Classée 2è meilleure université d’Afrique francophone en 2024, l’Institut National Polytechnique Houphouët-Boigny (INP-HB) de Yamoussoukro demeure un centre d’Excellence. Dans un entretien accordé au Centre d’Information et de Communication Gouvernementale (CICG), son Directeur général, Dr. Moussa Diaby [à gauche sur la photo], présente les piliers du succès de l’établissement.
Présentez-nous l’Institut National Polytechnique Houphouët-Boigny.
L’Institut National Polytechnique Félix Houphouët-Boigny (INP-HB), dans sa forme actuelle, a été créé le 4 septembre 1996 par décret ayant pour but d’occasionner la fusion de quatre ex-Grandes Écoles publiques alors situées à Yamoussoukro : l’École Nationale Supérieure des Travaux Publics (ENSTP), l’Institut National Supérieur de l’Enseignement Technique (INSET), l’École Nationale Supérieure d’Agronomie (ENSA), et l’Institut Agricole de Bouaké (IAB). Ces écoles ont migré progressivement à Yamoussoukro, jusqu’en 1996, avec une réforme portée par le ministre Saliou Touré.
Aujourd’hui, l’INP-HB est un établissement à 11 écoles. Il s’agit notamment, pour le volet de l’enseignement, d’une école préparatoire, qui recrute des étudiants bacheliers et les prépare à entrer dans les écoles d’ingénieurs. Sept écoles de spécialité forment des techniciens supérieurs spécialisés et des ingénieurs de conception. Deux écoles doctorales sont destinées à la formation doctorale. Et une école se destine à la formation continue et au perfectionnement des cadres.
Pour le volet de la recherche, nous avons quatre gros centres de recherche, les Unités Mixtes de Recherche et d’Innovation (UMRI) dans le domaine des Sciences Agronomiques et Procédés de Transformation, des Sciences et Techniques de l’Ingénieur, des Mathématiques et des Sciences du Numérique, ainsi que des Sciences Économiques de Gestion.
L’INPHB renferme également des centres de formation, des centres d’expertise et surtout un incubateur d’entreprises, qui permet d’accompagner de jeunes porteurs de projets afin de les initier à la création d’entreprises.
L’INP-HB a été classé deuxième meilleure université francophone d’Afrique, et 36e au niveau africain en juillet 2024. Comment avez-vous accueilli cette information et qu’est-ce qui, selon vous, a justifié ce classement ?
Quand vous avez un établissement dont vous avez la direction, qui se trouve classé par des institutions internationales, c’est une nouvelle reluisante, qui fait naturellement plaisir. C’était une très intéressante nouvelle pour moi-même, pour tout le personnel de l’INP-HB, mais au-delà, pour le Ministère de l’Enseignement supérieur, et pour toute la Côte d’Ivoire. Ce succès a été rappelé à deux reprises par le Président de la République lors de discours importants à la Nation : le 18 juin 2024 devant le Parlement réuni en Congrès, et le 31 décembre de la même année.
Le ministre le dit souvent, avant l’arrivée du Président Alassane Ouattara à la magistrature suprême, aucun de nos établissements d’enseignement supérieur n’apparaissait dans les classements. L’INP-HB n’est apparu qu’il y a deux années, dans un classement qui fait des analyses de la présence sur les réseaux sociaux, qui est le moteur des classements Unirank. Nous occupions en ce moment la 198e place. Nous avons progressé dans ce classement jusqu’à la 150e place l’année dernière. Mais là, il s’agit d’un autre moteur de classement, Top University rank, qui est un organe de classement américain et qui nous positionne à la 36ème place au niveau Afrique sur un classement de 150 universités et Grandes écoles africaines. Ce ranking nous accorde la deuxième place parmi les institutions d’Afrique francophone, après l’université Mohamed V.
C’est un résultat majeur et important pour nous. Cela veut dire que c’est le fruit de toute la politique gouvernementale impulsée par le Président de la République, portée par le Premier Ministre, et dont le sous-secteur enseignement supérieur et recherche scientifique est mené avec beaucoup de dynamisme par le ministre Adama Diawara.
Nous sommes témoins du sursaut que l’école a connu déjà depuis 2012 sous la gouvernance du Président Alassane Ouattara. Mais, nous sommes conscients de tous les investissements effectués par l’État de Côte d’Ivoire à travers des programmes financés par les bailleurs dont la phase 2 du Contrat de Désendettement et de Développement (C2D2).
