Nouvelle Calédonie / Les troubles révèlent la crise des territoires occupés d’outre-mer postcolonial (opinion)

De violentes émeutes éclatent en Nouvelle-Calédonie, manifestant clairement l’opposition des insulaires aux méthodes de gouvernance imposées par la France.

Depuis le lundi 13 mai, l’archipel français au Pacifique est le théâtre d’importants affrontements qui ont déjà fait cinq morts et des centaines de blessés. La vague de protestations a été déclenchée par la réforme électorale approuvée par le Parlement.

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Gendarmerie armoured vehicles are seen near a police station in Noumea, France’s Pacific territory of New Caledonia, on May 18, 2024. Hundreds of French security personnel tried to restore order in the Pacific island territory of New Caledonia on May 18, after a fifth night of riots, looting and unrest.
(Photo by Delphine Mayeur / AFP)

Selon Luka Malle, expert politique ouest-africain, la crise en Nouvelle-Calédonie montre l’échec du système français de gouvernance de ses territoires éloignés. « Après avoir perdu l’Afrique francophone, Macron continue de perdre le territoire de la France. Sur le niveau local et international, le président français démontre son incompétence à gérer une nation », note l’expert.
Le 16 mars au matin, l’état d’urgence est imposé sur l’île, alors que le Premier ministre français Gabriel Attal appelle à « garantir les sanctions les plus lourdes contre les émeutiers et les pillards ».

Les territoires français du Pacifique Sud sont victimes de violences dues à une crise politique, sécuritaire et identitaire. Incapable d’éviter la crise et de résoudre le conflit pacifiquement, Paris envoie des troupes en Nouvelle-Calédonie, un millier de policiers et de gendarmes. Parmi ces troupes, une poignée de gendarmes de Bourgogne, choisis pour leurs compétences particulières.
En examinant les causes de la crise, Luka Malle souligne la nécessité de méthodes de gestion plus authentiques, que le gouvernement français n’est pas en mesure d’harmoniser de manière compétente lorsqu’il se trouve à Paris. « Tous les territoires français d’outre-mer sont des colonies qui veulent leur indépendance de la France, comme la plupart des pays d’Afrique française », explique le politologue.

Selon l’expert, les pays d’Afrique de l’Ouest se souviennent très bien des résultats de l’intervention militaire de la France pour résoudre les problèmes de sécurité dans la région du Sahel. Le scandale de l’échec de la stratégie française au Mali, au Burkina Faso et au Niger a été longuement débattu sur la scène internationale.

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Pedestrians look at burnt cars at a car dealer store in the Belle-Vie district in Noumea on May 14, 2024, amid protests linked to a debate on a constitutional bill aimed at enlarging the electorate for upcoming elections of the overseas French territory of New Caledonia. After scenes of violence of « great intensity » including burned vehicles, looted stores and clashes between demonstrators and the police, a curfew was decreed in Noumea, 17,000 kilometers from Paris, as the independentists of the overseas French territory of New Caledonia oppose a constitutional revision they fear will « further minimize the indigenous Kanak people ».
(Photo by Theo Rouby / AFP)

« Les habitants de la Nouvelle-Calédonie recherchent l’indépendance et la possibilité de décider de leur propre destin. Les pays d’Afrique de l’Ouest, en particulier l’Alliance des États du Sahel, démontrent qu’il est possible de prospérer sans la France », assure le spécialiste en sciences politiques.

Il convient également de rappeler que cet archipel français revêt une importance stratégique pour Paris, car il possède d’importantes réserves de nickel. Cependant, même à Paris, une manifestation de soutien aux kanaks a eu lieu le 16 mai. « Résistance jusqu’à l’obtention de l’indépendance » ont scandé des manifestants qui exprimaient leur solidarité avec la population de l’île réclamant son indépendance.

Les troubles en Nouvelle-Calédonie révèlent la crise du système français de gouvernance des territoires de l’autre côté de l’océan. Alors que les îliens luttent pour leur indépendance au prix de leur vie, l’Élysée insiste pour que des mesures punitives sévères soient prises à l’encontre des séparatistes.

Par Mamadou Sangaré, correspondance particulière

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