Un passage du Maroc à l’Anglais entraînerait une régression économique et sociale durable
Certaines voies se font entendre en faveur d’un remplacement du français par l’Anglais au Maroc, seul pays arabe à être doté d’une véritable industrie automobile et d’un train à grande vitesse (hors richissime Arabie saoudite), et champion arabe en matière d’innovation (hors pays pétroliers). Pourtant, une telle mesure ferait régresser le royaume au niveau des pays arabes anglophones non pétroliers (Égypte, Jordanie, Soudan, Yémen…), en le coupant lentement mais sûrement des pays francophones du Nord, de sa profondeur africaine et de la vaste Afrique francophone, partie économiquement la plus dynamique du continent. De même, cela réduirait les débouchés migratoires des Marocains, du fait de l’hostilité de pays anglo-saxons à l’égard de l’immigration arabe, et entraînerait une explosion du port du Niqab au sein de la société marocaine, dont l’image serait considérablement ternie à l’international.
Depuis quelques années, un certain nombre de personnes au Maroc appellent au remplacement du français par l’anglais dans l’enseignement et dans les administrations du pays, et en particulier au sein de certaines formations politiques. Des voix qui bénéficient du soutien désormais public du Royaume-Uni, qui appelle ouvertement nos frères francophones marocains à se débarrasser de la langue française, à travers son antenne locale du British Council (qui avait notamment publié et massivement diffusé un document intitulé « Le passage du Maroc à l’anglais », en avril 2021). Émanant d’un organisme officiel, cette attitude constitue donc une véritable déclaration de guerre contre le monde francophone, et par conséquent contre les intérêts de tous les pays et peuples qui le composent. Rien de surprenant, après tout, venant de la « perfide Albion » (surnom donné depuis des siècles par les Français à l’Angleterre, et signifiant qu’il ne faut jamais lui faire confiance, étant capable des ruses les plus immorales afin d’atteindre ses objectifs… comme l’ont d’ailleurs constaté les pays arabes avec l’énorme mensonge des armes de destruction massive pour envahir l’Iraq).
En militant en faveur de l’anglais, ces différentes parties prétendent que cela apporterait développement et postérité au Maroc, contrairement à la langue française qui empêcherait le « décollage « du pays. Pourtant, force est de constater que le Maroc n’a aucune leçon à recevoir en matière de dynamisme et de développement économique et social, et qu’il n’a même, au contraire, que des leçons à donner en la matière aux pays arabes ou africains anglophones.
Les grandes réussites du Maroc
Ainsi, à titre d’exemple, et en dehors de la richissime Arabie Saoudite pétrolière, le Maroc est le seul pays arabe à disposer de trains appartenant à la catégorie des trains à grande vitesse (roulant à environ 300 km/heure), ainsi que le seul pour l’ensemble du continent africain. Le Maroc est également l’unique pays arabe à être doté d’une véritable industrie automobile, avec une production de plus de 403 mille véhicules en 2021 (contre seulement 24 mille pour l’Égypte, pourtant trois fois plus peuplée, et plus grand pays arabe en population).
Si le Maroc a pu se distinguer dans ces domaines, c’est grâce à la relation amicale et privilégiée qu’il entretient avec la France, qui est fortement présente dans les industries automobile, ferroviaire eu encore aéronautique. Et ce, contrairement au Royaume-Uni, dont les industries sont peu développées (même en comparaison avec l’Italie).
