Espoir 2000: «Reformer un duo ? Non ! Je suis le gardien du temple» (Pat Sako)

Après 10 ans passés loin des scènes en Côte d’Ivoire, le groupe Espoir 2000 quoique amputé d’un membre, offre un concert-live, le 1er mai, au Palais des congrès du Sofitel Abidjan hôtel Ivoire. Le lead vocal Pat Sako promet un spectacle digne des scènes internationales.

Dix ans après votre dernier concert en Côte d’Ivoire, vous êtes de retour sur la scène du live. Comment vous apprêtez-vous pour ce concert ?

C’est avec une immense joie qu’on retrouve la scène, après dix ans d’absence. Durant ces années, on a traversé beaucoup d’épreuves : la maladie de mon binôme Valery, son décès récemment… Revenir sur la scène avec un album bien accueilli par les Ivoiriens, cela met du baume au cœur et redonne de l’espoir. On est vraiment heureux d’organiser ce concert et on compte le faire de la manière la plus professionnelle, digne des scènes internationales, afin que cela marque les esprits.

La disparition de votre binôme a-t-elle eu un impact sur ce projet ? Vous sentez-vous seul à quelques jours du concert ?

Je ne me sens pas seul, car je sais que Valery est là et sera avec nous à ce concert. On ne va pas pleurer. Ce sera l’occasion de lui rendre hommage.

La carrière d’Espoir 2000 dure depuis 1997. Votre public est-il le même ou a-t-il changé ? Qui attendez-vous à ce concert ?

Je pense que c’est le même public. Il nous a toujours soutenus. Nos fans nous disent, sur les réseaux sociaux, qu’ils ont, certes, attendu pendant longtemps, mais qu’ils ont été bien servis avec le nouvel album. Ils nous disent : « C’est toujours Espoir 2000, vous n’avez pas changé ». En voyant ces réactions, on se dit que notre public est resté fidèle et sera présent.

Il y a une nouvelle génération de mélomanes qui a grandi en écoutant d’autres genres comme le coupé-décalé ou le rap ivoire. Pensez-vous qu’ils comprennent votre style de musique et votre message ?

Oui, ils comprennent et y adhèrent. Cela dit, il faut préciser qu’Espoir 2000, ce n’est pas uniquement pour la jeunesse actuelle, c’est aussi pour les gens d’un certain âge. On a commencé depuis 1997, comme vous l’avez mentionné. Aujourd’hui, beaucoup de nos fans sont en activité, d’autres sont à l’extérieur, mais nous soutiennent toujours. Même quand on se produit ailleurs, certains viennent. Beaucoup de fans qui sont à l’extérieur ont décidé de faire le déplacement d’Abidjan pour assister à ce concert. Notre musique est intergénérationnelle.

D’où le thème du concert: ‘’Respectez les gens qui ont vécu’’ ?

Exactement ! Il faut respecter ceux qui ont vécu. Notre musique est intergénérationnelle. Elle a bientôt 30 ans, mais elle est aussi appréciée des jeunes. Ce sera donc un vrai brassage des générations. Le spectacle durera deux heures sans première partie. Il y aura quatre tableaux artistiques qui offriront une belle expérience visuelle et sonore. L’idée, pour nous, c’est de changer la perception que les gens ont des concerts zouglou et de prouver que cette musique peut rivaliser avec les plus grands concerts d’autres genres.

Le concert se tient au Palais des congrès du Sofitel Abidjan Hôtel Ivoire, une grande première pour vous. Pourquoi avoir choisi cette salle ?

On a déjà joué dans cette salle lors des événements où on était juste invités, mais c’est la première fois qu’un concert signé Espoir 2000 se tient à l’Hôtel Ivoire. Le choix de cette salle parce qu’elle est premium. C’est une marque de respect envers tous ceux qui ont suivi le zouglou depuis ses débuts et cela cadre avec la qualité qu’on veut donner à l’événement.

Vous avez vous-même organisé ce concert à travers votre structure Zouglou mag production. Pourquoi ?

Nous avons été approchés par plusieurs structures. Mais à chaque fois, on n’a pas réussi à s’accorder. On s’est dit, à un moment donné, qu’il fallait compter sur nous-mêmes.

Ce concert arrive à un moment où votre dernier album est en vogue. À quelle étape de maturité se situe-t-il aujourd’hui ?

