Les deux sociétés censées concurrencer la Sotra sur le marché exiguë mais utile et promoteur du transport lagunaire en Côte-d’Ivoire, traversent d »énormes difficultés financières. La raison première est toute simple, la préférence des Abidjanais pour la route, surtout que la lagune n’envoie pas les usagers là où ils doivent être.
Ce qui pose la question de l’utilité de ces investissements, qualifiés par certains de prestige en son temps, pendant que d’autres évoquaient des sociétés écrans pour nécessités de blanchiment d’argent issu de trafics illicites d’or ou de cocaïne.
Liman S.
Bictogo et Bakayoko appellent Alassane Ouattara au secours
Les deux patrons des opérateurs privés ivoiriens, qui se partagent le marché du transport lagunaire à Abidjan avec la société publique Sotra, ne parviennent pas à équilibrer leurs comptes.
Attention, risque de noyade en perspective. Les deux opérateurs privés ivoiriens spécialisés dans le transport lagunaire à Abidjan sont en grande difficulté financière. Selon nos informations, la Société de transport lagunaire (STL), fondée par Adama Bictogo, président de l’Assemblée nationale et membre influent du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), le parti présidentiel, et Citrans, propriété de Zoumana Bakayoko, frère du défunt Premier ministre Hamed Bakayoko, ont d’ailleurs sollicité le gouvernement pour un plan de sauvetage.
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Adama Bictogo, touché mais pas coulé
L’ancien ministre a brusquement dégringolé dans la hiérarchie du RHDP, le parti présidé par Alassane Ouattara. Le prix à payer pour avoir exprimé ses ambitions un peu trop tôt ?
Par Vincent Duhem – à Abidjan
C’est un conseil politique en forme de rentrée des classes. Les cadres du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) ont été convoqués lundi 28 février par Alassane Ouattara (ADO). Le chef de l’État doit annoncer une large restructuration, très attendue, qui doit permettre de redynamiser un parti à l’arrêt depuis les élections législatives de mars 2021.
Assis dans l’enceinte de la patinoire du Sofitel Ivoire, à Abidjan, le Premier ministre, les membres de son gouvernement, les présidents d’institution l’écoutent religieusement justifier ses principales décisions. L’une d’entre elles est de supprimer la direction exécutive du parti, dirigée jusqu’alors par Adama Bictogo. L’ancien ministre, qui assure actuellement l’intérim de la présidence de l’Assemblée nationale, prend la tête d’un secrétariat exécutif qui regroupe quatre secrétaires exécutifs adjoints et vingt-deux secrétaires nationaux.
Costume sombre, cravate bordeaux et habituels boutons de manchette, Adama Bictogo ne fend pas l’armure. « Ma gratitude et ma pleine reconnaissance à son excellence monsieur le président de la République, président du RHDP, Alassane Ouattara, pour sa confiance renouvelée en ma modeste personne pour diriger le nouveau secrétariat exécutif de notre parti. » Sur la photo qui accompagne ce post Facebook, Bictogo pose aux côtés du président. Il arbore un sourire de circonstance.
Mise à l’écart
En coulisses, personne n’est dupe. Tout le monde sait que cette restructuration est pour lui une forme de désaveu. Un déclassement qui ne dit pas son nom pour celui qui ces derniers mois s’était imposé, derrière Ouattara, comme le patron du RHDP. Nommé secrétaire exécutif, il dépend désormais d’un directoire de 40 membres, dont la présidence est confiée à Gilbert Koné Kafana et dont il est chargé de mettre en œuvre les directives. Un exécutant en quelque sorte. Son lien direct avec le président du parti est coupé.
Adama Bictogo intègre lui aussi le directoire. Mais, selon nos sources, alors que la structure devait initialement compter trente personnes dont quinze ministres et que Bictogo apparaissait au second rang de l’ordre protocolaire, l’organigramme a été revu. Après réflexion, le président Ouattara a décidé d’y intégrer quelques poids lourds du parti, comme la ministre des Affaires étrangères, Kandia Kamara. Conséquence : « Bict », comme le surnomment certains ministres, n’est plus que le sixième nom de la liste.
« Lors de la cérémonie du 28 février, Ouattara a ouvert le bal des prises de parole, suivi par Patrick Achi, Henriette Dagri Diabaté, Gilbert Koné Kafana et, enfin, Bictogo. L’ordre hiérarchique est désormais clair », analyse un haut cadre du RHDP. Homme de caractère, avec lequel Bictogo a par le passé eu quelques accrocs, Kafana, qui est aussi le maire de Yopougon, a tout de suite cherché à asseoir son autorité.