Nous sommes également conscients des financements obtenus à travers quatre centres d’excellence africains au niveau national, dont deux à l’INP-HB. Ils ont permis de travailler sur nos infrastructures, de procéder à des réformes pédagogiques, de passer un certain nombre d’accréditations de nos formations aux niveaux national, régional en Afrique et aussi international.
L’appui du C2D, par exemple, nous a permis d’obtenir l’accréditation à la commission des titres d’ingénieurs pour nos formations d’ingénieurs.
Le hub franco-ivoirien, qui est un programme de partenariat que nous avons noué avec l’ambassade de France, nous a permis d’avoir des formations délocalisées reconnues à la Commission des grandes Écoles (CGE) en France.
Nous avons travaillé à faire en sorte que nos formations répondent à des standards internationaux, que notre réseau partenarial rejoigne nos partenaires historiques. Nous sommes allés à la diversification de nos partenariats, notamment avec l’École polytechnique de Shenzhen (Chine), l’École polytechnique de Montréal (Canada), le Michigan State University (Etats-Unis).
Nous avons ouvert des échanges avec le MIT, Harvard, et la Silicon Valley. Ce sont autant d’éléments de nature à permettre l’amélioration de la notoriété de l’établissement.
Il nous faut également exister en Afrique. Nous avons, pour ce faire, entamé une série de partenariats avec les institutions africaines, notamment le Maroc, le Rwanda, l’Afrique du Sud, y compris un certain nombre de programmes au niveau sous-régional.
Il faut, par ailleurs, signifier que nous sommes un établissement avec une ouverture internationale importante au niveau de l’Afrique. Nous accueillons 22 nationalités d’étudiants, les meilleurs de leurs pays. Cela se fait ressentir dans les classements.
Il n’est donc pas étonnant que lorsqu’une institution, sur la base de ces différents résultats, vienne à classer notre établissement dans le top des classements, nous espérons que nous pourrons encore avancer, parce qu’il y a des marges de progrès.
L’INP-HB, dans la vision de son fondateur, le Président Félix Houphouët-Boigny, était d’en faire un pôle d’excellence dont l’impact devait être perceptible sur le développement de la Côte d’Ivoire. Monsieur le Directeur Général, outre le fait que les étudiants de l’INP-HB portent hauts les couleurs de la nation dans les Grandes écoles et Universités à l’extérieur, que peut-on mettre réellement à l’actif de l’INP-HB comme acquis dans le développement de la Côte d’Ivoire ?
D’abord, l’INP-HB a été créé pour former les cadres ivoiriens. Les ingénieurs, les techniciens, les ingénieurs hautement qualifiés pour contribuer au développement socio-économique de notre nation. Il est clair qu’un établissement comme le nôtre, avec des classes préparatoires, qui forment les meilleurs bacheliers et qui les préparent à des hautes études scientifiques de niveau universitaire, puisse se positionner au niveau international. Aujourd’hui, nos étudiants vont à l’École polytechnique, à l’École des ponts, à l’École centrale… Cela contribue au rayonnement de notre établissement.
Il faut cependant signaler que pendant que nous nous vantons de faire entrer 4, 5, 6, 7 étudiants de l’INP-HB à l’École polytechnique en France, les Marocains y font entrer au moins 40 à 50 étudiants. Nous avons donc des marges de progrès à réaliser à ce niveau.
Toutefois, de 1981, année d’entrée du premier Ivoirien, M. Tidjane Thiam, à l’École polytechnique, à 2001, avec celle du ministre Cissé Abdourahmane, il n’y eu que 8 Ivoiriens qui sont rentrés en École d’ingénieurs à l’École polytechnique. Ils sont rentrés depuis des classes préparatoires qu’ils ont eu à passer en France. Il y en a eu d’autres qui sont rentrés à l’École polytechnique pour aller faire des Masters ou des Doctorats. Mais si nous prenons comme base de comparaison, l’entrée pour les cycles ingénieurs, il y en avait que 8.
