La rédaction de Mondafrique –
Le Forum on China-Africa Cooperation, le FOCAC 2024 qui s’est tenu à Pékin entre le 04 et 06 septembre 2024 inaugure un nouveau départ dans la relation sino-africaine. Au-delà des relations existantes et étroites entre l’Afrique et la Chine, notamment dans les domaines économiques, cette rencontre entre les 53 pays africains et la Chine prend une tout autre dimension symbolique et politique. La Chine propose à l’Afrique de construire une communauté de destin.
Lyazid BENHAMI, membre fondateur du Groupe de Réflexion sur l’Algérie (le GRAL), Vice-président de l’Association des Amitiés Franco-Chinoises de Paris
Pendant le discours d’ouverture du sommet à Pékin, le président Xi Jinping dira : « À nous de rassembler la force des plus de 2,8 milliards de Chinois et d’Africains, de poursuivre main dans la main notre marche vers la modernité et de contribuer, par la modernisation de la Chine et de l’Afrique, à la modernisation du Sud global ».
En effet, les propositions chinoises concernent tous les domaines et sont sur la table. Les échanges culturels et humains seront renforcés par la création de nouvelles institutions culturelles : « La Chine travaillera avec l’Afrique à faire avancer de façon approfondie au travers d’un plan de coopération Chine-Afrique sur la formation professionnelle, à créer un institut d’ingénierie et à mettre en place dix Ateliers Luban ». Un soutien tangible à l’organisation sur le continent des Jeux Olympiques de la Jeunesse d’Été en 2026 et de la Coupe d’Afrique des Nations en 2027 est aussi envisagé.
La coopération dans la santé sera traduite sur le terrain par la formation du corps médical, et la promotion de nouvelles structures hospitalières connectées et innovantes qui permettront de lutter efficacement contre le paludisme et de prévenir les épidémies. L’investissement chinois en Afrique dans le secteur de la pharmaceutique permettra au continent de réduire sa dépendance vis-à-vis du reste du monde.
Coopération économique et sécuritaire
La Chine est prête à élargir unilatéralement l’ouverture de son marché et a décidé d’accorder un traitement de zéro droit de douane pour 100% des produits aux pays les moins avancés ayant établi des relations diplomatiques avec elle, y compris 33 pays africains. Elle devient ainsi le premier grand pays en développement et une des principales économies mondiales à mettre en œuvre cette mesure, faisant de son grand marché une grande opportunité pour l’Afrique.
Voici une initiative chinoise innovante. Elle va conforter les échanges et permettre aux pays émergents de devenir compétitifs, et de se développer. Les pays d’Afrique vont ainsi s’initier au commerce international, s’insérer et s’intégrer dans un ensemble économique dynamique et durable.
– Aider et soutenir le développement économique en Afrique est une priorité absolue, dans laquelle la Chine s’engage de manière concrète en proposant des projets structurants d’avenir.
La Chine souhaite mettre en œuvre 30 projets d’infrastructure en Afrique, en créant un réseau interconnecté sino-africain par voie terrestre et maritime. La Chine fournira également une aide alimentaire d’urgence de 1 milliard de yuans, et mettra en place une zone de démonstration agricole standardisée. Elle s’engage à envoyer 500 experts agricoles, et établir une alliance sino-africaine pour l’innovation scientifique et technologique. 500 projets publics seront également mis en œuvre.
Dans le cadre de l’Agenda 2063 de l’Union africaine et de la Vision 2035 pour la coopération sino-africaine, la clé de la réussite de cette relation sino-africaine réside dans le dialogue et le respect des engagements mutuels.
La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) revêt une grande importance, et la mise en œuvre complète de l’accord de libre-échange continental africain augmentera la valeur ajoutée, créera des emplois, et favorisera le développement économique de l’Afrique. La Chine soutient l’intégration commerciale de l’Afrique et continuera d’appuyer la construction complète de la ZLECA ainsi que l’utilisation généralisée du système panafricain de paiement et de règlement.
