Le concept de Développement Humain est apparu dans les années 1990, parallèlement à celui de Développement Économique. Ces deux concepts sont intimement liés. Le premier considère que le bien-être des Hommes ne se résume pas seulement à l’économie et à leurs revenus. Chaque année, le Rapport mondial sur le Développement Humain du Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD), donne justement des indications scientifiques sur l’évolution de l’Indice de chaque pays. Le concept de Développement Humain qui pour d’autres, cherche à inclure le bien-être social, et pour certains le bonheur dans l’appréciation du Développement économique, s’appuie sur la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. En effet, dans le premier article de la Déclaration sur le droit au Développement de l’Assemblée Générale du 4 décembre 1986 , l’ONU déclare ce qui suit : « Le droit au Développement est un droit inaliénable de l’Homme en vertu duquel, toute personne humaine et tous les peuples ont le droit de participer et de contribuer à un Développement économique, social, culturel et politique dans lequel tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales puissent être pleinement réalisés et de bénéficier de ce Développement ».
Il faut ajouter à cette définition celle du PNUD. Pour cette Organisation mondiale « Le principal objectif du Développement Humain, est d’élargir la gamme des choix offerts à la population, qui permettent de rendre le Développement plus démocratique et plus participatif ». Ces choix doivent comprendre des possibilités d’accéder aux revenus et à l’emploi, à l’éducation et aux soins de santé et à un environnement propre et sécurisé. Les populations doivent également avoir la possibilité de participer pleinement aux prises de décisions concernant le Développement de leurs pays et de jouir des libertés humaines, économiques et politiques.
La théorie du Développement Humain a pour fondement les recherches de l’économiste américain Amartya Kumar Sen.
Dans la littérature sur le Développement Humain, le principal théoricien reste indubitablement Amartya Kumar Sen. C’est un économiste et philosophe américain, d’origine indienne, spécialiste des problématiques de la pauvreté et du Développement. Ce chercheur renommé qui enseigne actuellement à Harvard aux Etats-Unis d’Amérique, a reçu le prix Nobel d’Économie en 1998 pour « sa contrbution à l’économie du bien-être ».
Il faut noter que dès la fin des années 1960, les principales publications d’Amartya Kumar Sen ont porté sur la théorie du choix social, prolongeant ainsi les travaux de Kenneth Arrow qui a montré que les procédures de choix collectifs (comme dans le vote ou sur le marché) ne peuvent satisfaire les critères de démocratie (théorème d’impossibilité d’Arrow). Autrement dit, l’intérêt général ne peut être défini à partir de la simple agrégation des préférences des individus : la décision au niveau collectif doit être imposée. Pour atteindre aujourd’hui leur niveau de Développement, la Russie, la Chine et bien d’autres pays, ont imposé leurs choix avec un « Dirigisme d’État », quelques fois au détriment des Droits humains. Pour exemple, en Chine, depuis l’accession au pouvoir de Xi Jinping en mars 2013, il apparaît clairement que la convergence avec les modèles de Développement occidentaux, a cessé et qu’à la place, a émergé depuis, un mode particulier de Capitalisme d’État, dirigé par le puissant Parti Communiste Chinois (PCC).
Rappelons que le théorème d’impossibilité d’Arrow qui pourrait expliquer théoriquement ce choix, également appelé « paradoxe d’Arrow » (du nom de l’économiste américain Kenneth Arrow), est une confirmation mathématique, dans certaines conditions précises, du paradoxe soulevé et décrit dès 1785 par Nicolas de Condorcet . Supposons que chaque électeur ne puisse exprimer ses opinions que de manière qualitative, en indiquant comment il classe les unes par rapport aux autres les options envisagées. Entre deux options de programmes de Développement, l’électeur indique celle qu’il préfère ou s’il est indifférent aux deux, par contre il ne peut pas exprimer l’intensité de sa préférence.