À l’arrivée du Président Alassane Ouattara, une convention a pu s’établir sous l’impulsion de plusieurs autorités. Les efforts conjugués du ministre Abdourahmane Cissé qui a poussé pour que le concours puisse se passer ici en Côte d’Ivoire sous la gouvernance de l’ex Directeur général de l’INP-HB, le ministre de l’Enseignement technique, de la Formation professionnelle et de l’Apprentissage, de la ministre Bakayoko Ly Ramata, du ministre Gnamien Konan, et des autres ministres successifs jusqu’au ministre Adama Diawara aujourd’hui, il y a une vraie politique d’accompagnement de cette initiative gouvernementale.
Il faut rappeler qu’en 2016, des Ivoiriens qui ont passé le concours depuis les classes prépa de Côte d’Ivoire ont commencé à intégrer l’École polytechnique. La première année à laquelle nous avons passé ce concours depuis l’INP-HB, nous avons eu 5 admis, là où depuis 1981 avec l’entrée de Thiam, jusqu’à 2001, c’est-à-dire il y a 20 ans, on en n’avait que 8. Et d’année en année, les étudiants ivoiriens ont commencé à rentrer à l’École polytechnique. Entre 2016 et aujourd’hui, ce sont 53 jeunes Ivoiriens qui ont quitté la Côte d’Ivoire pour rentrer à l’école polytechnique, dont 40 sont issus des classes préparatoires de l’INP-HB. C’est un résultat remarquable qu’il faut mettre à l’actif de la vision du Chef de l’État, de l’action gouvernementale, à travers le ministre de l’Enseignement supérieur qui appuie le départ de ces jeunes pour ces formations de haut niveau avec des bourses d’excellence.
Ensuite, l’autre volet, le plus important, c’est que le Président Félix Houphouët-Boigny avait pour vision d’avoir un centre de formation de l’élite nationale des jeunes qui allaient constituer des cadres dynamiques afin de contribuer au développement, à la construction de notre pays.
La première de nos écoles a été créée en 1962, c’est-à-dire au lendemain des indépendances. Le Président Félix Houphouët-Boigny avait pour stratégie de préparer l’ivoirisation de l’emploi, de développer le capital humain dans le domaine de l’ingénierie, des emplois techniques. C’est pourquoi ces techniciens ont été formés. Et tous les grands chantiers qui ont été ouverts dans notre pays, que ce soit dans le développement des infrastructures, soit dans le domaine des techniques et autres, sont, pour la plupart, des ingénieurs ou des techniciens formés à l’INP-HB.
Concernant le domaine de l’agriculture, l’agronomie de façon générale, le Président Félix Houphouët-Boigny disait que le succès de ce pays repose sur l’agriculture. La mécanisation de l’agriculture, la politique agricole de notre pays, la conduite des innovations dans le domaine agricole, la plupart des ingénieurs en agronomie ont été formés à l’ENSA, aujourd’hui ESA.
Il est donc clair que dans tous les secteurs d’activité, l’INP-HB, avec plus de 40 000 diplômés formés depuis 1962 à aujourd’hui, est présent dans tous les secteurs d’activité, depuis le secteur primaire au secteur tertiaire. Nous avons une école qui forme dans le domaine du pétrole et de l’énergie. Ce sont des ingénieurs de l’INP-HB, avant des ingénieurs de l’ESMG, aujourd’hui des élèves de l’Ecole Supérieure du Pétrole et de l’Énergie (ESPE), qui servent sur les différents champs pétroliers que nous découvrons aujourd’hui.
Dans le secteur minier, avec la découverte des différentes mines, nous avons à l’ESMG, des écoles qui forment dans ce secteur d’activité.
Nous avons une école d’industrie dans le domaine de la télécommunication. Chez les différents opérateurs télécom, ce sont des ingénieurs, pour la plupart, formés à l’INP-HB, qui participent au jour le jour dans le développement de l’industrie nationale de façon générale.
Nous avons aussi nos ingénieurs qui s’exportent, qui travaillent dans des multinationales au niveau étranger, etc. Nous avons une école de commerce et d’administration d’entreprise dans le domaine du business, du management. Et les top managers dans les entreprises sont pour la plupart également formées à l’INP-HB.
La chance que j’ai eue en devenant DG de l’INP-HB, c’est que lorsque je vais dans une grande entreprise, je suis souvent face à un top manager qui est ancien de l’INP-HB ou même un membre du board qui est également ancien de l’INP-HB. Cela facilite les relations et nous permet de développer notre établissement sur divers pans de coopération.