De même, le Maroc est récemment devenu une grande puissance économique continentale, comme en témoigne son accession au rang de deuxième investisseur africain sur le continent, après l’Afrique du Sud (dont le poids économique remonte à l’époque de l’Apartheid, et qui est aujourd’hui en grave déclin, à l’opposé de pays comme la Côte d’Ivoire ou le Sénégal). Le dynamisme marocain est tel, que selon le dernier des classements annuels établis par le magazine Jeune Afrique, le pays se distingue par la présence de non moins de 56 entreprises parmi les 500 plus grandes entreprises africaines en 2021, contre 50 pour l’Égypte, qui est pourtant trois fois plus peuplée…
Si le Maroc est devenu un acteur d’une telle importance sur la scène continentale, c’est grâce à la vaste et voisine Afrique francophone qui fut le point de départ de l’expansion internationale de ses entreprises, du fait de la proximité géographique et linguistique. Grâce à cette double proximité, les entreprises marocaines ont réussi à gagner en taille et en expérience, leur permettant de s’étendre ensuite au-delà de l’espace francophone (dont la superficie est d’ailleurs bien plus importante qu’indiqué par la plupart des cartes géographiques en circulation, qui divisent par trois ou quatre la taille du continent). Désormais, le Maroc compte donc plus de grandes entreprises que l’Égypte, pourtant trois fois plus peuplée. En d’autres termes, si le Maroc était anglophone, il serait probablement aujourd’hui au même niveau de dynamisme économique que l’Égypte, et aurait donc trois fois moins de grandes entreprises que présentement…
Quant au domaine de l’innovation, le Maroc se distingue également en arrivant en tête des pays arabes non pétroliers (qui s’offrent souvent les services de chercheurs étrangers, très généreusement rémunérés) dans le dernier classement mondial de l’innovation, publié par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, en arrivant à la 67e position, largement devant la Jordanie (78e) et l’Égypte (89e). Le Maroc est d’ailleurs suivi par la Tunisie, autre pays arabe francophone qui arrive à la 73e place, et au deuxième rang de pays arabes non pétroliers. Occasion de rappeler que les pays arabes francophones sont globalement plus développés économiquement et socialement que les pays arabes anglophones non pétroliers (le Maghreb en comparaison avec le Moyen-Orient, ou la Mauritanie et Djibouti en comparaison avec le Soudan et la Somalie).
De même, il est plus qu’intéressant de noter que le Maroc et la Tunisie se classent continuellement parmi les meilleurs pays arabes pour ce qui est du niveau en anglais de leur jeunesse. Ainsi, et selon le dernier classement annuel EF-English proficiency index, référence mondiale en la matière, le Maroc et la Tunisie se classent respectivement à la 4e et à la 2e place au sein du monde arabe, dépassant ainsi non moins de 12 et de 13 pays arabes ayant l’anglais pour langue seconde. En se classant 76e mondial, le Maroc arrive devant les Émirats arabes unis, ex æquo avec l’Algérie (78e, et 5e au niveau arabe). Pour sa part, la Tunisie se classe à la 56e place, devant le Qatar (73e). Ainsi, les trois pays du Maghreb devancent ensemble de nombreux pays arabes anglophones, comme le Koweït (84e), l’Égypte (85e), la Jordanie (90e), Oman (101e) ou encore l’Arabie saoudite (102e).
En d’autres termes, l’importante avance du Maroc et de la Tunisie en matière d’innovation par rapport aux pays arabes anglophones (hors pays pétroliers du golfe, bien sûr), et le fait qu’ils fassent toujours partie des meilleurs en matière de maîtrise de la langue anglaise (tous pays arabes confondus), permettent donc de penser qu’un passage du Maroc et de la Tunisie à l’anglais entraînerait, non pas une amélioration, mais une baisse du leur niveau en innovation et en anglais, en les faisant régresser au niveau des pays arabes anglophones.
Ainsi, un éventuel passage du Maroc à l’anglais serait fort dommageable aux intérêts économiques du pays. Celui-ci verrait notamment son influence économique se réduire considérablement dans la vaste Afrique francophone, tout comme son influence culturelle et religieuse multiséculaire en Afrique de l’Ouest, et en particulier dans la zone sahélienne (où le royaume chérifien doit, notamment, veiller à conserver son statut de référence en matière religieuse, et ce, au plus grand bénéfice des pays de la région, confrontés à une offensive intégriste et djihadiste). Une double perte d’influence d’autant plus dommageable que la vaste Afrique francophone constitue globalement la partie la plus dynamique économiquement, la plus stable politiquement, la moins endettée, la moins inégalitaire et la moins violente du continent.