Ambitions présidentielles
Pour comprendre la relative chute de ce flamboyant homme d’affaires, il faut revenir quelques mois en arrière. Nous sommes début septembre 2021. Les vacances gouvernementales sont à peine achevées qu’un encart publié dans le journal Le Patriote, proche du pouvoir, annonce la tenue d’une convention du RHDP le 21 septembre. En tournant les pages de son journal, Alassane Ouattara tombe des nues et demande des explications. Si Bictogo nie en être à l’origine, tous les regards convergent dans sa direction, d’autant qu’il avait convoqué la semaine suivante l’ensemble des ministres pour une réunion du parti.
Mécontent, ADO fait annuler la réunion. Une mise au point s’impose. Il fait passer le message quelques jours plus tard en conseil des ministres : les membres du gouvernement ont le droit de participer à des actions ou des activités politiques, mais ils doivent au préalable en référer au Premier ministre. Patrick Achi ne s’en est pas plaint directement au président mais, comme lui, plusieurs ministres importants commençaient à s’agacer d’être convoqués pour un oui ou pour un nom par Bictogo. Le 15 septembre, le chef de l’État recadre directement le directeur exécutif lors d’une réunion de son cercle rapproché au palais présidentiel.
IL A AFFICHÉ SES AMBITIONS TROP TÔT. IL ENTRAÎNAIT LE PARTI DANS UNE BATAILLE DE SUCCESSION MOINS D’UN AN APRÈS L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
Selon nos informations, ADO a une autre raison d’en vouloir à son ancien ministre. Depuis plusieurs semaines, ce dernier ne cache plus dans certains milieux ses ambitions présidentielles pour 2025, et ce quel que soit le choix du chef de l’État. Des propos revenus aux oreilles du patron au plus mauvais moment. « Cas contact » au début du mois d’août, ADO a contracté le Covid-19. Affaibli par la maladie, il est contraint de chambouler son programme estival. Également touché, son frère cadet, Téné Birahima Ouattara, est évacué en France par précaution. Comme c’est toujours le cas avec la santé des dirigeants, la machine à rumeurs se met en route dans le tout-Abidjan. « Quel est l’état de santé réel du président ? » s’interroge-t-on dans les salons feutrés.
Dans ce contexte, les états d’âme de Bictogo passent mal. « Il a affiché ses ambitions trop tôt. Il entraînait le parti dans une bataille de succession avec Patrick Achi alors que nous sommes moins d’un an après l’élection présidentielle », raconte un ministre.
Aux yeux d’Alassane Ouattara, cette situation ne fait que justifier la restructuration du RHDP, qu’il envisage depuis le début de son troisième mandat. S’il sera officialisé fin février, le sort de Bictogo est déjà scellé fin septembre 2021. La direction exécutive qu’il dirige sera dissoute. Dans les cercles du pouvoir, ses adversaires se congratulent. On l’imagine déjà persona non grata, voire tout bonnement éjecté de la direction du parti.
Course de fond
Député d’Agboville, homme d’affaires à succès dont l’entreprise Snedai Groupe rafle contrat sur contrat depuis 2011, proche du chef de l’État avec qui il parle presque tous les jours… Autant de pouvoir accumulé en si peu de temps crée forcément un régiment d’ennemis. Bictogo, lui, fait le dos rond. Animal médiatique qui aime prendre la lumière, il décide de faire vœu de silence. Il n’a d’ailleurs pas répondu aux sollicitations de Jeune Afrique. En privé, il peste contre ces « jaloux » qui n’ont jamais accepté sa montée en puissance et ont attendu la première occasion pour le « liquider ». Nul doute qu’il n’oubliera pas leurs noms.