Lorsque le Président de la République avait voulu faire renaître l’ancienne compagnie Air Ivoire, il a fallu s’appuyer sur l’INP-HB pour qu’on ait des compétences pour accompagner la création d’Air Côte d’Ivoire, pour développer la compagnie et former des pilotes. Aujourd’hui, nous sommes en train de former des ingénieurs dans le transport aérien, des mécaniciens dans le secteur de l’aéronautique. Tout cela en collaboration avec l’École nationale d’aviation civile qui se trouve à Toulouse.
Lorsque nous avons découvert le champ Baleine, il fallait former des ingénieurs dans le secteur du pétrole. C’est encore l’INP-HB qui a développé des curricula de formation pour former des ingénieurs dans ce secteur. Aujourd’hui, nous développons des centrales solaires dans le pays, à Boundiali notamment. Il faut encore du capital humain pour accompagner cela avec ces formations dans le domaine de la transition énergétique, des énergies renouvelables et bien d’autres. Ce sont des compétences que nous formons pour ces secteurs d’activités.
Quels sont les prochains chantiers prévus à l’agenda de l’INP-HB ?
Ce que nous aimerions voir, c’est que nous ayons une institution qui soit comme MIT ou Harvard, de sorte qu’on puisse dire que de notre institution, il y a un jeune qui a inventé quelque chose, qui a révolutionné l’économie nationale et qui a apporté un plus en termes de valeur ajoutée au niveau national.
L’INP-HB est certes outillé en matière de recherche, mais nous souhaitons une recherche tournée autour de l’innovation et du développement, avec des produits de l’innovation qui soient valorisés par des enseignants-chercheurs ou même par des jeunes apprenants, des jeunes étudiants et qui puissent faire émerger des startups capables de devenir des succès industriels et économiques.
Voici le rêve que nous avons pour l’INP-HB. C’est pourquoi nous avons en notre sein, sous l’impulsion du ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, à la faveur des réformes des statuts de l’INP-HB, créé une direction générale adjointe en charge de la recherche, de l’innovation et du technopole.
L’idée est que nous puissions avoir une recherche orientée vers la création de valeur, l’innovation surtout pour que nous puissions arriver au transfert des résultats de la recherche et de l’innovation vers la création d’entreprises au travers du technopole.
Le prochain défi de l’INP-HB, c’est qu’on puisse progressivement arriver à avoir un technopole, un parc d’innovation technologique, comme cela est en train d’ailleurs de se faire aujourd’hui progressivement avec le VITIB, en s’appuyant sur les ressources humaines et enseignants-chercheurs, ainsi que les étudiants.
Nous l’avons déjà commencé. Nous avons des incubateurs en notre sein, nous accompagnons des projets de start-up, etc. Mais il faut qu’on aille beaucoup plus loin que ça.
Un autre chantier est que l’INP-HB puisse servir la communauté par des actions communautaires, l’aide aux collectivités territoriales, l’accompagnement des collectivités et de la société.
Donc notre action, en la faveur du développement de la communauté, doit répondre aux attentes de nos concitoyens. Nous avons amorcé cela avec nos étudiants en les impliquant au travers de stages de développement humain. Il faut qu’on aille beaucoup plus loin que ça pour qu’on puisse faire sentir l’impact de l’INP-HB au niveau du développement local.
Votre mot de fin
Nous sommes dans un pays qui est émergent ou qui est en voie de l’être au vu de toutes les réalisations faites depuis ces dernières années par le Président de la République, Son Excellence Alassane Ouattara. Pour accompagner cette émergence, il va falloir que cela puisse s’appuyer sur des ressources humaines de qualité, bien formées, que cela puisse s’appuyer sur une capacité de recherche importantes qui adressent les problématiques de développement de notre pays. Ce sont ces deux pans d’activité, ces deux objectifs qui sont visés par le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, sous le leadership du ministre, le professeur Adama Diawara.
Nous devons nous inscrire, en tant qu’institution sous tutelle dans cette vision, pour que notre établissement puisse apporter le développement par l’atteinte des objectifs qui sont les siens. Que notre établissement puisse, dans la mesure de son possible, dans son secteur d’activité, au respect de son périmètre, apporter sa part dans la construction de notre pays, dans son développement. Voici ce qui nous importe aujourd’hui et sur lequel nous déployons toute l’énergie qui est la nôtre.
CICG
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