A Attécoubé comme à Adjamé, la flambée des coûts du loyer est une réalité déplorée au quotidien. « J’habite un deux pièces, c’est-à-dire une chambre et un salon dans une cour commune à Attécoubé. Tout récemment le propriétaire y a fait quelques aménagements et a fixé du coup, le loyer à 40 000 francs. Aucun des locataires n’a pu se plaindre car il disait que des gens sont prêts à prendre (les logements) si nous ne pouvons pas payer ce nouveau montant », explique Edouard, ouvrier dans une usine de la zone industrielle de Yopougon.
« Mon ami habite un appartement de deux pièces dans un immeuble à Adjamé qu’il louait à 50 000 francs. Et sans même lui donner un délai, le bailleur qui gère l’immeuble lui a dit que les mois qui suivent, il devra payer désormais 60 000 francs comme loyer. Cela a été appliqué aux autres locataires » confie notre interlocuteur.
Hamed loue un petit magasin à Adjamé qui lui sert de dépôt pour ses marchandises à 20 000 francs par mois. A sa grande surprise, le propriétaire lui a dit que le loyer passait à 30 000 francs. Et pour cause, un autre commerçant a proposé 30 000 francs et deux millions de francs comme caution et avance. Sentant la menace d’expulsion, s’il refusait ce changement inattendu, Hamed a dû accepter le nouveau prix du loyer.
Quant aux nouvelles constructions, leur loyer est encore plus élevé, que ce soit au niveau des maisons d’habitation ou des magasins. « Les studios sont loués à 80 000 francs. Pour les appartements de trois pièces, il faut 120 000 francs. Souvent on demande un an de caution et avance », confie Salif commerçant à Adjamé. Il ajoute que les magasins qu’on pouvait avoir à 50 000 francs par mois, sont aujourd’hui à 100 000 francs le mois, souvent à 150 000 francs pour ceux qui sont surtout situés non loin de la grande mosquée d’Adjamé.
Treichville Marcory et Koumassi et même Cocody n’échappent pas à cette flambée des coûts du loyer constatée dans bien d’autres communes de la capitale économique ivoirienne. « Treichville est un centre commercial. C’est une commune que tout le monde veut habiter. Car c’est proche du Plateau, le centre des affaires. Y étant, on a l’accès facile aux autres communes. Ce qui fait qu’à Treichville, les maisons coûtent cher. Surtout les nouvelles constructions », indique Patrice habitant de la commune. Il y travaille également. Il montre un immeuble en face sur l’avenue 21. Il confie que le propriétaire a fixé le studio à 175 000 francs. Et s’agissant de la caution et de l’avance, il faut un an. « C’est tellement cher que l’immeuble est à moitié vide », ajoute-il.
Mamadou Fofana vendeur, vit à Divo un sous-quartier de la commune de Koumassi. « Ici, il n’y a plus de maison de 8 000 francs. Une chambre dans une cour commune, c’est au moins à 12 000 francs ou 13 000 francs qu’on vous la loue. Et certains propriétaires demandent 5 mois de caution et 2 mois d’avance », fait-il savoir.
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Au Remblais un autre quartier de la commune de Koumassi, où l’on trouve un plus grand nombre d’immeubles, on affiche 2 pièces à 120 000 francs ou même 150 000 francs avec au moins 6 mois de caution et d’avance sur le loyer. Pour 3 pièces il faut compter 200 000 F et plus de 1 million de francs de caution et d’avance.
Sous-location et bail
Des personnes rencontrées ont décrié la pratique de la sous-location qui, selon elles est l’une des principales causes de l’augmentation du coût du loyer à Abidjan. « C’est un véritable problème à Adjamé. Surtout au Black market ici », confie un commerçant de ce marché d’Adjamé. En effet, explique-t-il, lorsqu’une personne loue un magasin à 50 000 francs avec une caution de 10 millions de francs, quand il libère le magasin, il le loue à une autre personne à 75 000 francs. Il demande 15 millions de francs de caution. Et continue de verser 50 000 francs au propriétaire du magasin. Des personnes plus nanties déposent la caution de plusieurs magasins et les sous-louent à d’autres commerçants. Ainsi vous avez des magasins qui vous reviennent facilement à 100 000 francs avec autour de 20 millions de francs de caution. Et le propriétaire lui, il continue de percevoir le prix qu’il a fixé au départ. Selon ce commerçant c’est une mafia qui se sucre sur le dos des propriétaires de maison. Aliman, vendeuse de divers articles, frustrée par cette situation, accuse les hommes d’affaires d’origine nigérienne et nigériane d’être à la base de cette pratique. « Cela fait qu’il est très difficile de louer un magasin à Adjamé », poursuit un autre.
