À Adiaké, localité du sud-est de la Côte d’Ivoire, la lagune Aby fait partie intégrante du quotidien et de l’identité locale. Jadis généreuse et poissonneuse, elle nourrissait familles et marchés. Aujourd’hui, le poisson devient rare et cher, au point d’en devenir un produit de luxe pour la population locale. Ce paradoxe soulève de nombreuses interrogations.
Au marché, vendeuses comme clientes dénoncent l’inflation des prix. Les commerçantes expliquent cette flambée par des hausses successives depuis les pêcheurs jusqu’aux étals, tandis que les clientes peinent à acheter des quantités suffisantes pour nourrir leur famille.
Les raisons de cette situation sont multiples. Selon Ahoua Abouka, président de la coopérative des pêcheurs d’Adiaké, le réchauffement climatique, en perturbant les cycles de reproduction des poissons, en est une cause majeure. À cela s’ajoute l’orpaillage clandestin, dont les rejets toxiques (cyanure, mercure) polluent gravement la lagune et détruisent la biodiversité.
Par ailleurs, face au chômage croissant, de nombreux jeunes se tournent vers la pêche, créant une surdensité humaine sur une ressource déjà affaiblie. Cette pression, combinée à l’usage de pratiques de pêche non durables (comme les filets à petites mailles), accentue encore la raréfaction du poisson et nourrit une spirale inflationniste.
Des solutions existent cependant. Le développement de l’aquaculture, la réglementation des filets de pêche, voire l’interdiction de leur fabrication, sont autant de pistes évoquées pour sauver la lagune et relancer une pêche durable.
Mais l’enjeu dépasse Adiaké. Alors que la Côte d’Ivoire importe chaque année pour plus de 675 millions d’euros de poissons, la crise locale révèle une problématique nationale : comment mieux gérer les ressources halieutiques et garantir la souveraineté alimentaire dans un pays qui dispose pourtant d’un immense potentiel ?
Adiaké, région façonnée par la pêche, voit aujourd’hui son identité menacée. Sans mesures concrètes et urgentes, le poisson pourrait définitivement disparaître des assiettes des familles locales, symbolisant un échec collectif à préserver une ressource vitale.
Avec AIP
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