Une monnaie commune envisagée
Faciliter la libre circulation des biens et des services dans la Zone de libre-échange continentale africaine, et promouvoir son extension, permettra l’émergence d’un grand marché continental structuré. Il permettra à terme l’intrusion d’une monnaie d’échange stable et peut-être à terme commune ?
Pour saisir les opportunités de la nouvelle révolution technologique et de la transformation industrielle, la Chine se dit prête à s’associer à l’Afrique pour accélérer le développement des capacités de production et renforcer l’innovation scientifique et technologique tout en favorisant l’intégration profonde de l’économie numérique et de l’économie réelle. La Chine permettra à l’Afrique de se développer rapidement et de bénéficier des nouvelles innovations. Le transfert de technologie apportera à l’Afrique un saut en qualité et en compétitivité.
Sur le plan du partenariat pour la sécuritaire commune, la Chine tend à favoriser une action globale : « Elle fournira à la partie africaine des aides militaires sans contrepartie d’un milliard de yuans RMB, formera pour l’Afrique 6 000 professionnels militaires et 1 000 agents de police et d’application de la loi et invitera 500 jeunes officiers africains à venir en visite en Chine. Elle travaillera avec l’Afrique à mener des exercices, entraînements et patrouilles conjoints entre les armées chinoise et africaines et à mettre en œuvre l’action de déminage pour l’Afrique en vue de préserver ensemble la sécurité des projets et des personnels ».
Afin de soutenir et de mettre en œuvre tous ces projets d’avenir, la Chine envisage d’accorder à l’Afrique « un soutien financier de 360 milliards de yuans RMB dans les trois ans à venir, y compris 210 milliards de yuans RMB de ligne de crédit, 80 milliards de yuans RMB d’aides sous différentes formes et au moins 70 milliards de yuans RMB d’investissements d’entreprises chinoises en Afrique. La Chine encouragera et soutiendra également l’émission par la partie africaine d’obligations Panda sur le marché chinois ».
Le multilatéralisme en commun
Sur le plan international la plupart des pays africains et la Chine font du multilatéralisme la colonne vertébrale de leur politique extérieure. Le sommet du FOCAC 2024 qui vient de se clôturer confirme cette voie. Plus encore qu’hier le Sud global se densifie et exige des améliorations et des changements profonds dans la gouvernance mondiale.
La Chine soutient les pays africains dans leur quête d’un plus grand rôle dans cette gouvernance mondiale, notamment pour résoudre les problèmes mondiaux dans des cadres inclusifs. La Chine estime que les Africains ont tous les mérites pour occuper des postes de direction dans les organisations internationales, et soutient leur candidature. La réforme des institutions financières multilatérales est un sujet récurrent que la Chine et l’Afrique tendent de porter conjointement, notamment la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International, en appelant à une révision des droits de vote et des parts au sein de ces institutions, afin d’accroître la représentation des pays en développement et d’améliorer l’équité du système financier international.
En réitérant les principes d’une justice internationale, du droit au développement et à la paix en faveur des pays émergents, en soutenant et en portant la voix des pays africains au sein des instances internationales, la Chine qui appartenait hier au groupe des Pays Non Alignés, affirme aujourd’hui fermement son positionnement dans le Sud global au côté de l’Afrique.
Le FOCAC 2024 qui s’est tenu cette année à Pékin, inaugure-t-il l’avènement d’un vrai plan Marshall, à l’image de celui mis en place par les Etats-Unis pour aider l’Europe à se reconstruire au sortir de la Seconde guerre mondiale ; un plan pour développer et soutenir l’Afrique à accéder réellement au processus de développement économique et durable, ou bien au prélude d’un nouvel ordre mondial économique et politique qui se construit dans un contexte international traversé par des incertitudes pouvant à terme compromettre la paix et la remise en question du progrès et du développement pour tous ?
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