Une autre forme de sous-location qui serait à l’origine de l’augmentation du loyer est la pratique de ce qui est appelé communément le bail. Une personne appelé bailleur signe un contrat avec le propriétaire d’un terrain à l’effet d’y bâtir un immeuble. Une fois la construction terminée, c’est ce bailleur qui fixe le coût du loyer sur un certain nombre d’années. « Il veut vite rentrer dans ses fonds, donc il augmente le loyer », explique Patrice. Et même quand le contrat du bailleur prend fin, le loyer reste élevé. A cela, il faut ajouter la part des démarcheurs qui se font appeler promoteurs immobiliers et qui exigent souvent un mois de loyer.
Hausse des prix des matériaux de construction
Une autre raison à la hausse du prix du loyer, c’est le coût en constante augmentation des matériaux de construction. « L’Etat doit se pencher sur cette situation », souhaite Bashiru peintre en bâtiment. Il explique que le pot de peinture qu’il achetait à 17 000 francs il y a deux ans de cela, est aujourd’hui vendu à 25 000 francs. Même la main d’œuvre est devenue chère. Avant, il payait les ouvriers à 6 000 francs la journée. Mais aujourd’hui, ils demandent 8 000 francs pour une journée de travail. Il ajoute que même les manœuvres réclament au moins 5 000 francs par jour. La construction d’un bâtiment revient ainsi cher. Du coup, le loyer subit à son tour une augmentation. Il souhaite que l’Etat baisse les taxes pour que les industriels diminuent à leur tour le prix des matériaux. « Si cela était fait, alors, peut-être la population pourrait raisonnablement se plaindre, si les loyers continuaient d’augmenter », affirme-t-il.
Il faut rappeler que face aux nombreuses plaintes des populations contre l’augmentation du loyer et du nombre non autorisé de mois de caution et d’avance sur le loyer à payer, le gouvernement avait pris des dispositions. Un nouveau contrat de bail à usage d’habitation a été officiellement lancé par le ministre de la construction du logement et de l’urbanisme le 21 janvier 2021. Ce contrat qui régit les rapports entre propriétaires de maison et locataires, exige deux mois de caution et deux mois d’avance, sur le loyer. Ce que la grande majorité des propriétaires ne respectent pas. Un numéro vert (1378) a tout récemment été communiqué pour dénoncer les contrevenants aux dispositions ainsi prises par les pouvoirs publics.
Diomandé Karamoko
Lebanco.net
Les coûts de location des maisons grimpent, grimpent sans arrêt à Abidjan
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Trouver un logement décent avec un loyer raisonnable en Côte d’Ivoire en général, singulièrement à Abidjan ces temps-ci n’est pas chose aisée. Non pas à cause d’un manque total de maisons, mais plutôt par ce que les loyers sont élevés. De fait, les prix ont flambé ces derniers temps. Les augmentations ont atteint dans certains cas, des proportions inimaginables.
Souleymane Kouadio, qui tient une cabine téléphonique au Plateau Dokui dans la commune d’Abobo indique que dans ce quartier, le loyer d’une maison de 2 pièces est de 100 000 FCFA au minimum. Alors qu’il y a quelques temps, on pouvait louer les maisons du même standing à 70 000 F CFA. « Si on vous propose actuellement une maison de 2 pièces à moins de 100 000 F CFA au Plateau Dokui, soit elle est située aux confins du quartier, soit elle est dans un état qui laisse à désirer », explique le gérant de cabine téléphonique. C’est d’ailleurs dans une maison de ce type qu’il loge, dans le même quartier. Seulement, le loyer s’élève à 80 000 FCFA, parce que certains de ses amis avec qui il partage le local, y sont depuis plus de 10 ans. En revanche, leur voisin, qui occupe une maison du même type qu’eux, paie un loyer de 100 000 FCFA parce qu’il y a aménagé après eux. Le jeune homme dit avoir constaté que le propriétaire augmente systématiquement le loyer, dès qu’un nouveau locataire vient occuper une maison. Alors même qu’il n’y effectue pas d’importants travaux. Aux cours des échanges, notre interlocuteur remet le contact d’un agent immobilier, couvrant la zone de Plateau Dokui et Mahou. Joint au téléphone, Zerbo l’agent immobilier ne cache pas que les loyers des maisons de la zone géographique dépendant de ses compétences, sont élevés. Ses propos sont corroborés par le cas d’une habitation de 2 pièces, localisée dans la périphérie d’Abobo Azur, non loin du carrefour Cocotiers. Elle est mise en location à 120 000 FCFA. En plus, celui qui veut louer la maison devra verser l’équivalent de 6 mois de loyer, au titre du bail à usage d’habitation. A savoir 3 mois de caution, 2 mois d’avance et un mois pour l’agence. Une condition d’accès à l’habitation, tout à fait contraire à celle décidée par la loi. Qui exige plutôt du locataire, deux mois de caution et deux mois de