Djidji Ayokwê – un pas décisif vers le retour en Côte d’Ivoire
Alors que le Sénat français a adopté à l’unanimité, le 28 avril 2025, le projet de loi autorisant la restitution du Tambour Parleur Djidji Ayokwê à la Côte d’Ivoire, de nombreuses voix s’interrogent : pourquoi ce processus a-t-il pris autant de temps ? Et surtout, qu’est-ce qui bloque encore son retour définitif dans son pays d’origine ?
Un symbole de résistance culturelle toujours en exil
Le Djidji Ayokwê, tambour sacré du peuple Atchan, fut arraché en 1916 durant la colonisation. Plus qu’un instrument de musique, ce tambour est un vecteur de communication spirituelle, sociale et politique au sein de la communauté. Sa restitution n’est donc pas une simple affaire muséale, mais un enjeu de mémoire, de dignité et de souveraineté culturelle.
Avancées récentes… mais incomplètes
Si le vote du Sénat constitue une étape saluée par Abidjan, notamment par la ministre de la Culture Françoise Remarck, la dernière marche reste à franchir : l’Assemblée nationale française doit encore valider le texte. D’ici là, l’objet reste officiellement sous la garde du Musée du Quai Branly – Jacques Chirac.
Malgré une convention bilatérale signée en novembre 2024 pour préparer le retour, le processus administratif et politique reste lent, révélant les ambivalences persistantes côté français sur la restitution des biens culturels coloniaux.
Pourquoi ces lenteurs ?
1. Une prudence juridique et politique : La France avance au cas par cas pour éviter de créer un précédent généralisable à des milliers d’objets acquis durant la colonisation. Chaque restitution nécessite une loi spécifique, un processus long et parfois polémique.
2. Des débats internes sur la “propriété universelle” : Une frange de l’élite culturelle française défend encore l’idée que les grandes œuvres doivent “appartenir à l’humanité”, et rester dans les grands musées parisiens. Ce discours post-colonial persistant freine certaines dynamiques.
3. Une complexité diplomatique : Si les relations entre la France et la Côte d’Ivoire sont solides, la question des restitutions touche à des sensibilités profondes liées à la colonisation. Le traitement prudent de ces sujets vise à éviter d’ouvrir un “effet domino” dans d’autres pays africains.
Une mobilisation exemplaire du côté ivoirien
Face à cette inertie, la diplomatie culturelle ivoirienne a redoublé d’efforts. Le Président Alassane Ouattara, le Premier ministre Robert Beugré Mambé, et la ministre Françoise Remarck se sont personnellement impliqués. Une synergie entre musées, scientifiques, diplomates et communautés locales a permis de bâtir un dossier solide, soutenu par une coopération étroite avec le Musée du Quai Branly, France Diplomatie, et Expertise France.
Le retour du tambour : une question de justice historique
Pour de nombreux observateurs, il est temps que la France tienne sa promesse de “restituer sans tarder” les œuvres illégalement acquises, notamment celles qui portent un poids sacré et communautaire aussi fort que le Djidji Ayokwê.
La lenteur actuelle ne reflète plus la volonté politique affichée, ni l’engagement franco-ivoirien renouvelé en matière culturelle. Le peuple Atchan, et au-delà toute la nation ivoirienne, attendent désormais un geste concret, sans délai, et à la hauteur du symbole.
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