« Alassane n’a jamais eu l’intention de s’en séparer complètement, tempère un collaborateur du chef de l’État. Les décès d’Amadou Gon Coulibaly [AGC] et d’Hamed Bakayoko, respectivement en juillet 2020 et en mars 2021, avaient laissé un vide dans lequel Bictogo s’est engouffré. Il fallait rééquilibrer les choses. Le président a montré qu’il avait encore une autorité totale sur le parti. »
D’ailleurs, ces derniers mois, lorsque Amadou Soumahoro, souffrant, refuse de confier l’intérim de la présidence de l’Assemblée nationale à Bictogo, lui préférant le doyen des députés Mamadou Diawara, ADO tranche sans hésitation en faveur du chef d’entreprise. Les deux hommes sont à couteaux tirés. En déplacement en Turquie pour raisons médicales depuis mi-janvier, Soumahoro a finalement regagné Abidjan le 26 mars sans en avertir Bictogo. Il tenait absolument à présider la cérémonie d’ouverture de la première session parlementaire de l’année 2022 qui a eu lieu le 1er avril. Mais, fatigué, il a finalement été contraint d’abandonner son fauteuil à la dernière minute, laissant Bictogo prononcer le discours d’ouverture devant l’ensemble du gouvernement.
À 59 ans, Adama Bictogo sait à quel point la vie d’un homme politique est une course de fond faite de hauts et de bas. Des « bas », ce fils de planteur en a déjà expérimentés quelques-uns. En juin 2011, il est nommé ministre de l’Intégration africaine. C’est une récompense pour celui qui s’est engagé en faveur du Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara depuis les années 1990, un pied dans la politique, l’autre dans les affaires. Conseiller spécial du général Robert Gueï en 1999, puis du Premier ministre Charles Konan Banny en 2006, il fut présent un an plus tard lors des accords politiques de Ouagadougou.
À la tête d’une société d’import-export, Côte d’Ivoire Fruits, il était au même moment impliqué dans le négoce de cacao. Entre 2004 et 2007, il a aidé la société française Soeximex à exporter l’or brun ivoirien à partir du port togolais de Lomé via le Burkina Faso. Le nord de la Côte d’Ivoire est alors toujours sous le contrôle des rebelles des Forces nouvelles (FN).
Mais, un an après sa nomination au gouvernement, le scandale du détournement des indemnisations des victimes du Probo Koala, ce navire qui, en 2006, avait déversé des déchets toxiques à Abidjan, éclate. Début 2010, Bictogo dirigeait le cabinet MBLA, chargé de gérer la médiation entre les parties. Il est accusé d’avoir détourné une partie des 7 millions d’euros d’indemnités destinées aux victimes et est contraint à la démission. Il sera finalement blanchi par la justice mais aura la dent dure contre ceux qui ont tenté de profiter de sa chute, notamment un certain Hamed Bakayoko.
À la mort d’Amadou Gon Coulibaly, dont il était un intime, Bictogo s’opposera d’ailleurs à ce que Bakayoko soit le candidat du parti pour la présidentielle de 2020. Le décès du plus proche collaborateur du chef de l’État rebat les cartes du pouvoir. Bictogo tente de se trouver un nouveau protecteur à la mort de ce dernier en la personne de Téné Birahima Ouattara. Les deux hommes s’apprécient, se connaissent par cœur. Mais, lorsque les tensions avec Patrick Achi sont apparues, Photocopie n’a pas hésité, lui aussi, à recadrer Bictogo.
Duel contre Achi
Dans les cercles politiques du bord de la lagune Ebrié, certains font le parallèle entre son duel à distance avec l’actuel chef du gouvernement et celui que s’étaient livré Hamed Bakayoko et Amadou Gon Coulibaly. Ils ont à leur manière les qualités et les défauts d’AGC et d’Hamed. Achi est un technocrate pas encore très populaire, au contraire du gouailleur Bictogo qui a contre lui ce côté sulfureux dont avait pâti Bakayoko.
Que peut-il désormais espérer ? « Bictogo fait toujours partie du système. Il a perdu de sa superbe, il est affaibli mais il ne faut pas l’enterrer. Il n’est pas mort », analyse un visiteur du soir d’Alassane Ouattara. Fonceur, homme de terrain ayant noué des relations un peu partout sur l’échiquier politique, donc rassembleur, il représente un profil indispensable au rayonnement du RHDP.
A-t-il tiré un trait sur ses ambitions ? Selon un homme qui le connaît depuis une dizaine d’années, Adama Bictogo veut le pouvoir et croit toujours être en mesure de l’avoir. Mais il semble avoir retenu la leçon et n’ira pas contre la volonté du chef de l’État. Or ce dernier a toujours préféré les profils de technocrates et n’est pas friand du mélange entre business et politique.
« Bictogo a beau connaître Ouattara depuis 1994, il n’y a que deux personnes qui peuvent se prévaloir d’être proches d’Alassane : sa femme et son frère. Tous les autres ne sont que des outils. Ceux qui, comme Guillaume Soro, ont tenté de s’affranchir de sa tutelle l’ont payé cash », prévient un vieux routier de la politique ivoirienne.