Dans ce cadre, pour Condorcet, il n’existe pas de processus de choix social indiscutable, qui permette d’exprimer une hiérarchie des préférences cohérente pour une collectivité à partir de l’agrégation des préférences individuelles exprimées par chacun des membres de cette même collectivité. En d’autres termes, pour lui, il n’existe pas de système simple assurant cette cohérence. Arrow tente de démontrer, sous réserve d’acceptation de ses hypothèses, qu’il n’existe pas du tout de système assurant la cohérence, hormis celui où le processus de choix social, coïncide avec celui d’un seul individu, parfois surnommé « Dictateur », indépendamment du reste de la population .
L’économiste et philosophe américain, Amartya Kumar Sen, part du théorème d’Arrow qui énonce que, sous certaines hypothèses, il est impossible de trouver une procédure de choix collective et rationnelle qui agrège les préférences individuelles . Parmi ces hypothèses, trois sont particulièrement importantes : L’ordinalité (on ne fait que classer des préférences sans mesurer leur intensité) ; l’universalité des préférences (toutes les préférences sont possibles) ; le refus des comparaisons interpersonnelles d’utilité (on ne peut donc pas compenser une baisse d’utilité d’un individu par la hausse d’utilité d’un autre).
Le Développement Humain, va au-delà des seuls aspects économiques et monétaires.
Amartya Kumar Sen s’est efforcé de montrer que le problème posé par le théorème d’impossibilité réside dans le cadre d’analyse utilisé par Arrow. Ce cadre est extrêmement étroit : La seule information mobilisée pour prendre une décision au niveau collectif, est le classement individuel des différentes options proposées. Selon Samuel Ferey et Françoise Pichon-Mamère, le prix Nobel 1998 promeut donc « une théorie du choix social » qui prenne en considération des éléments autres que la seule utilité des individus et permette la prise en compte des enjeux de justice sociale et de redistribution des revenus. Pour lui, les inégalités entre les individus ne s’apprécient pas au regard de leurs seules dotations en ressources de toutes sortes, mais de leurs capacités à les convertir en libertés réelles.
Il introduit ainsi la notion de « capabilités » qui invite à considérer la pauvreté et le Développement Humain, au-delà des seuls aspects économiques et monétaires et à les penser en termes de libertés d’action, de justice, de capacités à faire et de bien-être. A Abidjan pour exemple, des Ivoiriens disent : « Qu’on ne mange pas pont ». Cette belle métaphore est l’illustration complète de la théorie du Développement Humain. Le Développement ne se résume pas seulement aux ressources et à la réalisation de routes et de ponts. Il va bien au-delà du visuel infrastructurel et des slogans politiques égoïste, hypocrites et agressifs qui ont pour seuls objectifs visibles, le maintien à tout prix au pouvoir de leurs auteurs, loin de la justice sociale et de la bonne gouvernance.
Dans son ouvrage « Un nouveau modèle économique. Développement, Justice, Liberté », Amartya Kumar Sen soutient la thèse selon laquelle, il n’y a de Développement que par et pour la liberté des êtres humains. Pour lui, la tyrannie, l’absence d’opportunités économiques, l’inexistence ou la faiblisse des services publics notamment des hôpitaux, le communautarisme voire le tribalisme, l’intolérance et l’injustice, sont autant d’entraves à la liberté individuelle. Sa théorie a toutefois fait l’objet de critiques, notamment car elle ne propose aucune liste des « capabilités » de base. L’influence des études du prix Nobel d’économie 1998, s’est traduite par la création de l’Indice de Développement Humain (IDH) par le PNUD en 1990. Cet Indice permet d’effectuer des comparaisons internationales en termes de Développement. L’IDH correspond donc à un Indice calculé chaque année par le PNUD afin d’évaluer le niveau de Développement des pays en se fondant, non pas sur des données strictement économiques et monétaires, mais sur la qualité de vie et la liberté de leurs populations. L’IDH combine trois donc facteurs ou « capabilités » considérées comme essentielles :
• L’espérance de vie à la naissance, car elle explique les conditions de vie à venir de ces populations (alimentation, logement, eau potable) et de leur accès à la médecine ;
• Le niveau d’éducation qui détermine l’autonomie tant professionnelle que sociale de l’individu. Ce niveau d’éducation est mesurée par le nombre moyen d’années de scolarité des personnes âgées de 25 ans et plus et le pourcentage des personnes âgées de 15 à 34 ans qui ont fait des études ;
• Le revenu national brut par habitant, révélateur du niveau de vie des individus et ainsi de leur accès à la culture, à Internet, aux biens et services et enfin aux transports.
