Depuis 2011, année où le guide libyen Mouammar Kadhafi fut assassiné par les troupes de l’OTAN avec le feu vert de Barack Obama, Maliens, Burkinabè et Nigériens se défendent comme ils peuvent contre des terroristes armés par des puissances étrangères qui veulent faire main basse sur leurs richesses minières. Chaque jour, des militaires et civils sont massacrés dans les trois pays du Sahel mais jusqu’ici aucun pays de l’Afrique « anglophone » n’a réagi aussi vigoureusement que le Rwanda où l’anglais a détrôné le français depuis 2003.
En effet, le pays de Paul Kagamé envoya rapidement des soldats en Centrafrique en 2020 et au Mozambique en 2021.
Sauf erreur de ma part, je ne suis pas certain que d’autres pays de l’Afrique « anglophone » aient mené une action similaire.
Je n’ai pas encore appris que des marches ou des meetings aient été organisés à Monrovia, Abuja, Nairobi, Lusaka, Dar es Salam ou Johannesbourg pour soutenir les Africains « francophones » qui, depuis un certain temps, vivent l’enfer sur terre.
Je n’ai pas encore entendu dire que des cotisations ont été levées à Freetown, Kampala ou Harare pour soulager les personnes déplacées dans les pays de l’AES.
En août dernier, les ambassades de ces trois pays à Washington avaient organisé une collecte de fonds pour venir en aide aux victimes du terrorisme mais aucun diplomate de l’Afrique anglophone n’avait pris part à l’événement.
Peut-on se dire héritiers des Julius Nyerere, Kwame Nkrumah, Jomo Kenyatta ou Kenneth Kaunda et avoir un tel comportement? L’Afrique du Sud, qui fut aidée par les autres pays africains quand elle combattait l’apartheid, peut-elle continuer à rester indifférente au combat mené par Bamako, Ouagadougou et Niamey?
En 2011, Jacob Zuma avait piteusement retourné sa veste à propos de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire parce que Sarkozy avait promis un siège permanent à l’Afrique du Sud, une promesse qui ne se concrétisa jamais.
J’aimerais tant que lui et les autres Africains anglophones se souviennent de Modibo Keïta pour qui la solidarité n’était pas un mot creux, qui disait ceci: « Partout où l’homme africain, l’homme tout court, était asservi, bafoué, notre Parti n’a pas recherché la criminelle médiation. C’est résolument qu’il a porté aide à nos frères opprimés. »
J’aimerais tant qu’ils réécoutent la déclaration de l’Algérien Ahmed Ben Bella: « Parallèlement à l’action du Che [Ernesto Guevara], nous menions une autre action pour le sauvetage de la révolution armée de l’Ouest du Zaïre. En accord avec Nyerere, Nasser, Modibo Keïta, Nkrumah, Kenyatta et Sékou Touré, l’Algérie apportait sa contribution en envoyant des armes via l’Égypte à travers un véritable pont aérien, tandis que l’Ouganda et le Mali étaient chargés de fournir des cadres militaires. C’est au Caire, où nous étions réunis, que nous avions conçu ce plan de sauvetage et nous commencions à l’appliquer lorsqu’un appel désespéré nous fut adressé par les dirigeants de la lutte armée. Malheureusement, malgré nos efforts, notre action intervint trop tard et cette révolution fut noyée dans le sang par les assassins de Patrice Lumumba. »
Où sont les Wole Soyinka, Ngugi Wa Thiongo et autres Ayi Kwei Armah?
Pourquoi sont-ils silencieux? À quel moment ouvriront-ils la bouche? Doit-on penser que la lutte pour l’émancipation de toute l’Afrique ne les intéresse plus? Si « être homme, c’est connaître la honte en face d’une misère qui ne semblait pas dépendre de soi »(Antoine de Saint-Exupéry), ceux qui se taisent devant les malheurs et souffrances des Maliens, Burkinabè et Nigériens méritent-ils encore de porter ce nom d’homme?
Jean-Claude DJEREKE
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