Côte-d’ivoire: La dette extérieure ne peut plus être une affaire opaque

À quelques mois d’élections décisives, la Côte d’Ivoire est en proie à une inquiétude
généralisée. Ce malaise ne tient pas seulement à l’exclusion de personnalités
majeures de la course électorale pour des motifs discutables, ni au refus persistant
de réviser une liste électorale contestée. Il s’ancre aussi dans une réalité plus
profonde : l’absence de lisibilité de l’action gouvernementale et le brouillard dans
lequel se prennent les décisions engageant l’avenir de la nation.

Parmi les sujets les plus préoccupants, la question de la dette extérieure mérite
d’être mise au centre du débat public.

La dette extérieure de la Côte d’Ivoire atteint aujourd’hui des niveaux colossaux. On
ne peut contester cela sauf à être de mauvaise foi. Pourtant, peu de citoyens sont en
mesure d’en comprendre l’ampleur réelle, l’origine précise, ou l’usage concret. À
quels taux ces emprunts ont-ils été contractés ? Auprès de quelles institutions ou de
quels États ? Quelles contreparties ont été négociées ? Et surtout : quelles
infrastructures ou politiques publiques ont été effectivement financées avec ces
fonds ? Le silence est assourdissant.

Il est inadmissible qu’une démocratie, même fragile, continue de fonctionner avec un
tel niveau d’opacité sur une question aussi déterminante. Car la dette, ne l’oublions
pas, c’est un engagement pris au nom du peuple, mais dont le remboursement
pèsera sur plusieurs générations.

C’est pourquoi nous appelons solennellement à la réalisation d’un audit public et
citoyen de la dette extérieure de la Côte d’Ivoire.

Cet audit devra permettre de :

• retracer l’origine des différents titres d’endettement,
• en identifier les montants et les conditions de remboursement,
• analyser l’utilisation des fonds empruntés,
• vérifier la conformité des opérations aux règles budgétaires et
constitutionnelles,
• évaluer l’impact socio-économique réel des projets financés.

Cet exercice de transparence ne peut être confié uniquement à des technocrates liés
au pouvoir. Il doit associer la société civile, des économistes indépendants, des
juristes, des journalistes d’investigation, des universitaires, et des représentants
citoyens. Il doit être public, contradictoire, et médiatisé.

Exiger un audit de la dette, ce n’est pas faire de la politique partisane. C’est poser un
acte démocratique essentiel : réclamer des comptes à ceux qui engagent les
finances du pays. C’est rappeler que gouverner, ce n’est pas dissimuler. C’est
assumer.

Dans une période où les sacrifices sont exigés des plus vulnérables, où les inégalités
se creusent, et où les services publics s’effondrent, le peuple ivoirien a le droit de
savoir. Il a le droit de comprendre pourquoi, malgré l’endettement massif, la qualité

de vie ne s’améliore pas. Il a le droit de demander des comptes, non pas demain,
mais maintenant.

Car l’avenir ne peut pas être bâti sur des dettes que personne ne comprend, que
personne ne contrôle, et dont trop peu bénéficient.

©Dr KOCK OBHUSU, Économiste

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