Fraternité Matin / Méprisés et sous le poids des dettes – Les travailleurs boudent le tournoi de foot des 60 ans du groupe

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  • Les choix du Dg Abdel Nouho désavoués

Les travailleurs de Fraternité, journal quotidien de référence en Côte d’Ivoire et leur Directeur général Abdel Nouho ne regardent plus dans la même direction. Depuis que des engagements pris devant des centrales syndicales et des négociateurs n’ont pas connu un début de réalisation, un climat de tension et une crise de confiance plombent les relations entre la direction et les employés. C’est dans ce contexte de morosité que le Dg a tenu à organiser les festivités du 60e anniversaire de l’ancêtre d’Abidjan Matin, le premier nom porté par le journal à ses origines.

Ce 8 novembre 2024 là, aurait pu être un moment de liesse partagée pour les employés de Fraternité Matin, avec le coup d’envoi d’un tournoi de football célébrant les 60 ans d’existence de l’entreprise. A la place de l’esprit d’équipe et de fête qu’espérait la direction, l’ambiance a pris un tout autre tournant : les travailleurs de la « Maison verte » ont choisi de boycotter cet événement, en guise de protestation contre une direction qu’ils accusent de ne pas tenir ses engagements envers eux.

Annoncé par une affiche dans les locaux de l’entreprise, le tournoi devait commencer par un match d’ouverture symbolique opposant Fraternité Matin à la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI), sur le terrain situé en face de l’entreprise. A l’arrivée, ce sont des tribunes désertées qui ont accueilli les rares spectateurs et autres curieux. En effet, l’écrasante majorité des 200 employés de Fraternité Matin a choisi de ne pas se présenter. Leur préoccupation ne se trouvait pas en ce lieu.

Poussée donc par le besoin de sauver les apparences, la direction a demandé à des contractuels de l’entreprise de revêtir le maillot de Fraternité Matin pour pallier l’absence des travailleurs réguliers. Ce stratagème, loin de rassurer les employés, n’a fait qu’accroître leur sentiment d’injustice et de frustration. Il y a deux ans, ces mêmes travailleurs participaient avec enthousiasme aux festivités de l’entreprise. Aujourd’hui, ils se sentent trahis par une direction qui semble sourde à leurs demandes, et qui préfère, selon eux, investir dans une façade de normalité plutôt que dans les hommes et les femmes qui font vivre le journal.

Derrière ce boycott, des revendications qui datent de longtemps. Depuis près d’un an, les employés, soutenus par le Syndicat des travailleurs unis de Fraternité Matin (Syntu Frat Mat), ont tenté de sensibiliser la direction générale aux conditions de travail précaires auxquelles ils sont confrontés. Parmi les doléances non satisfaites : la non-signature d’une convention unique, le paiement tardif des salaires – qui, à l’ouverture du tournoi, n’avaient même pas été versés à la majorité des employés – ainsi que le non-paiement des droits légaux pour les travailleurs ayant quitté l’entreprise pour des raisons diverses, qu’il s’agisse de décès, de retraite, de démission ou de départ négocié. Les employés dénoncent également l’absence d’assistance funéraire, pourtant indispensable dans des moments de deuil. « On préfère organiser un tournoi pour faire croire que tout va bien plutôt que de résoudre les vrais problèmes », déclare un membre du syndicat, déplorant cette mascarade sportive destinée, selon lui, à masquer les dysfonctionnements profonds de l’entreprise.

Cette action de boycott envoie un message fort, un appel désespéré à la reconnaissance et au respect des droits fondamentaux des travailleurs. Pour les salariés de Fraternité Matin, il ne suffit plus de fêter les 60 ans d’existence de leur entreprise ; ils demandent à pouvoir vivre dignement de leur travail, dans des conditions à la hauteur de l’histoire et de la mission de leur journal.

Avec VB, correspondance particulière

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