentes s’accentue dangereusement sous le régime du général Mamadi Doumbouya, arrivé au pouvoir par un coup d’État en septembre 2021. La dernière victime en date : Maître Mohamed Traoré, avocat connu pour ses positions critiques à l’égard de la junte militaire.

Enlevé dans la nuit du 20 au 21 juin à son domicile de Conakry, devant sa famille, il a été retrouvé deux jours plus tard dans un état alarmant, à Bangouyah, localité située à une vingtaine de kilomètres au nord de la capitale. Son confrère Faya Gabriel Kamano, bâtonnier de l’Ordre des avocats de Guinée, témoigne :

« Je l’ai retrouvé le dos recouvert de plaies. Ses ravisseurs l’ont prévenu : la prochaine fois, ils lui ôteront la vie. »

Mohamed Traoré, ancien bâtonnier et membre démissionnaire du Conseil national de transition, s’était récemment opposé à la décision du régime de confier l’organisation des élections à une administration qu’il jugeait « politisée et partisane », au détriment d’une commission électorale indépendante. Dans une sortie remarquée le 15 juin, il ironisait :

« À cette allure, mieux vaut faire comme le Mali ou le Niger et se passer d’élections aux résultats déjà connus. »

Face à cet acte de violence inqualifiable, le Conseil de l’Ordre des avocats de Guinée a immédiatement suspendu sa participation à toutes les audiences pendant deux semaines, et retiré ses représentants des institutions nationales. Il s’agit là d’un acte fort de désaveu du régime par une institution clé de l’État de droit.

L’affaire Traoré n’est pas isolée. Depuis plusieurs mois, activistes, journalistes, syndicalistes et autres voix critiques font l’objet d’arrestations arbitraires, d’enlèvements, voire de disparitions. Les ONG de défense des droits humains alertent sur une militarisation de l’espace civil et une dérive dictatoriale rampante.

Alors que la Guinée devait, selon les promesses initiales de la junte, amorcer une transition vers un pouvoir civil, les espoirs de retour à la démocratie semblent s’éloigner. Le silence du pouvoir face à ces dérives alimente les craintes d’une nouvelle crise majeure dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.

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