L’IDH se présente sous la forme d’un nombre situé entre zéro et un (0 et 1), ce dernier chiffre symbolisant le niveau le plus élevé. Pour rappel, cet indicateur créé en 1990 est désormais préféré au revenu par habitant qui apparaît aujourd’hui comme trop réducteur pour évaluer le niveau de Développement d’un pays. L’importance accordée à l’IDH repose sur l’idée que la liberté des hommes et des femmes d’un pays, dépend du Développement Humain. Quatre autres indices ont été créés pour affiner la perception du niveau de Développement d’un pays :
• L’indice de Développement du Genre (IDG), qui permet de comparer l’IDH des femmes et des hommes ;
• L’Indice d’Inégalité du Genre (IIG), qui se concentre sur l’autonomisation des femmes ;
• L’IDH ajusté aux Inégalités (IDHI) dont le calcul tient compte de l’étendue des inégalités ;
• L’Indice de Pauvreté Multidimensionnelle (IPM), qui permet de mesurer différents aspects de la pauvreté à l’exclusion du revenu.
Rang (Afrique) Pays Rang (Mondial) Catégorie (IDH)
1 Maurice 63 Très élevé (0,802)
2 Seychelles 72 Elevé
3 Algérie 91 Elevé
4 Egypte 97 Elevé (0,731)
4 Tunisie 97 Elevé (0,731)
6 Libye 104 Elevé (0,718)
7 Afrique du Sud 109 Elevé
8 Gabon 112 Elevé (0,693)
9 Botswana 117 Moyen
10 Maroc 123 Moyen
11 Cap-Vert 128 Moyen
12 Ghana 133 Moyen
13 Sao Tomé-et-Principe 138 Moyen
14 Namibie 139 Moyen
14 eSwatini 144 Moyen
16 Guinée Equatoriale 145 Moyen
17 Zimbabwe 146 Moyen
18 Angola 148 Moyen
19 Cameroun 151 Moyen
20 Kenya 152 Moyen
21 Congo 153 Moyen
21 Zambie 154 Moyen
23 Comores 156 Moyen (0,586)
24 Mauritanie 158 Faible (0,540)
25 Côte d’Ivoire 159 Faible (0,534)
26 Tanzanie 160 Faible (0,532)
26 Togo 162 Faible
28 Nigeria 163 Faible
29 Rwanda 165 Faible
30 Bénin 166 Faible
30 Ouganda 166 Faible
32 Lesotho 168 Faible
33 Malawi 169 Faible
34 Sénégal 170 Faible
35 Djibouti 171 Faible
36 Soudan 172 Faible
37 Madagascar 173 Faible
38 Gambie 174 Faible
39 Ethiopie 175 Faible
39 Erythrée 176 Faible
41 Guinée Bissau 177 Faible
42 Liberia 178 Faible
43 RDC 179 Faible
44 Sierra Léone 181 Faible
45 Guinée 182 Faible
46 Burkina Faso 184 Faible
46 Mozambique 185 Faible
48 Mali 186 Faible
49 Burundi 187 Faible
50 Centrafrique 188 Faible
51 Niger 189 Faible
52 Tchad 190 Faible
53 Soudan du Sud 191 Faible (0,383)
Classement 2022 des pays africains : L’Indice de Développement Humain (IDH) compris entre 0 et 1. Source : PNUD (Rapport 2023).
