Après plusieurs mois de négociations les membres de l’Union européenne sont parvenus en fin de semaine dernière à un accord sur un prix plafond pour les barils de pétrole russe livrés par voie maritime.
Objectif affiché : frapper durement la Russie dans le portefeuille là où les nombreux paquets de sanctions n’ont pas pu produire les effets escomptés par l’UE.
Bien intentionnés, disent les experts cités par le média d’État néerlandais NOS.
Mais ces derniers estiment que les dommages financiers pour la Russie seront limités dans la pratique.
« Le marché ne changera pas autant que ça », a estimé l’experte en énergie Lucia van Geuns du Centre d’études stratégiques de La Haye.
« Les millions de barils de pétrole que la Russie exporte chaque jour sur le marché mondial continuent de couler. »
Le plafonnement selon elle, des prix s’ajoute à un boycott du pétrole russe annoncé précédemment par l’UE. À partir de lundi 5 novembre, aucun cargo transportant des barils de pétrole russe ne sera théoriquement autorisé à entrer dans les ports de l’UE. Les autres pays [] devront respecter un prix maximum de 60 USD le baril.
La mesure devrait également rendre plus difficile pour les pays qui ne participent pas au plafonnement des prix d’acheter du pétrole russe. En effet, les plus grandes compagnies maritimes et assureurs de fret sont basés dans les pays occidentaux. Ces entreprises doivent également respecter le plafonnement des prix. Cela devrait sérieusement limiter la capacité de la Russie à faire sortir des barils de pétrole du pays.
Oui, cela devient plus difficile pour la Russie, mais certainement pas impossible, souligne Van Geuns. « Les flux et routes de pétrole ont changé depuis le début de la guerre. Le pétrole est mélangé en mer de sorte que son origine est difficile à retracer, les barils sont transférés d’un pétrolier à l’autre et les navires arborent un pavillon différent. » Avec ce genre d’astuces, le boycott européen et le plafonnement des prix peuvent être contournés.
« Si nous n’en voulons plus, ils l’enverront à quelqu’un d’autre », déclare l’analyste pétrolier Cyril Widdershoven à propos des exportations de pétrole russe. Il pense également que le boycott et le plafonnement des prix n’auront pas l’impact que les pays occidentaux prévoient. « Les navires peuvent simplement naviguer sous un pavillon différent et les gouvernements asiatiques sont prêts à prendre en charge l’assurance des navires », a déclaré Widdershoven.
De plus, selon les deux experts, le plafonnement des prix est trop élevé pour faire une différence sérieuse. Le pétrole de l’Oural que la Russie exporte s’est déjà vendu à peine plus que le prix maximum convenu. « L’Inde achète déjà du pétrole pour 65 dollars le baril. Le pétrole était déjà vendu à des prix inférieurs au prix du marché », explique Van Geuns.
« Nous n’avons pas encore de réservoirs vides », déclare Widdershoven. « Mais en janvier, début février, l’effet sera certainement là, notamment sur le prix du diesel. »
La réponse de la Russie
Dans une première réaction à l’accord de l’UE, la Russie a déclaré qu’elle n’acceptera pas le plafonnement des prix. Un porte-parole du Kremlin a indiqué que le contenu de l’accord est toujours en cours d’examen et qu’une riposte détaillée sera apportée ultérieurement. La Russie avait précédemment déclaré qu’elle ne fournirait pas de pétrole aux pays qui utilisent le plafonnement des prix.
Pour compliquer encore plus la situation des Européens et du G7, les pays exportateurs de pétrole et leur partenaire russe, engagés dans l’alliance Opep + réunis en visio-conférence ce dimanche pendant moins de 25 minutes, ont décidé de maintenir leurs quotas de production inchangés. la Russie et ses partenaires restent donc sur une production amputée de deux millions de barils par jour calculés sur la base du niveau de septembre, jusqu’à la fin de l’année, décision qui avait été prise lors de la dernière réunion, début octobre , et qui commence à peine à être appliquée.
Arrogance qui ne payent des occidentaux
Si l’OPEP+ a opté dimanche pour la prudence, l’alliance pourrait dans les mois à venir « adopter une position plus agressive », dans un avertissement à l’Occident qui hérisse le cartel en réglementant les prix, pronostique Edoardo Campanella, analyste d’UniCredit.
De quoi « aggraver la crise énergétique mondiale », avertit-il. Et susciter l’ire de Washington, dont les efforts diplomatiques auprès de Riyad pour faire baisser les prix ont échoué.
Gbansé Douadé Alexis, journaliste, avec NOS et AFP
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