Le nucléaire connaît une évolution prometteuse avec, notamment, les nanoréacteurs. La solution la moins onéreuse et la moins polluante pour un continent dont la moitié de la population n’a pas accès à l’électricité et qui peine à s’industrialiser…
Ancien Premier ministre du Burkina. Président de la Commission de l’énergie atomique du Rwanda et du comité d’orientation du Réseau francophone international en conseil scientifique.
Sur le continent, seule l’Afrique du Sud exploite à ce jour une centrale nucléaire. © Mike Hutchings/REUTERS
Alors que la plupart des pays africains connaissent toujours une croissance socio-économique forte, leur production d’électricité a du mal à combler les besoins de leurs populations.
Frein au développement
En 2020, près de la moitié des habitants du continent (600 millions) n’avaient pas accès à l’électricité. Ce faible taux d’accès et les coupures récurrentes sont préjudiciables. Sans électricité, difficile pour ces pays de se doter d’industries compétitives.
La science et les technologies nucléaires apparaissent de plus en plus comme des solutions attrayantes pour pallier ces faiblesses. En effet, l’énergie nucléaire n’entraîne aucune émission de CO2 dans l’atmosphère. Elle est en outre la technologie de production d’électricité la moins onéreuses de toutes. L’acquisition de réacteurs de type EPR exige cependant d’importants moyens financiers. Il faut aussi disposer de grandes infrastructures et d’une expertise solide, ce dont manque cruellement le continent. Seule l’Afrique du Sud exploite une centrale nucléaire.
Réacteurs modulaires et nanoréacteurs
Tout change avec l’avènement de solutions innovantes telles que les petits réacteurs modulaires (SMR) et les nanoréacteurs. Ces réacteurs, qui génèrent généralement jusqu’à 300 MWh, sont fabriqués en usine, ce qui réduit l’investissement initial par unité. Ils présentent des avantages en matière de sûreté et de sécurité, ce qui facilite leur usage dans les pays en développement. Enfin, son échelle rend la technologie SMR plus facilement déployable. Elle ne requiert pas d’extensions importantes de la capacité du réseau électrique et elle peut être amenée jusque dans des zones isolées. Ces caractéristiques font des SMR la technologie idéale pour surmonter nombre des problèmes financiers et d’infrastructures précités.
Ainsi, pour atteindre les objectifs de la transition énergétique évoqués à la COP27, il faudra recourir à toutes les technologies bas carbone. Sans l’énergie nucléaire, ce processus sera plus difficile et plus coûteux à mettre en œuvre. Comme c’est le cas des énergies renouvelables, le nucléaire est une source d’énergie clé pour décarboner le mix énergétique.
Sujet polémique
Une politique africaine doit être élaborée afin d’assurer l’harmonisation de programmes nationaux permettant de déployer ces technologies et, en même temps, d’adopter des mesures renforçant l’efficacité énergétique.
Depuis les catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima, le nucléaire fait polémique dans le monde. En Afrique, peu de professionnels sont formés sur le sujet. Les risques d’accident suscitent la méfiance et l’inquiétude des populations. Mais, lorsque les avantages de l’énergie nucléaire, et plus particulièrement des SMR, leur sont expliqués, leur adhésion à cette solution s’accroît. Dans ce sens, la Commission européenne a accordé, en février 2022, un label « vert » au nucléaire. Cela a permis que les investissements dans ce secteur soient classés comme « durables ». À la clé, des avantages fiscaux jusque-là réservés aux seules énergies renouvelables.
Diplomatie scientifique
Les sciences et les technologies nucléaires peuvent également jouer un rôle important dans le domaine de la santé et de l’agriculture. Leur usage pacifique doit donc être renforcé en tant que moteur de développement. Le nucléaire fournit des outils qui permettent de mesurer l’impact du changement climatique sur l’agriculture et de développer des pratiques agricoles intelligentes. Sur le plan de la santé, la multiplication des centres de radiothérapie (rayonnement appliqué au traitement du cancer, fondé sur une technologie nucléaire) peut contribuer directement à l’atteinte des objectifs fixés par les gouvernements africains dans l’agenda 2063 de l’Union africaine.
Enfin, pour tirer pleinement avantage de leur potentiel nucléaire, les pays du continent devront s’appuyer sur une diplomatie scientifique. Celle-ci passe par des partenariats renforcés, qui facilitent les transferts de compétences et incluent une meilleure gestion des questions de sûreté et de sécurité, y compris le risque terroriste.
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