Professeur Koua Asseman Médard, Directeur Coordonnateur du PNSM : « 300 à 500 patients de l’autisme correctement diagnostiqués et pris en charge dans nos dispositifs »

À la faveur de la célébration de la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme, le 2 avril, le Professeur Koua Asseman Médard, Directeur Coordonnateur du Programme National de Santé Mentale (PNSM) revient dans cet entretien sur la politique nationale en matière de sensibilisation et de prise en charge des personnes souffrant de l’autisme.

Pouvez-vous nous présenter le Programme National de Santé Mentale ?
La Direction de Coordination du Programme National de Santé Mentale est une direction rattachée à la Direction générale du ministère en charge de la Santé. Nous coordonnons la réponse nationale en matière de santé mentale pour le secteur de la santé et au niveau multisectoriel.
Nos interventions portent sur la promotion de la santé mentale, la prévention en santé mentale et la prise en charge et la réadaptation des personnes concernées par des problématiques de santé mentale, de santé développementale et neurologique.

Vous avez lancé, hier, « Avril Bleu 2025 », qui est une campagne dédiée à l’autisme. Pouvez-vous revenir sur cette campagne ?
C’est une initiative du département ministériel qui est pilotée sous le leadership de monsieur le ministre Pierre Dimba, qui nous a envoyés en mission à l’effet de sensibiliser les populations à la thématique de l’autisme. L’autisme, pour rappel, est un problème de santé en lien avec des perturbations du développement de l’enfant. Les premiers signes s’installent précocement, avant l’âge de trois ans, et touchent principalement des troubles de la communication (verbale ou non-verbale), ainsi que les interactions sociales.
Et ce trouble est à l’origine d’un handicap qui rend difficile l’adaptation de la personne à son milieu, à son environnement, donc à tout ce qui est inclusion au niveau éducatif, professionnel et même communautaire.
Pour résoudre la question de l’amélioration de la condition de vie des personnes autistes, le 2 avril a été institué, depuis plusieurs années, par l’Assemblée des Nations unies pour engager l’ensemble des pays, notamment la Côte d’Ivoire, sur la mise en œuvre d’actions transformatrices, des actions structurelles et infrastructurelles, pour améliorer la prise en charge intégrée et la qualité de vie des enfants, des adolescents, des adultes confrontés à l’autisme.
En Côte d’Ivoire, initialement, on célébrait en une journée la sensibilisation à l’autisme. Sous le leadership de M. le ministre Pierre Dimba, tout le mois d’avril est consacré à l’intensification de la sensibilisation à l’autisme.
Faire de telle sorte que dans tous les coins et recoins, dans toutes les villes, communes, localités du territoire ivoirien, les populations soient sensibilisées à la question de la santé mentale, pour lutter contre les obstacles, les barrières et toutes formes de discrimination et d’exclusion.
De façon spécifique, pour la thématique de 2025, notre attention est portée sur l’inclusion de la thématique de l’autisme dans le système de santé. Nous avons en effet constaté que la sensibilisation de tous les professionnels de santé, médecins, infirmiers, sage-femmes, agents communautaires, était insuffisamment renforcée. Et donc, l’action de 2025, avec la campagne « Avril Bleu » vise justement à intensifier l’engagement des directeurs des structures spécialisées, des hôpitaux généraux, des établissements de premier contact et au niveau communautaire, à l’effet d’offrir des dispositifs médicaux, des approches intégrées, collaboratives, qui permettent d’améliorer la qualité de l’offre de services dans notre système de santé.

Avons-nous, à ce jour, une idée du nombre de personnes souffrant d’autisme en Côte d’Ivoire ? Et comment s’organise la politique de prise en charge au niveau étatique ?
Lorsque nous passons en revue l’activité 2024 de la prise en charge de l’autisme dans nos systèmes de santé, nous tournons autour de 300 à 500 personnes au maximum correctement diagnostiquées et prises en charge dans nos dispositifs, à la fois de structures spécialisées et de structures socioéducatives qui travaillent en collaboration avec les structures sanitaires. Mais à la réalité, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) révèle qu’au niveau mondial, 1% de la population est concernée par l’autisme.
L’un des défis pour nous est de pouvoir améliorer la capacité de diagnostic des enfants, des adolescents et des adultes confrontés à la question de l’autisme, parce que malheureusement encore, beaucoup d’adultes et d’adolescents n’ont pas eu accès à un service de diagnostic. Donc, ils ne savent pas qu’ils sont autistes. Et cela empoisonne leur vie, handicape leur capacité d’insertion et rend difficile leur acceptation par la société. Il s’agit donc de renforcer les capacités de diagnostic précoce, d’autant plus que les premiers symptômes de l’autisme apparaissent avant l’âge de 3 ans.
En matière de réponse ou de dispositif national de prise en charge, dans le grand Abidjan, nous avons le centre de référence « Marguerite Té Bonlé, qui est le centre de référence pour la prise en charge de l’autisme chez l’enfant, le Centre de guidance toujours à l’Institut National de Santé Publique, le Centre de prise en charge de l’autisme chez les adolescents. À Bouaké, nous avons également l’Unité de prise en charge de l’autisme dans le service universitaire de pédopsychiatrie de Bouaké, qui prend en charge à la fois l’autisme chez l’enfant et chez l’adolescent.
Par ailleurs, nous envisageons, d’ici quelques années, une large couverture de ces services au niveau des différents pôles régionaux d’excellence de santé, qui représentent quelque peu des zones de référence et de décentralisation de l’offre de services de santé au niveau du système de santé.
À l’occasion de la journée « Avril Bleu », nous avons célébré cette journée de lancement de cette campagne au CHU de Treichville, en collaboration avec la direction générale de l’INFAS, où l’occasion nous était donnée de voir le leadership du directeur général du CHU de Treichville qui a posé l’acte historique de la première pierre d’un édifice majeur qui est le Centre de diagnostic et de prise en charge de l’autisme pour accroître les capacités de réponse sanitaire pour cette thématique de santé publique.

Votre mot de fin
Aux parents d’enfants autistes, nous voudrions leur traduire les félicitations, les encouragements, tout le soutien et les rassurés de l’accompagnement du Gouvernement de Côte d’Ivoire, particulièrement de Monsieur le ministre Pierre Dimba, qui nous envoie en mission. Nous voulons également dire aux familles de ne pas désespérer. Les solutions à moindre coût existent. Des dispositifs sont en train d’être améliorés au sein du ministère de la Santé, en synergie avec les autres ministères du secteur Éducation-Formation, avec le secteur de la Jeunesse, à l’effet de permettre à ce qu’un enfant autiste ait accès, comme tous les autres enfants, à des services de santé de base, de qualité, adaptés à leurs besoins. Pour ce qui concerne les adolescents, il s’agit de leur permettre d’être dans un parcours professionnel de formation, de sorte qu’à l’âge de jeunes adultes, ils puissent avoir un travail adapté, ce qui nous permettra de parvenir progressivement à une société plus juste, plus solidaire et plus inclusive.
CICG

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