L’album se comporte très bien. Il est bien accueilli par les Ivoiriens. On est allé doucement après le lancement, mais déjà, en deux mois, plusieurs titres ont atteint le million de vues. Le morceau ‘’Respectez’’ est à plus de 5 millions de vues, uniquement en audio, alors qu’on n’a même pas encore terminé les clips vidéo. Certains comme ‘’Respectez’’ sont presque prêts et d’ici la fin de l’année, tous les 12 morceaux de l’album auront leur clip. Cet album marque un niveau élevé de maturité. Après près de 30 ans, on a acquis beaucoup d’expérience. On a vécu beaucoup de situations et traversé des épreuves. Tout cela a renforcé notre sérénité.

Espoir 2000, ce sont 7 albums depuis le début, une centaine de chansons, y compris les collaborations. Comment votre style s’adapte-t-il à l’évolution musicale et sonore ?

On le fait à chaque album. On intègre les tendances du moment tout en gardant notre touche traditionnelle. Ce nouvel album, par exemple, parle des réalités actuelles, notamment les influenceurs sur les réseaux sociaux. On reste connecté au quotidien des Ivoiriens.

On l’a remarqué dans le titre ‘’Respectez’’. Une personne en particulier était-elle visée dans cette chanson ?

Non ! C’est un message global, un hommage à toute une génération. Quand on parle des gens qui ont vécu, on fait allusion aux personnes qui ont acquis une certaine expérience dans la vie et qui peuvent être utiles aux autres. On a utilisé le mot « influenceur » pour imager notre message. On critique ceux qui pensent pouvoir tout faire sans l’aide des personnes expérimentées. Ce n’est pas une attaque ciblée.

Pourtant, le groupe VDA a répondu presque automatiquement à cette chanson par un single virulent qui a été fustigé par les mélomanes. Les membres se sont-ils sentis visés ? Quel commentaire sur leur attitude ?

Franchement, je n’ai pas compris leur motivation. La chanson ne les visait pas. On ne cite ni VDA ni un groupe en particulier. C’était un hommage aux anciens, pas une provocation. Donc, on n’a pas cherché à répondre. Je crois qu’ils ont été recadrés naturellement.

L’album marche bien. Songez-vous déjà au prochain ?

On pense toujours à l’avenir. Aujourd’hui, on parle des influenceurs, mais dans un ou deux ans, il y aura d’autres réalités, d’autres sujets à traiter. On continuera de dire ce qu’on pense des réalités auxquelles on sera confronté.

Allez-vous reformer un nouveau duo ?

Reformer un duo? Non ! Espoir 2000, c’est une histoire de vie. Il n’est pas besoin de reformer un duo. L’esprit du groupe reste. Je suis le gardien du temple. Désormais, c’est Pat Sako seul qu’on voit, mais le nom Espoir 2000 demeure.

Beaucoup d’amateurs de zouglou aimeraient vous voir en featuring avec vos collègues comme Yodé & Siro ou Magic System. Qu’en pensez-vous ?

On y pense et on a des projets dans ce sens. Ce qui entrave ces projets, c’est souvent la question de calendrier. On avait prévu des collaborations avec Yodé & Siro, mais la maladie de Valery a retardé les choses. Eux, leur album était déjà sorti et nous, c’est maintenant. Mais ce sont des choses qui peuvent se faire à tout moment.

Quel regard portez-vous sur l’évolution de la musique urbaine ivoirienne ?

J’apprécie beaucoup ce que font les jeunes : Didi B, Himra, le rap ivoire… Chez moi, c’est ce que j’écoute. La musique, c’est d’abord la mélodie. Une fois que c’est dansant, le message passe mieux. Je pense en tout cas que la relève est assurée.

Vous êtes considéré comme l’intellectuel du zouglou. Avez-vous d’autres ambitions en dehors de la musique ?

J’ai déjà brigué la présidence du conseil d’administration du Burida. Ça n’a pas marché, mais je ne baisse pas les bras. Je veux continuer à apporter ma contribution au développement du secteur de la culture et au développement social, que ce soit dans un ministère ou une structure, mais toujours avec la musique en support.

Quelles actions posez-vous dans ce sens ?

On a commencé à poser des actions sociales, notamment des dons de médicaments dans des hôpitaux à Agboville et des campagnes de don de sang avec l’association Espoir et Unité. On envisage aussi de créer une fondation pour soutenir la scolarisation de la jeune fille.

Quelle sera la suite, après le concert?

On va continuer de chanter, de participer au développement de notre pays à travers notre art. Et à côté du chant, on va produire d’autres artistes. Il faut aider les autres, partager notre expérience. Et puis, il y a le projet de la fondation, nos actions climatiques et notre engagement social.

Interview réalisée par Par Faustin Ehouman
Fratmat

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