La chute de Bachar El-Assad : le bouleversement de l’architecture russe en Afrique

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Par Fleur Kouadio

Lancée le 27 novembre, l’offensive fulgurante des rebelles syriens, menée par le groupe islamiste Hayat Tahrir Al-Cham (HTC) a fini par renverser le pouvoir en place, quelques jours seulement après avoir pris Alep, la deuxième ville du pays. Ce week-end, de nombreux médias ivoiriens ont ainsi relayé la fuite de l’ex-président Bachar al-Assad vers la Russie depuis l’aéroport international de la capitale syrienne. Dimanche matin, des vidéos circulaient sur les réseaux sociaux montrant des combattants rebelles dans les rues de Damas.

Ce soulèvement populaire bouleverse inévitablement les lignes d’un Moyen-Orient déjà à feu et à sang depuis l’attaque du 7 octobre 2023. Quels sont cependant les enjeux de cette déroute de l’axe Damas-Moscou pour le continent africain ? 

La chute de Bachar Al-Assad, un revers d’ampleur pour Vladimir Poutine

En 2015, le soutien du Kremlin lui avait permis au président syrien de reprendre le contrôle d’une grande partie du pays. Ces derniers jours, l’armée russe, concentrée sur le front ukrainien, n’est pratiquement pas intervenue face aux rebelles islamistes. La perte de cet allié fidèle au Moyen-Orient est triple pour Vladimir Poutine. Elle est d’abord économique puisque Moscou devrait perdre l’exploitation de plusieurs gisements de phosphate ou encore de pétrole. Le Kremlin devrait également perdre deux bases militaires russes prépositionnées : la base aérienne de Hmeimim, au sud-est de Lattaquié, et la base navale de Tartous. Or, aux yeux de la Russie, ces bases navales et aériennes “sont des centres de ravitaillement essentiels pour sa stratégie ambitieuse d’expansion de son influence militaire en Libye, en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale”, selon le correspondant en Afrique du Globe and Mail. En effet, ces deux points d’appui stratégiques lui servaient à conduire ses opérations en Afrique, notamment en permettant de projeter ses avions de transport Iliouchine IL-76 sur le théâtre sahélien. 

L’Alliance des Etats du Sahel (AES) bientôt sans appui de Wagner ? 

Avec l’effondrement de son hub logistique syrien, la Russie devrait rencontrer certaines difficultés à approvisionner ses théâtres d’intervention africains, que ce soit la République Centrafricaine, le Mali ou bien le Burkina Faso. Si les agences de presse russes (Ria NovostiTass) insistent sur le soutien indéfectible du Kremlin au dirigeant syrien déchu, « un ami en difficultés », la question de la perte stratégique des bases navale et aérienne n’a pour l’instant fait l’objet d’aucune annonce officielle. Que peut devenir Wagner sans ces vols de ravitaillement essentiels à la poursuite de ses opérations auprès des juntes ? Difficile à dire pour l’heure. Néanmoins, on observe depuis plusieurs mois une volonté de diversification des partenaires sécuritaires au sein de l’AES : début novembre, la société de formation militaire turque Canik Academy diffusait une vidéo promotionnelle de ses activités paramilitaires au Mali. 

Ainsi, l’effondrement du gouvernement Assad a des répercussions au-delà même du Moyen-Orient, touchant probablement à moyen terme le continent africain et les pays partenaires de Moscou. 

Par Fleur Kouadio, rédactrice en chef de Cap’Ivoire Infos

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