Du 13 au 21 février 2023, l’archidiocèse de Gagnoa fera l’objet d’une visite apostolique.
L’annonce de cette visite a été faite le 11 janvier 2023 par Mgr Joseph Aké Yapo qui a pris
possession du siège épiscopal de Gagnoa, le 25 janvier 2009, après le décès, le 15 septembre
2008, de Mgr Barthélemy Djabla.
Une visite apostolique est une visite extraordinaire. Elle a lieu après que le Vatican a reçu des
plaintes pointant des problèmes de gouvernance, d’abus de pouvoir, de scandales financiers,
etc. C’est une forme d’inspection ou d’audit. Le visiteur apostolique, désigné par le Dicastère
pour le Clergé, reçoit une feuille de route indiquant les points précis auxquels il devra être
attentif. Après avoir échangé avec des prêtres, religieux/ses et laïcs de l’archidiocèse, le
visiteur rédige un rapport qu’il remet aux autorités vaticanes. Le rapport peut proposer des
mesures disciplinaires. C’est Mgr Roger Houngbédji, archevêque de Cotonou (Bénin), qui
« inspectera » l’archidiocèse de Gagnoa. En général, le pape choisit une personne non
influençable et non corruptible.
En France, les diocèses de Strasbourg et de Fréjus-Toulon ont été audités, ces dernières
années. En 2008, Mgr Robert Sarah, qui était secrétaire de la Congrégation pour
l’évangélisation des peuples, avait été envoyé en République centrafricaine parce que le
Vatican avait été alerté par les rumeurs de mauvaise gestion et de double vie de deux
évêques. L’ancien archevêque de Conakry écouta tout le monde (prêtres, religieux et laïcs),
rédigea son rapport et le remit à qui de droit. Quelques jours plus tard, l’archevêque de
Bangui, Mgr Paulin Pomodimo, et l’évêque de Bossangoa, Mgr François-Xavier Yombadje,
étaient invités à démissionner.
Les personnes que rencontrera l’archevêque de Cotonou parleront-elles librement ? Diront-
elles au visiteur la vérité, toute la vérité et rien que la vérité ? Quel sera le contenu du rapport
de Mgr Houngbédji ? Des questions qui restent sans réponse pour l’heure. Ce qui est certain,
c’est que la sérénité, la joie et la motivation semblent avoir déserté le cœur de plusieurs
prêtres de Gagnoa. Cela est si vrai que 18 d’entre eux ont dû trouver refuge à San Pedro,
Agboville, Abengourou, Korhogo ou en France où ils disent ne pas être stressés, frustrés ou
humiliés inutilement. On n’avait pas vu pareil exode sous Mgr Noël Kokora Tékry, Mgr
Jean-Pierre Kutwã et Mgr Barthélemy Djabla.
Les visites apostoliques montrent que l’évêque n’est plus tout-puissant, que Rome peut le
dégommer du jour au lendemain s’il est prouvé qu’il maltraite ses prêtres, qu’il s’enrichit
avec l’argent du diocèse ou qu’il mène une double vie. En 2013, le pape François a envoyé
un signal fort aux évêques qui se croient intouchables et indéboulonnables en mettant fin aux
fonctions de Mgr Franz Peter Tebartz Van Els accusé par ses prêtres et laïcs d’être autoritaire
et dépensier et d’avoir plongé le diocèse de Limburg (Allemagne) « dans une crise de
confiance destructrice ». Mgr Philippe Barbarin (Lyon), Mgr Michel Aupetit (Paris) et Mgr
Michel Santier (Créteil) ont été limogés sans état d’âme en 2020 et 2021.
Cela fait un bon moment que le clergé de Gagnoa souffre et se plaint. À mon avis, Rome a
beaucoup tardé à donner une suite à ces souffrances et plaintes mais ne dit-on pas que mieux
vaut tard que jamais ?
Jean-Claude DJEREKE
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