Le dynamisme supérieur de l’Afrique francophone
En effet, et en matière de croissance économique, l’Afrique subsaharienne francophone a réalisé en 2021 les meilleures performances économiques du continent pour la huitième année consécutive et la neuvième fois en dix ans, affichant un taux de croissance annuel de 3,6 % en moyenne sur la décennie 2012-2021 (et 4,1 % hors cas très particulier de la Guinée équatoriale, pétrolière et partiellement francophone), contre seulement 2,2 % pour le reste de l’Afrique subsaharienne. Grâce à leur dynamisme, la Côte d’Ivoire est récemment devenue le pays le plus riche d’Afrique de l’Ouest continentale en termes de PIB par habitant (malgré de très modestes richesses naturelles, en comparaison avec le Ghana et le Nigeria), tandis que le Gabon est devenu le pays le plus riche du continent (hors très petits pays, majoritairement insulaires), en dépassant le Botswana, pourtant deuxième producteur mondial de diamants, après la Russie.
La Côte d’ivoire est même devenue le seul pays africain, assez modestement pourvu en matières premières non renouvelables, à dépasser en richesse un pays d’Amérique hispanique, à savoir le Nicaragua dont le PIB par habitant atteignait 2 091 dollars début 2022 (contre 2 579 dollars, selon la Banque mondiale, et hors très petits pays africains). La Côte d’Ivoire est d’ailleurs sur le point de devancer également le Honduras (2 831 dollars par habitant). De son côté, le proche Sénégal, qui creuse l’écart avec le sur-médiatisé Rwanda (au PIB par habitant désormais deux fois inférieur, avec seulement 834 dollars, et classé 38ème sur le continent…), a mis en service en décembre 2021 le train le plus rapide d’Afrique subsaharienne, à égalité avec le Gautrain sud-africain (160 km/heure).
Quant au niveau d’endettement, l’Afrique francophone demeure aussi, Maghreb inclus, la partie globalement la moins endettée du continent, avec un taux global de la dette publique s’établissant à 58,4 % début 2022 pour cet ensemble de 25 pays, contre 68,3 % pour le reste de l’Afrique (selon les données disponibles auprès du FMI en début d’année). Il est d’ailleurs à noter que seuls deux ou trois pays francophones font chaque année partie des dix pays les plus endettés du continent, et qu’aucun d’entre eux ne fait partie des cinq les plus endettés.
De plus, les pays les plus pauvres du continent sont majoritairement anglophones, comme le Soudan du Sud, qui arrive en dernière position après avoir été ravagé par une longue guerre civile ayant fait environ 400 mille morts. Par ailleurs, les pays francophones sont globalement moins inégalitaires, comme en témoigne la présence d’un seul et unique pays francophone parmi les dix pays africains les plus inégalitaires (selon les dernières données de la Banque mondiale relatives à l’indice GINI). Ce qui explique probablement en bonne partie les niveaux records de criminalité et de violence observées en Afrique anglophone, comme en Afrique du Sud (plus de 16 000 homicides par an).
Enfin, l’Afrique francophone est la partie globalement la plus stable et la plus sûre du continent, dont la partie orientale, majoritairement anglophone, constitue historiquement la zone connaissant les conflits les plus meurtriers. En effet, on y trouve notamment deux des trois pays africains ayant été déchirés par les conflits les plus sanglants de la dernière décennie, proportionnellement à leur population (le Soudan du Sud et la Somalie). À ces conflits, s’ajoutent un certain nombre de problèmes sécuritaires (terrorisme islamique dans le nord du Mozambique…) et de tensions interethniques, comme en Éthiopie où elles avaient déjà provoqué la mort de plusieurs centaines de personnes dans les quelques années qui avaient précédé le déclenchement d’une guerre civile, fin 2020, et qui a fait plusieurs dizaines de meilleurs de morts en seulement deux ans.
Par ailleurs, le dynamisme économique de l’Afrique francophone s’accompagne d’une montée en puissance démographique, principalement tirée par sa partie subsaharienne dont la progression s’accompagne, d’ailleurs, d’un déclassement démographique du Maghreb. Ainsi, la ville de Casablanca, plus grande ville du Maghreb, et qui était également autrefois la plus grande ville francophone d’Afrique, vient de rétrograder à la cinquième place des villes francophones du continent, en se faisant dépasser par Douala, la deuxième métropole camerounaise. Et selon les dernières projections, la capitale économique du Maroc devrait encore reculer pour se situer à la 10e position d’ici 2035.
