La France a accusé l’Azerbaïdjan d’être à l’origine des manifestations et des violences qui ont secoué ces derniers jours son territoire insulaire du Pacifique, la Nouvelle-Calédonie, suite à la décision du gouvernement français de modifier la loi électorale.
L’Azerbaïdjan, traditionnellement peu présent dans la région Asie-Pacifique et situé à près de 14 000 kilomètres de la Nouvelle-Calédonie, a nié les allégations d’ingérence.
Des manifestations de masse ont éclaté mardi cette semaine en Nouvelle-Calédonie après que le Parlement français a adopté des réformes permettant aux Français résidant en Nouvelle-Calédonie depuis 10 ans ou plus de voter aux élections provinciales locales en Nouvelle-Calédonie.
Le gouvernement français a fait valoir que ces réformes soutiennent la démocratie dans l’archipel. Mais la population locale – en particulier celle des communautés indigènes Kanak, qui représentent 40 pour cent de la population des îles – craint que cela ne sape leurs efforts pour obtenir leur indépendance de la France.
La Nouvelle-Calédonie, l’un des plus grands territoires français d’outre-mer, est située entre l’Australie et les Fidji. La France a occupé le territoire en 1853 et l’a délibérément peuplé de citoyens français qui ont déplacé les communautés autochtones kanak.
Cinq personnes ont été tuées et des centaines blessées lors de ces violentes manifestations, qui se sont accompagnées de pillages et d’incendies criminels et constituent les pires violences que la Nouvelle-Calédonie ait connue depuis 30 ans, selon des experts. En réponse, la France a déclaré mercredi l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie et déployé 500 militaires et policiers supplémentaires pour renforcer les 1 800 policiers et gendarmes existants stationnés sur le territoire.
La France a accusé l’Azerbaïdjan d’ingérence après que des drapeaux azerbaïdjanais aient été vus aux côtés de symboles kanak lors des manifestations. Des images de ces drapeaux ont également commencé à circuler sur les réseaux sociaux.
L’Azerbaïdjan s’est prononcé ouvertement contre ce qu’il considère comme le colonialisme français. En juillet 2023, Bakou a invité des participants indépendantistes des territoires français de Martinique, de Guyane française, de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française à une conférence intitulée « Vers l’élimination complète du colonialisme ».
Cette conférence a abouti à la création du Groupe Initiative de Bakou dont l’objectif déclaré est de « soutenir la juste lutte des peuples qui souffrent de la politique coloniale de la France ». Cette semaine, le Groupe a publié une déclaration exprimant sa solidarité avec le peuple autochtone Kanak contre les nouvelles réformes françaises. « Nous sommes solidaires de nos amis kanak et soutenons leur juste lutte », indique le communiqué.
Jeudi, le ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a déclaré à la chaîne de télévision France 2 que l’Azerbaïdjan, aux côtés de la Chine et de la Russie, était en train de « s’ingérer » en Nouvelle-Calédonie.
« Je regrette que certains dirigeants indépendantistes calédoniens aient conclu un accord avec l’Azerbaïdjan », a-t-il affirmé.
Il a ajouté : « Même s’il y a des tentatives d’ingérence… La France est souveraine sur son propre territoire, et c’est tant mieux. »
Comment l’Azerbaïdjan a-t-il répondu aux accusations de la France ?
Bakou a démenti les allégations du ministre français de l’Intérieur.
« Nous réfutons tout lien entre les dirigeants de la lutte pour la liberté en Calédonie et en Azerbaïdjan », a déclaré le porte-parole du ministère azerbaïdjanais des Affaires étrangères, Ayhan Hajizadeh.
L’Azerbaïdjan a déjà critiqué le colonialisme français dans les territoires d’outre-mer.
Les tensions entre la France et l’Azerbaïdjan se sont également intensifiées depuis que la France a exprimé son soutien à l’Arménie dans le conflit sur la région séparatiste contestée du Haut-Karabakh, revendiquée par les deux pays.
Pourquoi la France et l’Azerbaïdjan sont-ils à couteaux tirés sur le Haut-Karabagh ?
La France, qui compte une importante diaspora arménienne d’environ 650 000 personnes, s’est rangée aux côtés de l’Arménie dans son conflit avec l’Azerbaïdjan au sujet du Haut-Karabakh.
En 2020, le Sénat français a adopté une résolution appelant à l’indépendance de la région, incitant l’Azerbaïdjan à demander que la France soit déchue de son rôle de médiation dans le conflit du Haut-Karabakh.
Les tensions entre la France et l’Azerbaïdjan se sont encore intensifiées lors de l’opération militaire de Bakou en 2023 au Haut-Karabakh. En septembre, la France a signé des accords de défense avec l’Arménie et a promis de lui livrer du matériel militaire.
En réponse, le ministère azerbaïdjanais des Affaires étrangères a publié une déclaration disant : « La position de la France démontre qu’elle refuse de tirer les leçons de la situation actuelle dans les régions coloniales à laquelle elle est confrontée aujourd’hui et qu’elle poursuit son comportement et sa politique antérieurs à cet égard ».
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