UEMOA: La faiblesse prolongée du BTP interroge sur la capacité des États à maintenir le cap

la croissance se maintient, mais le secteur du BTP marque le pas

La croissance reste dynamique dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Selon les dernières prévisions publiées par la BCEAO, l’économie régionale devrait progresser de 6,5% au deuxième trimestre 2025. Une performance qui devrait être portée par l’agriculture vivrière, en particulier dans les zones rurales et par la stabilité du secteur des services non marchands.

Mais derrière cette moyenne globale, certains signaux d’alerte persistent. La contribution du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), pourtant considéré comme un pilier du développement économique et social, continue de se contracter.

D’après les projections de la Banque centrale régionale, la contribution du BTP au PIB resterait négative pour le troisième trimestre consécutif, à -8,6 %, après -9,3 % au dernier trimestre 2024. Plusieurs raisons expliquent ce repli : un ralentissement des investissements publics, des arbitrages budgétaires défavorables aux grands chantiers, et des retards dans l’exécution des projets.

Le contexte budgétaire reste tendu dans plusieurs pays membres, confrontés à des priorités sociales pressantes et à des dépenses de sécurité en hausse. Certains gouvernements doivent également composer avec des coûts d’endettement élevés et une marge de manœuvre fiscale réduite.

Cette phase de ralentissement intervient après un pic d’activité lié à des investissements massifs, notamment en Côte d’Ivoire, à l’approche de la Coupe d’Afrique des Nations. Le pays avait accéléré la livraison de stades, routes et équipements urbains. Depuis, le rythme est revenu à un niveau plus habituel. « Il y a eu un cycle d’investissements publics très soutenus entre 2022 et 2023, particulièrement en Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, les marges budgétaires sont beaucoup plus contraintes, et cela se ressent dans tous les Etats de l’Union », explique Henoc Dossa, journaliste spécialisé dans les transports et les infrastructures en Afrique de l’Ouest.

Sur le terrain, les entreprises restent prudentes. Si les carnets de commande restent fournis dans plusieurs grandes villes, la dynamique peine à se concrétiser. Les enquêtes menées par la BCEAO auprès des chefs d’entreprise confirment cette tendance : l’indice d’activité du BTP est resté positif en janvier 2025 (+7,7 points), mais légèrement en recul par rapport à décembre. Une dynamique contrastée selon les pays.

L’activité s’améliore au Sénégal (+43,2 points), au Bénin (+23,1), au Burkina Faso (+16,9), en Côte d’Ivoire (+9,0), au Togo (+8,9) et en Guinée-Bissau (+8,2). En revanche, le Mali (-40,8) et le Niger (-24,9) enregistrent des replis significatifs. Ces disparités s’expliquent notamment par la diversité des trajectoires budgétaires et des conditions d’exécution des projets d’infrastructure.

Le contraste est d’autant plus frappant que les autres segments du secteur secondaire affichent de meilleures performances. Les industries manufacturières devraient croître de 4,8% au deuxième trimestre, tandis que les activités extractives et la distribution d’énergie restent stables. Le secteur primaire, quant à lui, bénéficie d’une bonne conjoncture agricole, avec une contribution projetée de 1,6 point de croissance, portée exclusivement par les cultures vivrières.

Concernant les prix, la situation reste maîtrisée. L’inflation annuelle glissante est attendue à 2,0% en avril 2025, en net repli par rapport aux 6,0% enregistrés fin 2021. La détente devrait être alimentée par la baisse des prix internationaux de certaines denrées et par une offre alimentaire intérieure plus abondante.

Fiacre E. Kakpo
Ecofin

Commentaires Facebook

Laisser un commentaire