Uranium: La France nucléaire dit adieu au Niger avec le retrait de la mine Imouraren à Orano

Uranium: «L’espoir de la mine Imouraren s’envole et avec c’est l’adieu au Niger qui se dessine pour la France nucléaire»

Chronique de Philippe Escande

L’entreprise Orano doit accuser la perte du permis d’exploitation d’une grande mine d’uranium au Niger. Cette affaire rebat les cartes pour la souveraineté nucléaire française et met en évidence les conséquences des soubresauts de la géopolitique mondiale dans ce commerce, analyse Philippe Escande, éditorialiste économique au « Monde ».

Areva’s Somair uranium mining facility is seen in Arlit, Niger, September 25, 2013. REUTERS/Joe Penney/File Photo – S1BEUEUGPUAB

Attention, matière radioactive. Le Niger vient d’annoncer qu’il retirait son permis d’exploitation à l’entreprise française Orano, pour extraire de l’uranium de la mine d’Imouraren dans le nord du pays. Elle est considérée comme l’un des plus importants gisements du monde, avec 200 000 tonnes de réserves.

A première vue, ce n’est ni une grande surprise ni un grand drame pour l’ex-Areva et pour les centrales nucléaires françaises. La mine, qui devait ouvrir en 2015, ne l’est toujours pas aujourd’hui. Orano avait entrepris début juin des travaux exploratoires afin de commencer des essais et de prendre la décision d’exploiter le gisement en 2028.

Fâchée contre la France et soucieuse d’accélérer ce calendrier lointain, la junte militaire au pouvoir avait adressé le mardi 11 juin un ultimatum pour commencer les travaux. Ils ont jugé que les efforts étaient insuffisants et mis leur menace à exécution. Officiellement, Orano et le gouvernement français relativisent donc ce nouveau camouflet de la part de son ancien protégé. Ils rappellent que « la sécurité d’approvisionnement n’est pas menacée » et que ce gisement « n’est absolument pas critique ».

Le Kazakhstan, leader incontesté

Il ne reste donc plus à Orano que l’exploitation du site d’Arlit, en fin de vie alors que l’autre mine, celle de la Cominak, a été fermée en 2021. L’espoir d’Imouraren, soufflée aux Chinois en 2009, s’envole donc, et avec c’est l’adieu au Niger qui se dessine pour la France nucléaire. Anticipant ces difficultés, qui se sont couplées avec des prix du minerai en chute libre dans les années 2015-2016, la France a réorienté sa politique d’approvisionnement. Mais les sources sont limitées.

Quatre pays font l’essentiel de l’approvisionnement de l’Europe en uranium. Le Niger, qui fut longtemps le premier, le Kazakhstan, le Canada et la Russie. Le leader incontesté est désormais le Kazakhstan, qui représenterait plus de 45 % de la production mondiale. D’où l’intérêt des autorités françaises pour cet…

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Le Niger retire à l’entreprise française Orano le permis d’exploitation d’une grande mine d’uranium

La mine d’Imouraren, au Niger, est l’un des plus grands gisements d’uranium au monde, avec des réserves estimées à 200 000 tonnes.

Le Monde avec AFP Publié hier à 20h01

Des travaux avaient été récemment lancés sur ce site minier d’Imouraren. Mais le Niger a décidé, jeudi 20 juin, de retirer le permis d’exploitation de la mine d’uranium au nord du pays à l’entreprise française Orano, a annoncé la société dans un communiqué transmis à l’Agence France-Presse (AFP).

« Orano prend acte de la décision des autorités du Niger de retirer à sa filiale Imouraren SA son permis d’exploiter le gisement, et ce malgré la reprise des activités sur site conformément aux attentes qu’elles avaient exprimées », a écrit l’entreprise française. Dans une note, datée du 11 juin, le ministère des mines du régime militaire au pouvoir au Niger rappelait que le permis d’exploitation d’Imouraren serait retiré à Orano. Il avait annoncé vouloir le remettre « au domaine public » si des « travaux d’exploitation » n’avaient pas commencé dans un « délai de trois mois » après le 19 mars.

Pourtant, le 12 juin, un porte-parole du groupe nucléaire français avait annoncé à l’AFP que des « travaux préparatoires » avaient été lancés « récemment ». Dans son communiqué de jeudi 20 juin, l’entreprise a assuré que « les infrastructures » d’Imouraren étaient « rouvertes depuis le 4 juin 2024 pour accueillir les équipes de construction et faire avancer les travaux ». L’entreprise française a aussi précisé que « plusieurs dizaines de personnes étaient mobilisées durant la phase de relance du projet. A terme, Imouraren SA devait employer 800 personnes, sous-traitants compris ».

Deuxième pays fournisseur d’uranium pour les centrales européennes

Orano exploite une autre mine d’uranium au Niger, la Somaïr, dans la région d’Arlit, dans le nord du pays, après la fermeture de la Cominak en 2021. Mais le régime militaire au pouvoir à Niamey, depuis juillet 2023, a plusieurs fois répété qu’il souhaitait revoir en profondeur le système d’exploitation des matières premières sur son sol par des compagnies étrangères.

Malgré cette décision du gouvernement nigérien, Orano a assuré être « disposé à maintenir ouverts tous les canaux de communication avec les autorités du Niger sur ce sujet, tout en se réservant le droit de contester la décision de retrait du permis d’exploitation devant les instances judiciaires compétentes, nationales ou internationales ».

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La mine d’Imouraren est l’un des plus grands gisements d’uranium au monde, avec des réserves estimées à 200 000 tonnes. D’ailleurs le Niger fournit 4,7 % de la production mondiale d’uranium naturel mais reste loin derrière le Kazakhstan (45,2 %), selon des chiffres de l’agence d’approvisionnement d’Euratom (ESA) de 2021. Environ un quart de l’approvisionnement en uranium naturel des centrales nucléaires européennes en 2022 provenait du Niger, le 2e pays derrière le Kazakhstan et devant le Canada.

Le Monde avec AFP

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