Sorti largement renforcé par les élections régionales et municipales, le président ivoirien planche actuellement sur un remaniement. Principal enjeu : la reconduction ou non du premier ministre Patrick Achi. Une manœuvre délicate derrière laquelle apparaît en filigrane la présidentielle 2025.
Patrick Achi – en poste depuis 2021 – va-t-il rester premier ministre de Côte d’Ivoire ? L’avenir de ce dernier figure au centre du plan du remaniement sur lequel planche le président Alassane Ouattara. Alors que la majorité présidentielle du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) vient de remporter les élections locales du 2 septembre, le chef de l’Etat devrait prendre son temps avant de dévoiler sa nouvelle équipe gouvernementale. Le mouvement pourrait toutefois intervenir avant la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2023, prévue en Côte d’Ivoire en janvier.
Achi en perte de vitesse
D’ores et déjà, le président a entamé de premières consultations informelles. Bien qu’élu avec succès à la présidence du conseil régional de son fief de La Mé, Patrick Achi a vu son étoile pâlir aux yeux du premier cercle du pouvoir, ces dernières semaines. Il est aussi particulièrement fragilisé par l’inondation de la pelouse du stade d’Ebimpé, le 12 septembre, en plein match. La rencontre (Côte d’Ivoire-Mali) avait dû être interrompue, puis reportée, le terrain ayant été rendu impraticable. A trois mois de la CAN, l’épisode a jeté une lumière crue sur les défaillances d’une installation censée être des plus performantes. Or, Patrick Achi a sous sa tutelle le Comité d’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations (COCAN).
Si, à ce jour, son sort n’est pas encore scellé – Alassane Ouattara n’ayant pas encore tranché – Patrick Achi voit ses chances de reconduction hypothéquées. Un éventuel départ de ce dernier aurait néanmoins des répercussions aux yeux des bailleurs internationaux, dont le chef du gouvernement est devenu un interlocuteur privilégié et apprécié.
Les favoris pour le remplacer
Au sein du premier cercle de la présidence, plusieurs noms sont avancés pour le remplacer. Parmi eux figure celui du directeur de cabinet d’Alassane Ouattara, Fidèle Sarassoro. Natif de Sinématiali (Nord), ce dernier vient d’être élu à la tête de sa région d’origine du Poro. Ce nouveau mandat renforce encore un peu plus son ancrage politique dans le Nord, Sarassoro ayant déjà été désigné député de Sinématiali, en mars 2021.
Fils de l’avocat Hyacinthe Sarassoro, compagnon de route historique d’Alassane Ouattara, Fidèle Sarassoro s’impose depuis le décès de l’ancien premier ministre Amadou Gon Coulibaly, en juillet 2020, comme une figure centrale du troisième mandat d’Alassane Ouattara. S’il n’était pas désigné premier ministre, il pourrait également être chargé d’un portefeuille ministériel régalien.
Autre profil qui figure sur la short list du président, celui de la ministre de la fonction publique, Anne-Désirée Ouloto, appréciée du couple présidentiel. Cette ancienne institutrice a conquis la région du Cavally (extrême ouest du pays) face à des barons du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI) de l’ancien président Laurent Gbagbo (2000-2011).
Au-delà de cette victoire, qui l’a considérablement renforcée, elle a été publiquement félicitée pour son travail par Alassane Ouattara lors de la cérémonie des récompenses des prix d’excellence, qui s’est tenue le 5 septembre, au palais présidentiel. Sa nomination aurait par ailleurs des allures de petite révolution, puisqu’Anne-Désirée Ouloto deviendrait alors la première femme ivoirienne à occuper la primature du pays, indépendant depuis 1960.
