Il y a 60 ans était assassiné le premier président du Togo, Sylvanus Olympio. Ses assassins l’avaient extrait de l’ambassade des États-Unis où il s’était réfugié après l’attaque de sa résidence dans la nuit du 12 au 13 janvier 1963. Un assassinat que ne put empêcher Leon B. Poullada, l’ambassadeur des États-Unis, que son collègue français, Henri Mazoyer, avait pourtant prévenu quelques heures plus tôt.
Que reprochait-on à Olympio ? 1) D’avoir été formé à la London School of Economics ; 2) d’avoir visité la France dix jours après l’Allemagne du chancelier Adenauer et les États Unis de John Kennedy ; 3) d’avoir prononcé en mai 1960 devant des journalistes de l’AFP cette phrase : « Je vais faire mon possible pour que mon pays se passe de la France. » 4) D’avoir envisagé de sortir de la zone franc pour créer une monnaie togolaise. Jacques Foccart, le sinistre conseiller de de Gaulle aux Affaires africaines, disait que ses relations avec le père de l’indépendance du Togo étaient moins bonnes que celles qu’il entretenait avec Nicolas Grunitzky, le successeur d’Olympio (cf. « Foccart parle », Paris, Fayard-Jeune Afrique, 1995).
Quelques jours après le coup d’État, à des journalistes français qui l’interrogeaient, le sergent Étienne Gnassingbé avoua avoir abattu Olympio de ses propres mains. En 1992, il revint sur sa déclaration sur RFI.
Bien sûr qu’il est choquant que des pays qui se disent civilisés et attachés aux droits de l’homme se débarrassent de cette façon d’un homme qui voulait uniquement le bien de son peuple. Mais n’est-il pas encore plus choquant le fait que d’autres dirigeants noirs qui refusaient de faire allégeance à l’Occident aient été soit tués (Thomas Sankara), soit renversés (Modibo Keïta et Laurent Gbagbo) ? Pourquoi ne les avons-nous pas protégés ? Pourquoi le lâche assassinat d’Olympio est-il resté jusqu’ici impuni ? Et que faisons-nous pour qu’on ne touche plus à nos résistants ?
Alors que Dramane Ouattara exigeait la libération sans délai des 49 mercenaires arrêtés et emprisonnés à Bamako, il lui fallut attendre six mois pour que les autorités maliennes prêtent une oreille attentive à la médiation de Faure Gnassingbé. La morale de cette affaire, c’est que le Mali ne fait pas partie des pays africains que tel ou tel voyou peut intimider et impressionner. Faut-il saluer le rôle joué par le président togolais dans le dénouement de la crise entre Abidjan et Bamako ? Mérite-t-il d’être félicité ? Non, car ce n’est pas d’abord cela que les Togolais et les Africains attendent de lui. Ce qu’on lui demande, c’est qu’il libère les nombreux prisonniers politiques togolais et qu’il dégage car le Togo n’est pas la propriété privée des Gnassingbé.
Jean-Claude DJEREKE
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