Côte d’Ivoire : Attaques récurrentes contre la Commission Electorale Indépendante (C.E.I) – L’écrivain Abdon TAWA se prononce (Libre Opinion)

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 C’est du déjà-vu…

Dans mon pays, les voix s’élèvent de plus en plus pour critiquer l’organe chargé d’organiser les élections. Les reproches les plus virulents proviennent de l’opposition ivoirienne. À tort ou à raison ? Je ne saurais l’affirmer avec certitude. Cependant, les arguments avancés font régulièrement référence aux élections de 2010.

À cette époque, après une longue période de crise politique remontant à l’élection de 2000, la Côte d’Ivoire avait besoin d’un scrutin juste, transparent et inclusif. Ce dernier devait permettre à tous les acteurs politiques de mesurer leur force dans les urnes. Or, les résultats de cette élection ont laissé des traces profondes : les perdants ne cessent, jusqu’à ce jour, de pointer du doigt la Commission Électorale Indépendante (CEI).

Je tiens à préciser que l’objet de ce texte n’est pas de remettre en question le droit des citoyens à critiquer une institution publique, surtout une institution financée par les deniers publics. Mon propos vise plutôt à souligner le caractère répétitif de ces critiques envers l’organe électoral. En effet, il semble que ces contestations émanent souvent des mêmes acteurs.

Retour dans le passé : 1990 et l’avènement du multipartisme

En 1990, avec le retour au multipartisme, de nombreuses revendications émergent pour garantir des élections transparentes. Parmi celles-ci figure l’exigence de remplacer le ministère de l’Intérieur, jusque-là en charge des élections depuis l’indépendance, par une commission indépendante.

Cette revendication est restée lettre morte sous le pouvoir du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) jusqu’en 1999, année du premier coup d’État dans l’histoire du pays. Ce bouleversement politique a entraîné la mise en place d’une commission électorale indépendante par les militaires au pouvoir. Paradoxalement, c’est avec cette même commission que le pays a connu sa première crise post-électorale. L’élection qui suivit a tourné en faveur du Front Populaire Ivoirien.

2010 : une nouvelle élection, une nouvelle crise

En 2010, une autre élection inclusive est organisée, réunissant les principaux leaders politiques ivoiriens :

  • Henri Konan Bédié pour le PDCI-RDA,
  • Alassane Ouattara pour le Rassemblement des Républicains (RDR),
  • Laurent Gbagbo sous la bannière de la Majorité Présidentielle (LMP).

Malgré l’arbitrage de cette élection par une commission dite indépendante, le scrutin s’est soldé par une nouvelle crise politique et sociale, avec un bilan tragique de 3 000 morts.

Un manque de remise en question

Face à ces échecs répétés, la cohérence et l’honnêteté intellectuelle auraient dû conduire les acteurs politiques des années 1990 à reconnaître les limites de leur proposition initiale : une commission indépendante comme solution miracle. Au lieu de cela, certains, hommes politiques comme à leur habitude, avancent des noms de personnalités qui, selon eux, seraient capables d’organiser des élections transparentes.

Mais est-il raisonnable de croire que l’honnêteté d’un individu, perçue par une partie, sera acceptée par tous ? Non ! Il faut arrêter de manipuler les émotions des Ivoiriens avec ce débat récurrent sur la CEI.

Vers une réflexion constructive

Ce qui serait plus pertinent, à mon sens, serait d’entreprendre un véritable bilan comparatif entre les deux systèmes électoraux que le pays a connus : celui sous la tutelle du ministère de l’Intérieur et celui organisé par la CEI. Sur la base de ce bilan, des réformes adaptées pourraient être envisagées, afin de renforcer notre démocratie.

L’objectif ultime doit être de respecter les citoyens et de garantir leur droit de vivre dans un pays pacifique, engagé sur la voie du développement durable.

Abdon TAWA, écrivain, auteur de : Pourquoi la génération FESCI doit prendre le pouvoir d’Etat. La Côte d’Ivoire à la recherche d’un nouveau leadership politique

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