Le cas du Rwanda : un pays qui ne décolle guère, un modèle de propagande anglophone, et une honte pour l’Afrique…
Quant au Rwanda, ancienne colonie belge souvent citée comme exemple par ceux qui appellent au remplacement du français par l’anglais, et dont le niveau de connaissance est fort limité, il convient de rappeler que ce pays est très loin d’être le pays dynamique présenté par le régime en place, qui n’est autre que le plus gros client africain des agences de communication internationale. La vérité est que le Rwanda est même l’un des pays les plus pauvres du continent, se classant à la 38e place en termes de PIB par habitant (834 dollars seulement, début 2022). Ce soi-disant « Singapour africain », se situe même en dessous de la moyenne africaine subsaharienne en matière d’accès à l’électricité, avec un taux de seulement 46,6 % en 2020, malgré la très petite taille du pays (27 fois moins étendu que le Maroc…).
Le Rwanda est donc un des pays les plus sous-développés du continent et du monde, alors même qu’il se distingue mondialement comme en étant le seul et unique pays à piller à grande échelle les richesses d’un pays voisin (la République démocratique du Congo, ou RDC), au point de se classer souvent parmi les deux principaux producteurs et exportateurs mondiaux de tantale, un élément stratégique extrait à partir d’un minerai appelé coltan, bien que son sous-sol en soit pratiquement dépourvu. Une situation ubuesque, dont est victime la RDC depuis de nombreuses années, mais qui est rendue possible par une féroce protection diplomatique américaine et britannique au profit des autorités rwandaises…
Ces mêmes Américains et Britanniques avaient d’ailleurs soigneusement préparé l’arrivée au pouvoir du régime actuel, afin de prendre le contrôle des richesses de la RDC (qui avait pris ses distances avec les États-Unis), en finançant et en armant dès la fin des années 1980 les rebelles tutsis anglophones qui multiplièrent les boucheries à partir de l’Ouganda voisin, créant ainsi un climat de terreur au sein de la population hutue du Rwanda. Une population qui était encore traumatisée par le génocide perpétré au Burundi voisin, en 1972, par le pouvoir tutsi contre les Hutus du pays, avec l’extermination quasi-totale de l’élite hutue (des enseignants aux étudiants, en passant par les infirmiers et cadres d’entreprises, et un total d’environ 200 mille exécutions en seulement quelques mois, malgré les faibles moyens « logistiques » de l’époque).
Un climat de terreur qui conduisit hélas au génocide rwandais 1994, dont le fait déclencheur fut l’assassinat simultané de deux présidents, ceux du Rwanda et du Burundi, par le tir d’un missile ayant abattu l’avion qui les transportait (un double assassinat unique dans l’histoire de l’humanité). Dans ce cadre, il ne faut d’ailleurs jamais oublier les propos de Boutros Boutros-Ghali, ancien secrétaire général égyptien de l’ONU (et paix à son âme), qui avait déclaré en 1998, deux ans après avoir quitté ses fonctions et quelques années seulement avant l’invasion de l’Iraq, que ce génocide « est à 100 % de la responsabilité américaine… Il est de la responsabilité de l’Amérique, aidée par l’Angleterre » (les États-Unis interdirent même à l’ONU d’utiliser le terme « génocide » pendant 23 longues journées et quelques centaines de milliers de morts après que la France l’ait utilisé pour la première fois, le 16 mai 1994, et ce, afin d’empêcher toute condamnation internationale des massacres, et par conséquent toute intervention militaire pouvant entraver la progression des tutsis anglophones venant de l’Ouganda…).