L’IDH est calculé par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Il se présente comme un nombre sans unité compris entre 0 et 1 (cf. Tableau Classement 2022 des pays africains selon l’IDH). Plus l’IDH se rapproche de 1, plus le niveau de Développement du pays évalué est élevé. Le calcul de l’ l’IDH permet l’établissement d’un classement annuel des pays du monde entier. Les pays sont classés en quatre groupes selon leur IDH : « très élevé », « élevé », « moyen » et « faible ». Généralement, on considère un pays dont l’IDH (entre 0,70 et 0,80) est élevé ou très élevé comme Développé, un pays dont l’IDH est moyen (entre 0,55 et 0,70), en Développement et un pays avec un IDH faible (en dessous de 0,55), en voie de Développement.
La plupart des données utilisées pour calculer l’IDH proviennent d’agences des Nations Unies, comme le Département des Affaires Sociales et Économiques (DEAS) ou d’Organisations internationales telles que l’UNESCO, la Banque mondiale, le FMI et l’OCDE. Ces données permettent donc de comparer les IDH de 193 pays au monde depuis 1990.
Comme on le voit sur le tableau plus haut, l’Île Maurice domine ce classement avec un IDH de 0,802. L’Égypte et la Tunisie sont à la 4ème place, avec un IDH de 0,731. La Libye (0,718), l’Afrique du Sud (0,713), le Gabon (0,706), le Botswana (0,693), le Maroc (0,683), et Le Cap Vert (0,662) arrivent ensuite dans ce classement. Il faut noter que selon les Nations Unies, les IDH compris entre 0,55 et 0,70, indiquent un Développement Humain moyen, tandis que ceux compris entre 0,70 et 0,80 correspondent à Développement élevé.
La Côte d’Ivoire, notre riche et beau se trouve encore malheureusement dans la tranche des pays au Développement Faible avec un IDH de 0,534 malgré son taux de croissance économique de 6,4 % (Banque Mondiale 2023). Selon l’ONU, la Suisse, avec un IDH de 0,962, est le pays le plus développé du monde. Elle devance la Norvège (0,961) et l’Islande (0,959). Le rapport 2024 du PNUD, place la France à la 28ème position au monde en terme d’IDH avec un score de 0,910. Les Etats Unis occupent la 21ème place avec un IDH de 0,921.
En conclusion, l’indice de Développement Humain (IDH) est utilisé comme un instrument de mesure scientifique essentiel pour évaluer les progrès des pays en matière de Développement. Il s’appuie sur des indicateurs clés, notamment l’espérance de vie, le taux d’alphabétisation, l’accessibilité à Internet et l’égalité des revenus. D’autres critères font également partie de cette classification, notamment, l’efficacité et la stabilité politique, la bonne gouvernance, la disponibilité d’emplois rémunérateurs, l’accès aux soins de santé et à des services sociaux de premier plan, les libertés individuelles et un système éducatif performant. L’IDH est devenu aujourd’hui un instrument incontournable et complet pour situer le niveau de Développement d’un pays.
Ben ZAHOUI-DÉBOU
Docteur en Commerce International.
Université EENI Global Business School – Tarragona, Espagne.
(Investissements Directs Étrangers – IDE – et Développement).
En pratique, quand le PNUD calcule il utilise le revenu national brut par habitant à parité du pouvoir d’achat. Ce n’est donc pas (exactement) le PIB comme indiqué sur la photo plus haut.
In fine, nous sommes donc 25ème en Afrique après une guerre civile et 10 ans de pillages systématiques orchestrés par un certain minablissime Koudou avec sa bande de voleurs. Une bande de pilleurs qui n’ont investi ni dans l’éducation, ni dans les infrastructures et encore moins dans les hôpitaux et centres de santé. Ce sont en effet tous ces éléments qui constituent la base d’amélioration de l’IDH dans tout pays. C’est en outre la réalité que l’ancien patron de Crédit Suisse pratiquement viré pour mauvaise éthique a malhonnêtement occulté quand il a abordé l’IDH à dessein ou par ignorance car ayant vécu très loin de notre pays pendant près d’un quart de siècle. Notre pays avance. Et c’est ce que bien d’observateurs en Côte d’Ivoire, en Afrique et dans le monde constatent. Ce sont des faits.
Juste un observateur de passage… 😉