Toujours en exil, l’ancien président de l’Assemblée nationale, condamné à la prison à vie à Abidjan, compte « repositionner » son mouvement politique « comme une force incontournable du paysage politique ivoirien ».
Jeune-Afrique par Florence Richard
Sur l’écran, une mosaïque de visages. Ceux d’Ivoiriens connectés depuis Abidjan, Yamoussoukro ou encore Séguéla (Nord-Ouest). Certains sont assis dehors sur des chaises en plastique, d’autres se sont réunis dans des bureaux. Nous sommes le 31 décembre 2024, à quelques heures du passage à la nouvelle année et tous participent à un échange virtuel qu’ils attendent depuis très longtemps : Guillaume Soro, ancien président de l’Assemblée nationale ivoirienne de 2012 à 2019, a décidé de prendre du temps pour s’adresser à eux, lui qui n’est pas rentré au pays depuis cinq ans.
« Apaisé et sans rancœur »
Pendant deux heures, drapeau aux couleurs de la Côte d’Ivoire en toile de fond, il évoque avec ces militants, tous membres de coordinations régionales de son mouvement politique, Générations et peuples solidaires (GPS), « le temps de silence, d’hibernation » dont il sort en « homme apaisé, sans rancœur, qui a gagné en maturité ».
À moins d’un an de la prochaine élection présidentielle, Guillaume Soro le répète : il est « prêt à gouverner » le pays. Une détermination qu’il exprime à distance depuis « un pays de la zone AES [Alliance des États du Sahel] », selon ses proches. Il serait en réalité à Niamey. En novembre 2023, au lendemain de l’annonce de la fin de son « exil » et de son intention de retrouver « [sa] terre ancestrale et natale d’Afrique », c’est dans la capitale nigérienne, pays dirigé par le général Abdourahamane Tiani, qu’il était réapparu après une longue période d’errance entre Europe et Asie.
Aux membres de son cabinet avec qui il participe chaque mardi à une réunion à distance (une dizaine sont en Côte d’Ivoire, trois en Europe), Guillaume Soro réaffirme là aussi son ambition « de repositionner GPS comme une force incontournable du paysage politique ivoirien et de préparer activement [la] victoire. » « Mon projet de société est prêt. Mon programme de gouvernement est prêt », assure-t-il lors de ses vœux à ce cercle de fidèles avec qui il ne communique désormais plus que par internet, parfois difficilement, avec un certain nombre de coupures qui freinent la fluidité des échanges.
Mystères
« Les membres ne se rencontrent que sur une plateforme électronique, se reconnaissent plus par la voix, les écrits que par l’image », résume ainsi le coordonnateur du cabinet dont l’identité est tenue secrète. Tout au plus apprendra-t-on qu’il s’agit d’un cadre de l’administration territoriale ivoirienne toujours en activité. Idem pour les autres membres de cette structure mise sur pied dans le courant de l’année dernière. Guillaume Soro continue de cultiver le mystère autour des cadres de son mouvement politique dont il conteste la dissolution pourtant confirmée en appel par la justice ivoirienne. L’affaire a été portée devant la Cour de cassation.
En 2024, deux d’entre eux, Kando Soumahoro et Mamadou Traoré, ont été condamnés à deux ans de prison ferme et cinq ans de privation de droits civiques pour « maintien illégal d’une association et trouble à l’ordre public ». Le premier était poursuivi pour avoir signé une déclaration commune de l’opposition le 9 août, demandant des réformes électorales et l’ouverture d’un dialogue politique avec le pouvoir, au nom de Générations et peuples solidaires.
Pas de quoi entamer les ambitions politiques de l’ancien chef de la rébellion ivoirienne qui a entrepris des « réformes structurantes » au sein de GPS avec la mise en place de plusieurs commissions, dont une a été confiée à Franklin Nyamsi, ce professeur de lycée en France, originaire du Cameroun, connu pour ses diatribes contre la politique française en Afrique. Il a récemment été condamné par le tribunal correctionnel de Rouen à six mois de prison avec sursis pour « abus de confiance » pour sa gestion de l’association « Crush Party de Paris de Guillaume Soro » qu’il préside en Normandie. Ses avocats ont fait appel.
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« Le pays est ouvert »
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