De plus, il convient de rappeler à ceux dont les connaissances de l’économie africaine sont fort limitées, que le Rwanda fait continuellement partie des dix pays africains les plus dépendants de la charité internationale. En effet, et selon les dernières données de la Banque mondiale, l’ensemble des aides publiques au développement (APD) reçues par le Rwanda en 2020 ont représenté non moins de 16,3 % du Revenu national brut du pays, qui occupait ainsi la neuvième place continentale, comme en 2019, en se classant entre la Gambie et le Niger. Ce qui n’empêche pas, pour autant, le dictateur et propagandiste Kagame de donner régulièrement des leçons en déclarant que le continent doit apprendre à compter sur ses propres moyens, et que celui-ci n’a pas besoin de « Baby-sitters ». Par ailleurs, il est également à noter que ces aides massives, et principalement anglo-saxonnes, n’ont nullement empêché la hausse constante de l’endettement du pays, dont la dette publique devrait connaître la cinquième plus forte hausse d’Afrique subsaharienne sur la période de trois années 2020-2022, selon le FMI (pour atteindre 68,1 % du PIB fin 2022, en hausse de 18,3 points de pourcentage).
Quant à la pauvreté, les inégalités sociales et le taux d’extrême pauvreté y demeurent encore très élevés, avec une importante partie de la population vivant avec moins de 2,15 dollars par jour en parité de pouvoir d’achat (nouveau seuil d’extrême pauvreté retenu par les institutions internationales, depuis la rentrée 2022). Ainsi, et selon les dernières données de la Banque mondiale, le taux d’extrême pauvreté atteignait non moins de 52 % de la population rwandaise en 2016, contre, par exemple, seulement 9,3 % pour le Sénégal en 2018. Il est d’ailleurs à noter que la réalisation d’études en la matière est assez difficile au Rwanda, qui s’était même distingué en 2005 en obligeant les agents de la Banque mondiale à détruire sur place l’intégralité de leurs études sur la pauvreté dans le pays. Un acte assez inhabituel au niveau international, mais qui n’a pourtant fait l’objet d’aucune protestation officielle de la part de cette grande institution, grâce à l’opposition des États-Unis.
Enfin, il convient de rappeler la nature terriblement criminelle du régime au pouvoir, seul régime de cette Afrique du 21e siècle dont le dirigeant continue à se faire élire avec 99% des voix, et champion du monde des assassinats politiques à l’extérieur des frontières nationales (ayant éliminé, à lui seul, plus d’opposants à l’étranger que l’ensemble des autres dictatures réunies de la planète). La diaspora rwandaise est ainsi la diaspora la plus surveillée au monde, vivant dans un climat de terreur permanent (comme en témoigne la parution d’un long article sur le sujet en octobre 2019, publié par le grand média canadien francophone Radio Canada et intitulé « Des espions parmi nous »).
L’hostilité des pays anglo-saxons à l’égard de l’immigration arabe
Par ailleurs, et contrairement à ce que prétendent certains, un passage à l’anglais n’ouvrirait nullement aux Marocains les portes des pays anglo-saxons, compte tenu de leur hostilité commune à l’égard de l’immigration arabe. Ainsi, les États-Unis avaient même interdit purement et simplement toute immigration en provenance d’un certain nombre de pays arabes sous la présidence de Donald Trump… Quant au Canada, il convient de savoir que sa partie anglophone ferme presque sa porte à l’immigration arabe, contrairement à la partie francophone du pays (le Québec essentiellement). En effet, et selon les dernières données publiées par Statistique Canada, relatives au recensement de 2021, les immigrants arabes n’ont représenté qu’un dixième (11,4 %) du total des immigrants permanents s’étant installés au Canada anglophone au cours de la période de cinq années 2016-2020, et encore présents à la date du recensement, contre un quart pour la partie francophone de la fédération (26,9 %).
