Mali–Russie : une alliance à géométrie variable qui pourrait inclure les djihadistes ?

Le retrait officiel de Wagner au Mali, remplacé par Africa Corps, intervient dans un contexte de dégradation sécuritaire. Tandis que Bamako maintient sa foi dans l’appui russe, une question se pose avec insistance : la Russie peut-elle s’acoquiner avec certains groupes djihadistes pour sauver ses propres intérêts dans la région ? Cette interrogation ne relève pas de la spéculation. Elle s’ancre dans plusieurs précédents internationaux. Retour historique.

Afghanistan : un exemple de duplicité diplomatique

En avril 2024, la Russie raye les talibans de sa liste noire. Ce changement survient juste après un attentat de l’État islamique au Khorassan (EI-K) sur son sol. Les talibans, pourtant auteurs de décennies de terreur, deviennent des partenaires de dialogue. Une illustration brutale de la realpolitik russe.

Syrie : primauté des intérêts nationaux, peu importe le pouvoir

Après la chute du régime d’Assad, soutenu pendant des années par Moscou, la Russie s’empresse de dialoguer avec les vainqueurs, pourtant issus de groupes jadis classés extrémistes. Objectif : préserver ses bases militaires stratégiques et l’accès aux ressources naturelles. Et ce, même si cela implique de se retourner contre les partenaires d’antan.

Soudan : basculement des FSR aux FAS pour conserver une assise géopolitique régionale

Wagner a longtemps soutenu les FSR (Forces de soutien rapide) du général Hemedti, en échange d’or et d’impunité. Mais en 2025, Moscou négocie avec leurs rivaux, les FAS (Forces armées soudanaises) pour une base en mer Rouge. La fidélité stratégique, chez les Russes, se mesure à l’aune de leurs intérêts géopolitiques, pas à celle de leurs promesses.

Centrafrique : un laboratoire de manipulation ethnique

En 2023, Wagner s’associe à une milice ethnique – celle des Azandé Ani Kpi Gbé – pour contrôler des mines d’or. Un an plus tard, les massacres de la milice, prenant modèle sur les mercenaires russes, sont révélés. Le chaos ainsi semé sert de justification pour prolonger l’intervention russe. C’est une méthode bien rôdée.

Et au Mali ?

Les signaux sont préoccupants. L’armée malienne peine à stabiliser les zones du centre et du nord. Africa Corps s’installe, mais sans réelle rupture avec les méthodes précédentes. Par conséquent, si Bamako échoue à contenir les djihadistes, la Russie pourrait très bien, comme ailleurs, choisir de composer avec eux — pour le « bien supérieur » de ses bases, de ses mines, ou de son influence régionale.

F. Kouadio
in Cap’Ivoire Info / @CapIvoire_Info

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