La Côte d’ivoire doit être encouragée à améliorer la gestion des deniers publics, indispensable pour juguler la pauvreté et le dérapage de la dette souveraine.
L’exception accordée à certaines structures de régulation comme l’ARTCI, le Conseil du café-cacao ou le Conseil du Coton et de l’anacarde (…) pourrait cacher de graves irrégularités ou des contre-performances significatives.
Il est en effet difficilement compréhensible de constater que les seules entreprises officiellement déclarées au portefeuille de l’État soient les :
-Sociétés d’état (100% du Capital) ;
-Sociétés à participation financière publique majoritaire (plus de 50 % du capital) ;
-Sociétés à participation financière publique minoritaire (moins de 50 % du capital).
Bien que dotées de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, plusieurs personnes morales à incidence étatique sont exclues de la liste ci-dessus, et de celle des « Établissements publics nationaux (EPN) » (annexe 6). N’étant ni des « Institutions » (annexe 7), ni des « collectivités territoriales » (annexe 8), la priorité budgétaire due, ne leur est pas accordée.
Pourtant les annexes (10) et (14) sont respectivement accordées aux représentations de la Côte d’Ivoire à l’étranger ainsi qu’aux COGES (Comité de gestion des établissements scolaires publics) malgré le rattachement desdites entités respectivement au Ministère des affaires étrangères et à celui de l’éducation nationale.
Il est regrettable d’observer, bien que dotées de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, plusieurs personnes morales à incidence étatique, comme certaines structures de régulation évoquées ci-dessus, échappent encore à la rigueur comptable classique ainsi qu’à celle des contrôles budgétaires et des diagnostics habituels de performances.
Dénoncée depuis plusieurs exercices, la confusion induite par la classification de ces structures semble encourager ou protéger depuis de nombreuses années une certaine opacité relative à la gestion desdites structures. Peu d’entre elles pourraient sereinement attester en effet la diffusion régulière d’états financiers annuels. Curieux !
Or, celles-ci brassent des deniers importants et stratégiques pour le fonctionnement ainsi que pour la survie de l’État au sens large.
Il est donc incompréhensible d’observer que les structures évoquées jouissent tantôt d’une personnalité juridique distincte de celle de l’Etat ainsi que d’une autonomie financière propre, tantôt d’une personnalité juridique qui se fond de fait à celle de l’Etat ou d’une autonomie financière insuffisamment déterminée par rapport à la puissance publique.
Étrangement, certaines d’entre elles ne semblent pas encore être concernées par les audits annoncés ou effectués depuis quelques temps, sauf erreur.
Cette situation plutôt énigmatique pourrait encore prospérer si l’on continue à classer ces entités au rang de simples démembrements de l’administration centrale, en dépit de ce qu’elles soient soumises aux exigences de la personnalité juridique propre et à celles de l’autonomie financière dont elles jouissent légalement (Cf. Textes de création).
Le plus surprenant est, chaque année à l’examen de la « loi de règlement du budget de l’État » exécuté, et à l’analyse du « projet de loi de finances portant budget de l’État pour l’année suivante », l’on constate avec étonnement l’absence d’informations économiques et financières concernant ces entités pourtant hautement stratégiques. Insolite !
Tout se passe comme si, ni les Parlementaires de la République de Côte d’Ivoire, ni les populations elles-mêmes, n’avaient pas un droit de regard concernant la situation financière des structures concernées. La même question est posée chaque année : Comment s’assure-t-on de la bonne tenue des engagements des entités publiques évoquées ?
Simple oubli, ou volonté de soustraire du regard des Parlementaires et de celui des populations ivoiriennes l’information concernant les structures de régulation ou les entités concernées ? La question ne peut être évitée.
Surtout pas au moment, où, la date d’examen du budget de l’État pour l’exercice 2023 approche dans un contexte particulier où les audits diligentés précédemment par l’Exécutif ont révélé plusieurs faiblesses dans la gestion de certaines entités liées à l’État, bénéficiant, tout comme celles incriminées, de l’autonomie financière et de la personnalité juridique propre.
La dette abyssale, douteuse et litigieuse de plus de mille cinq cent (1500) milliards de francs CFA attribuée par la presse à CI-ENERGIES (dixit _ Jeune-Afrique du 03 août 2022) est un fait non anodin qui ne peut laisser quiconque indifférent ; moins encore, la sulfureuse affaire du FER accusé d’être en cessation de paiement comme d’autres entreprises publiques:
« Plusieurs entreprises publiques sont en effet victimes d’une dette abyssale, à l’instar du Fonds d’entretien routier (FER) – qui ne parvient plus à payer ses prestataires – ou de Côte d’Ivoire ÉNERGIES, laquelle cumule une dette de plus de mille cinq cents (1500) milliards de francs CFA », titrait Jeune-Afrique le 03 août dernier.
Les structures ci-après (liste non exhaustive) mériteraient aussi, à l’instar de «l’ANNEXE 9 » consacrée à la situation économique et financière des « entreprises du portefeuille de l’État », qu’une « annexe spécifique » et «pertinente» leur soit consacrée:
· Conseil Café-cacao (article 18 de l’Ordonnance n°2011-481 du 28 décembre 2011),
· Conseil Coton-anacarde (article 22 de la loi n°2013-656 du 13 septembre 2013),
· Conseil Hévéa-Palmier à huile (article 23 de la Loi n°2017-540 du 03 Août 2017),
· Autorité de régulation des télécommunications /TIC de Côte d’Ivoire (ARTCI), (article 71 de l’Ordonnance n°2012-293 du 21 mars 2012)
· Etc., …
La rigueur budgétaire annoncée par l’État concernant la gestion des deniers publics est à saluer et à encourager. C’est pourquoi il doit être aussi exigé d’étendre l’exercice de cette rigueur à la transparence financière dans chaque structure de régulation créée, notamment celles qui jouissent de l’autonomie financière et de la personnalité juridique propre.
La classification respective de certaines entités étatiques hors du groupe des sociétés d’état ou des sociétés à participation financière publique, n’est pas un argument suffisant et pertinent pour les soustraire du regard direct du Parlement ou de celui des populations dès lors qu’elles jouissent de l’autonomie financière et de la personnalité juridique propre.
Enfin, face au vide juridique dangereux sciemment entretenu, à défaut de créer un droit spécifique les concernant, il serait simple, pertinent et plus gratifiant d’assimiler toute entité à incidence étatique jouissant d’une personnalité juridique propre et d’une autonomie financière, aux structures soumises à l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (GIE).
En conséquence, il serait désormais simple, pertinent et responsable d’exiger la tenue d’une comptabilité, présentant chaque année à bonne date, la situation patrimoniale et la gestion de chaque structure à incidence étatique, conformément à l’acte uniforme évoqué précédemment.
C’est une fois de plus, une contribution à la bonne marche de notre État si cher à tous.
Sénateur Jean-Baptiste PANY
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