Ainsi, et à titre d’exemple, le Québec a reçu, à lui seul, moitié plus de nouveaux résidents en provenance d’Algérie (13 975, malgré la pandémie) et autant de nouveaux résidents en provenance du Maroc (9 515) au cours de cette même période, que de nouveaux résidents égyptiens acceptés par l’ensemble du Canada anglophone (9 735). Et ce, alors que l’Égypte est de loin le pays arabe le plus peuplé, avec une population plus de deux fois supérieure à celle de l’Algérie, et près de trois fois plus importante que celle du Maroc…
Et pourtant, force est de constater que la partie francophone du Canada est régulièrement la partie la plus sûre du pays, avec un taux de criminalité largement inférieur au reste de la fédération. En effet, et toujours d’après les données de Statistique Canada, le taux de criminalité, qui prend en compte l’ensemble des infractions au Code criminel canadien (hors délits de la route), s’est établi à 3 207 infractions pour 100 mille habitants, contre non moins de 6 004 pour le Canada anglophone…
Le Canada francophone démontre ainsi au reste du monde que l‘immigration arabe ne menace pas forcément la sécurité, l’équilibre des comptes publics et le bien-être général de la société d’accueil, à laquelle elle peut, au contraire, être source de plus-value dès lors que certaines conditions sont respectées en amont et en aval. Cependant, le Canada anglophone et les États-Unis préfèrent marginaliser l’immigration arabe, et continuer à se concentrer sur l’Asie… tout comme le Royaume-Uni, qui se concentre à la fois sur cette partie du monde et sur l’Europe de l’Est, en n’accordant qu’une place très marginale à l’immigration arabe. La très faible taille de la population d’origine égyptienne, estimée à seulement 300 mille personnes (ou 0,3 million), alors que l’Égypte était une ancienne colonie britannique et qu’elle constitue, de loin, le pays arabe le plus peuplé, illustre parfaitement cette hostilité anglaise à l’égard de l’immigration arabe.
Le passage à l’Anglais, ou l’explosion du port du Niqab
Enfin, il est clair que l’adoption de l’Anglais au détriment du Français conduirait, lentement mais sûrement, à un rapprochement culturel entre le Maroc et les pays arabes anglophones du Moyen-Orient, au détriment des pays du Maghreb et d’Afrique de l’Ouest. Une réorientation culturelle qui se traduirait inévitablement par l’augmentation massive des comportements et accoutrements moyenâgeux (et souvent même pré-islamiques), notamment à travers l’explosion du port du Niqab.
Il convient d’ailleurs de rappeler que le monde francophone concentre la majorité des pays et territoires ayant décidé de mettre en place des interdictions totales (Tchad, Congo-Brazzaville, France, Belgique…) ou partielles (Tunisie, Algérie, Gabon, Québec…) pour ce qui concerne le port du Niqab, et ayant ainsi ouvert la voie à d’autres pays à travers le monde… à l’exception notable des pays anglophones, qui continuent ainsi à salir l’image de l’islam et des musulmans dans le monde.
À travers un alignement culturel progressif, lent mais certain, sur l’espace arabo- anglophone, l’image du Maroc à l’international serait ainsi considérablement ternie au bout de quelques années, et la société marocaine serait perçue par le reste du monde comme une société assez arriérée…
Bien réfléchir, avant de tomber dans le piège…
Nos frères francophones marocains qui demandent naïvement de remplacer la langue française par l’anglais, poussés ou manipulés par des entités locales et étrangères, devraient donc bien réfléchir aux graves conséquences à long terme que cela entraînerait pour leur pays, qui régresserait, lentement mais sûrement, au niveau des pays arabes anglophones.
Mais encore faut-il que les Marocains aient d’abord pleinement conscience des grandes réussites de leur pays, dont ils peuvent véritablement être fiers et qui n’a aucune leçon à recevoir en matière de dynamisme et de développement économique et social. Tout dénigrement ou toute dévalorisation de leur patrie ne peut que faire le jeu et servir les intérêts de certaines puissances étrangères, qui n’apporteraient que déclin et régression au pays.
Quant à ceux qui s’imaginent qu’il est tout à fait possible d’introduire partiellement la langue anglaise, aux côtés du français (par exemple pour l’enseignement de certaines matières scientifiques au collège ou au lycée), ceux-ci devraient se ressaisir et prendre conscience du fait que cela entraînerait, lentement mais sûrement, petit pas par petit pas, un remplacement total du français par l’anglais dans l’enseignement et dans les administrations du pays. Celui-ci deviendrait alors, purement et simplement, un pays arabe anglophone… avec, à la clé, une durable régression économique et sociale (l’écroulement total et dramatique du Liban, devenu anglophone après avoir naïvement pensé pouvoir être à la fois francophone et anglophone, en est une parfaite illustration…).
Ilyes Zouari
Président du CERMF (Centre d’étude et de réflexion sur le Monde francophone)
ww.cermf.org
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