Jeune-Afrique
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==== ANALYSE POLITIQUE A LA PLACE D’UNE ETUDE ECONOMIQUE ====
Dommage que l’article soit quasiment consacré à des aspects politiques là où des questions économiques pertinentes auraient intéressé le lecteur !
1. La libéralisation du transport lagunaire est-elle effective ? La Sotra n’étouffe-t-elle pas le marché avec des avantages concurrentiels énormes au détriment de l’initiative privé objet des concessions BOT ?
2. Quid de la gestion des sociétés privés détenues par des hommes politiques en Afrique (management, politique RH, conditions d’accès d’accès au financement etc.)
3. Pour une demande en transport à Abidjan, qui tourne entre 700 000 et 1 million de personnes par jour, l’offre est-elle déjà excessive ?
4. La concurrence des acteurs informels (les fameuses pinasses) ne nuit elle pas à la réalisation des ambitions commerciales du privé formel ? La direction générale des affaires maritimes et portuaires (DGAMP) joue-t-elle son rôle de manière loyale ?
5. Le succès de la SOTRA depuis 2011 a-t-elle impacté négativement les espoirs des acteurs privés ? Ou la réalisation des grands ponts à Abidjan a t elle réduit l’attrait du transport lagunaire au point où
6. L’état a-t-il respecté ses engagements d’œuvrer au nettoyage en profondeur du plan d’eau pour permettre une navigabilité sécurisée sur tout le plan d’eau de la lagune, y compris dans tout le GRAND ABIDJAN ?
7. Le développement d’une offre de transport multimodal pour plus de mobilité de confort et de sécurité dans le grand Abidjan nécessite t il encore la présence active de l’Etat compte tenu des coûts énormes exigés dans les cahiers de charge, de la difficulté d’approvisionnement des pièces pour les bateaux, d’un déficit de formation locale ou de l’absence d’une masse critique de techniciens dans les domaines pointus etc. pour une maintenance de qualité ?
Bref des thématiques plus utiles que les histoires classiques déjà ressassées !
GBANSE ALEXIS QU ES CE QUE TU ASN FAIS A NOTRE SITE ??????????
Perso, je ne suis ps fâché de voir la compagnie d’Etat tirer son épingle du jeu, tout en reconnaissant que la diversité de l’offre tire toujours celle-ci vers le haut. Les joueurs du privé, en s’engageant dans l’aventure, ont-il bien étudié le marché ? Etudiants, un circuit lagunaire nous intéressait particulièrement : du Plateau à Abobo-Doumé, pour un corridor à l’arrivée avec une multitude de maquis de part et d’autre. On y passait des samedi entiers de 14 à 20-21h, avec possibilité de continuer à Poy avec des autobus disponibles à proximité immédiate. La Sotra a bien maillé sa couverture parce qu’à proximité des débarcadères, il y a toujours une ligne de bus pour prendre le relai. Elle est forcément accessible aux compagnies privées aussi, mais le jeu de la concurrence devrait (ou aurait dû) inciter Aqualine et STL à développer une solution concurrente, voire meilleure.
La surpopulation urbaine à Abidjan dont l’une des conséquence est l’absence de fluidité routière, trouve une de ces solutions dans l’usage du plan d’eau lagunaire pour décongestionner la circulation. Mais tout le monde rêvant d’autonomie avec possession de véhicule individuel, qu’offrent ces compagnies aux automobilistes en quête de solution ? Pourquoi pas des solutions de parking aux alentours immédiats de leurs gares pour prendre le relai ? Pourquoi pas un partenariat avec la Sotra pour un ticket unique (1 bus entrée, 1 bus sortie + 1 bateau bus) ? Pourquoi pas des solutions de trajet tout-compris unifiés avec des mini-bus couvrant les trajets les plus usités avec le bateau en intermédiaire ? Pourquoi pas… (faudra me payer pour toutes ces idées 🙂 ).
Bref, y’en a marre que tout le monde accoure à Papa-Etat quand on a engagé sa responsabilité personnelle – et lucrative – dans un business, et que ce dernier périclite. Ficelez mieux vos affaires, et trouvez des solutions pour que ça marche. L’initiative et la concession sont trop belles pour que vous vous écrouliez déjà. Sortez-vous les doigts du Q, et bougez-vous le Q bon sang !