Les outsiders en embuscade
S’ils sont loin d’être favoris, les noms des ministres Amédé Koffi Kouakou (équipement), Kobenan Kouassi Adjoumani (agriculture) et Adama Koné (économie) circulent également ces derniers jours. Tous les trois ont passé avec brio l’épreuve des urnes et jouissent de bonnes relations avec le ministre de la défense et frère cadet d’Alassane Ouattara, Téné Birahima Ouattara. Kobenan Kouassi Adjoumani réside dans une résidence appartenant au ministre de la défense, dans le quartier de la Riviera 3, à Abidjan.
Dernier scénario à l’étude, celui de la promotion d’une figure de l’Ouest. Après Guillaume Soro (2010-2011), Amadou Gon Coulibaly (2017-2020) et Hamed Bakayoko (2020-2021) tous les trois originaires du Nord, Jeannot Ahoussou Kouadio (2011-2012, Centre), Daniel Kablan Duncan (2012-2017, Sud) et Patrick Achi (Est), l’Ouest n’a jamais été représenté à la tête du gouvernement depuis l’élection d’Alassane Ouattara. Une éventualité qui profiterait à Albert Toikeusse Mabri, originaire de la région du Tonkpi, même si ce dernier se trouve loin derrière dans la course à la succession d’Achi.
L’ombre de 2025
A deux ans de l’élection présidentielle 2025, la manœuvre n’est pas anodine pour Alassane Ouattara. Le prochain remaniement devrait avoir un impact très concret sur les équilibres internes à la majorité. S’il n’a pas encore arrêté son choix sur un éventuel quatrième mandat, la décision prise par le président sénégalais Macky Sall de ne pas briguer un nouveau quinquennat en février, conjugué au décès de son ancien allié et rival Henri Konan Bédié, le 1er août, sont néanmoins de nature à pousser Alassane Ouattara à passer le relais.
Si en dehors d’Amadou Gon Coulibaly, Alassane Ouattara n’a jamais préparé de successeur, il parraine depuis plusieurs mois la montée en puissance du vice-président, Tiémoko Meyliet Koné. Nommé en 2022, ce dernier représente désormais le président dans la grande majorité des rendez-vous internationaux (AI du 18/09/23). Symbole de son influence croissante : il s’est entretenu discrètement, début septembre, dans la capitale économique ivoirienne avec l’ancien tout-puissant conseiller spécial d’Alassane Ouattara, Philippe Serey-Eiffel (AI du 19/09/23).
Si Tiémoko Meyliet Koné apparaît à ce jour le mieux placé pour succéder à Alassane Ouattara, Patrick Achi, tout comme le président de l’Assemblée nationale, Adama Bictogo, nourrissent également des ambitions en cas de mise retrait du chef de l’Etat ivoirien. Les relations entre les deux hommes se sont particulièrement tendues depuis le printemps (AI du 01/06/23).
Africa Intelligence.
===== Delirium Tremens ======
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En quoi Achi serait-il en perte de vitesse lorsqu’il a livré avec brio au RHDP le pays Akyé ? Les PM viennent et vont au gré du président dans un régime présidentiel. Si d’aventure il devrait partir ce ne serait point pour une perte de vitesse imaginaire. Ce serait plutôt une nouvelle approche que Ouattara très proactif et progressiste, comme bien d’observateurs d’ici et d’ailleurs l’ont constaté, voudrait impulser. Et Ouattara très fidèle ferait alors une promotion d’Achi et belle promotion. On observe…
Un autre point important a observé est que l’accomplissement de Achi est plus grandiose que celui de Sarassoro qui lui l’a fait en pays acquis au RDR. Achi lui a carrément arraché son pays ou sa région des griffes de l’ex-LMP. Alors ? Comme le dirait Nguess Bon Sens, au nom de quel bon sens peut-on supputer que Achi serait en perte de vitesse et mentioner la victoire sans combat de Sarassoro dans sa région ? Voyons ! Je respecte Sarassoro ainsi que sa victoire mais Achi a une valeur ajoutée beaucoup plus substantielle que ce dernier. Appelons un chat un chat. Où est l’erreur ? Juste un observateur de passage…