Le Cameroun fait une offre de 120 milliards de fcfa pour le rachat de Société Générale

Le Cameroun a fait une offre de 190 millions USD pour le rachat de Société Générale locale.

Dans une correspondance adressée le 16 janvier 2025 au président du conseil d’administration (PCA) de Société Générale Cameroun (SGC), via le ministre camerounais des Finances, Louis Paul Motaze, l’Etat du Cameroun propose de racheter à 122,64 milliards FCFA (environ 190 millions USD) 58 % des actions de cette banque.

Rachat de Société Générale Cameroun : l’État exerce son droit de préemption

Selon une correspondance du ministre des Finances consultée en exclusivité par EcoMatin, l’État du Cameroun a officiellement signifié à Société Générale qu’il souhaite exercer son droit de préemption sur le rachat de sa filiale camerounaise, rendant ainsi caduc l’accord de principe que le français avait avec le groupe Coris Bank International. Yaoundé, qui souhaite avoir la mainmise sur le choix du futur repreneur de la deuxième plus grande banque du pays, s’est également attaché les services du cabinet d’audit et de conseil Grant Thornton, pour réaliser une nouvelle valorisation de la banque, nettement inférieure à celle effectuée par Société Générale. Gros plan d’EcoMatin sur les chiffres et les derniers rebondissements de l’un des plus grands deals de l’année au Cameroun.

Publiée lundi 3 février 2025 à 12:08:27Modifiée lundi 3 février 2025 à 12:20:55

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Le DG du Groupe Société Générale, Slawomir Krupa et le Ministre des Finances du Cameroun Louis Paul Motaze

L’État du Cameroun s’est officiellement invité au processus de cession des parts détenues par Société Générale dans sa filiale camerounaise. Dans une correspondance adressée le jeudi 16 janvier 2025 au Président du Conseil d’Administration de Société Générale Cameroun, le ministre des Finances Louis Paul Motaze a officialisé l’intention de son pays d’exercer son droit de préemption sur cette société détenue à 58,08 % par le groupe bancaire français.

« Conformément à l’article 10.2 des statuts de la Société, j’ai l’honneur de vous faire savoir que l’État du Cameroun, par l’intermédiaire du ministère des Finances que je représente, souhaite user de son droit de préemption », écrit Louis Paul Motaze. Le droit de préemption renvoie à un privilège statutaire que détient l’État et lui donne la priorité dans l’acquisition d’un actif lorsque son propriétaire manifeste la volonté de le vendre. Louis Paul Motaze met ainsi en application les instructions du président de la République Paul Biya, transmises quelques mois plus tôt par son secrétaire général. Dans la correspondance consultée par EcoMatin, Étoudi déplore l’opacité qui s’est emparée du processus de rachat de la deuxième plus grande banque du pays, ainsi que les manœuvres de communication de « grands groupes bancaires » visant à influencer la bonne tenue du processus.

Coris Bank International

En se positionnant pour le rachat, les autorités camerounaises remettent la balle au centre alors que le processus de désengagement amorcé plusieurs mois auparavant par Société Générale était déjà bien avancé. Selon les journaux français La Lettre et Jeune Afrique, un accord de principe avait déjà été signé avec le groupe Burkinabé Coris Bank, piloté par Idrissa Nassa, pour racheter ces actifs. Dans sa lettre, Louis Paul Motaze reconnaît avoir reçu du banquier parisien un « projet de cession » ainsi qu’une « proposition de prix offert par le potentiel cessionnaire ». Toutefois, la valorisation faite par Société générale de sa filiale camerounaise est différente de celle du Cameroun, ce qui laisse entrevoir de nouvelles tractations pour pouvoir déterminer le juste prix.

En attendant, l’accord avec Coris Bank International est donc placé sur la touche contrairement à ce qu’on voulu laisser entendre certains médias.

Un prix de cession trop élevé ?

Avant de préempter, Yaoundé s’est attaché les services des filiales françaises, camerounaises et ivoiriennes du cabinet Grant Thornton qu’elles effectuent contre-valorisation de la banque. Celle-ci a été effectuée sur la base du modèle d’actualisation des dividendes (Discounted Dividend Model,DDM), qui selon le gouvernement, est « adaptée à Société Générale Cameroun et à son contexte ». Les calculs effectués par les mandataires de l’État valorisent Société Générale Cameroun à 211 158 000 000 FCFA soit environ 321,9 millions d’euros. Sur la base de cette estimation, Yaoundé doit payer 122,64 milliards FCFA correspondant aux 58,08% que le groupe français détient dans le capital de la banque.

On ignore à combien l’actif a été valorisé du côté de Société Générale. Mais la méthode d’évaluation de Grant Thornton laisse croire que le prix a été abaissé. Par exemple, le cabinet mandaté par Yaoundé a procédé à un ajustement à la hausse (+7,618 milliards FCFA) du montant des provisions des créances en souffrance « conformément aux règles de provisionnement de la COBAC ». Bien plus, apprend-on, un inventaire physique des immobilisations réalisé au cours de l’année 2024 fait ressortir des pertes potentielles de 1,93 milliard FCFA. D’autres ajustements concernent les provisions pour dépréciation des créances, mais surtout celles à comptabiliser suite à la liquidation officielle de Yup Cameroun prononcée en septembre 2024. « Je vous remercie de bien vouloir me tenir informé des étapes à suivre et des éléments nécessaires pour finaliser la cession », conclut le ministre camerounais des Finances dans sa correspondance.

Mainmise sur le choix du futur repreneur

L’État Camerounais contrôle 25,6% du capital de la filiale locale de Société Générale. S’il acquiert la participation sus évoquée, il deviendrait majoritaire avec 83,68%. Mais tel n’est pas son objectif. Selon les informations de EcoMatin, Yaoundé souhaite, à travers l’exercice de son droit de préemption, avoir la mainmise sur le choix du futur potentiel repreneur. C’est d’ailleurs de cette manière que s’est pris l’État Congolais pour ensuite vendre Société Générale Congo à BGFIBank, alors qu’un accord de cession avait été déjà signé avec le groupe Vista.

Selon les informations à notre disposition, le Cameroun n’avait pas encore officiellement marqué sa préférence pour un repreneur. L’option de la CNPS, le fonds de pension public, n’est plus à l’ordre du jour. Le Directeur, le Directeur général Olivier Mekulu Mvondo s’est allié à plusieurs chefs d’entreprises locales pour pouvoir formuler une offre de rachat. Mais sa requête auprès des autorités est restée lettre morte.

Au Cameroun où elle est présente depuis le début des années 60, Société Générale opère à travers un réseau de 46 agences. Selon le Classement EcoMatin des banques 2023, la banque a réalisé un résultat net positif de 29,8 milliards de Fcfa en 2023, soit une hausse de 31% par rapport à 2022. Son total bilan a connu une croissance de 4% en un an, à 1 453,7 milliards FCFA la maintenant au rang de deuxième plus grande banque du pays derrière Afriland First Bank.

Ecomatin.net

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