loyer. Ce loyer n’est en rien comparable à celui qui nous a été communiqué par Samaké, agent immobilier, agissant pour le compte d’une agence localisée à Yopougon Sopim, non loin de la station Shell. « On nous a demandé de mettre en location une maison de 3 pièces à 300 000 FCFA. Elle est située à Yopougon dans les environs du complexe sportif Jessie Jackson », nous confie à notre grand étonnement ce dernier. Une habitation du même standing, est mise en location au même coût par ladite agence. Mais cette fois, il s’agit d’une maison se trouvant à Adjamé précisément à la Cité Fairmont. Pour ces 2 maisons citées, il est demandé 2 mois de caution, 2 mois d’avance et un mois pour l’agence. C’est probablement à cause du loyer élevé que les propriétaires de ces maisons ont respecté la législation en vigueur en la matière. A savoir 2 mois de caution et 2 mois d’avance, pour la location d’une maison. Malheureusement, dans bon nombre de cas, les propriétaires violent cette disposition légale, qui a pourtant été prise, en vue de faciliter aux populations, l’accès au logement. Tant il est vrai que, ces nombreux mois exigés aux locataires, ont toujours constitué un réel frein à ceux-ci, dans leur quête de maison à louer. Un cas avéré a été vérifié auprès d’un dénommé Papa Israël. Il démarche pour la recherche et la location de maisons dans la même commune de Yopougon. Son siège est situé au bureau du marché du Nouveau quartier. Il annonce au cours d’une conversation téléphonique le lundi 22 août 2022, qu’il dispose d’une maison de 3 pièces, située au terminus 40, non loin de Saguidiba. Sauf que pour la location, il faut s’acquitter de 7 mois de loyer. A savoir 3 mois de caution, 3 mois d’avance et bien évidemment un mois pour l’agent immobilier. Au total, c’est la somme 840 000 F CFA, que toute personne intéressée par cette maison, devra préalablement débourser, pour espérer se voir remettre les clés.
Le constat est là : l’augmentation effrénée des loyers a gagné l’ensemble des communes du district d’Abidjan. La commune d’Abobo tant rechignée par des personnes, n’échappe plus à cette réalité. Les coûts de location des maisons y ont aussi pris l’ascenseur. Le loyer de la maison de 3 pièces qu’occupe Odouffan Amandé, maçon résidant au quartier Akeikoi-extension d’Abobo et sa famille, pourrait passer de 30.000 F à 80. 000 F CFA. Soit plus du double. « C’est l’information que la gérante nous a donnée », indique le maçon. Aux dernières nouvelles ajoute-il, « l’on a appris qu’elle envisage de rencontrer les locataires des différentes maisons, pour échanger sur la révision à la hausse, du loyer ». En tout état de cause, le maçon dit ne pas avoir les reins assez solides, pour payer un loyer supérieur à 30 000 F CFA. Et comme le dit un dicton populaire « A quelque chose malheur est bon ». Odouffan Amandé s’est pour cette raison , employé à reprendre les travaux de construction de sa maison. Il avait commencé à la bâtir il y a quelques années sur un lot situé dans le même quartier. C’est d’ailleurs avec enthousiasme qu’il va régulièrement sur le chantier pour effectuer les travaux.
De nouvelles augmentations attendues ?
Bien qu’étant un agent immobilier à Akeikoi-extension, Marius avoue que les loyers ont exagérément augmenté ces derniers temps. L’homme, qui a laissé la coiffure au profit de l’immobilier, en veut pour preuve que le loyer minimum pour les maisons de 3 pièces dans le quartier est au bas-mot à 100 000 FCFA. Il peut évoluer jusqu’à 130 000 F CFA dans certains cas. Alors que par le passé, il oscillait entre 45 et 50 000 F CFA. Dorénavant, ce sont les maisons de 2 pièces qui sont louées à partir de 45 000 FCFA à Akeikoi-extension. Ces tarifs sont aussi appliqués au quartier Djibi, qui se trouve pourtant à plus de 3 kilomètres d’Akeikoi-extension. Marius craint que l’augmentation récente de la prime de logement des fonctionnaires par le Chef de l’Etat n’ouvre la porte à de nouvelles hausses du coût des loyers.
De l’avis de Malick Sangaré, en fonction au service communication du ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, les augmentations de loyers s’expliquent par la loi de l’offre et la demande. « Plus il y a de demandeurs, alors que l’offre est moindre, les prix vont grimper ». Vraisemblablement, l’offre est en deçà des besoins parce que selon cet agent du ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, « le déficit de logements en Côte d’Ivoire s’élève à environ 600 000 unités par an ». Pour combler le gap, des projets sont en cours dans ce sens, indique notre interlocuteur. A l’en croire, c’est principalement ce que l’Etat peut faire, hormis l’application du contrat de location de maison. Sinon selon Malick Sangaré « l’usager n’a pas de voies de recours, puisqu’aucune loi n’existe pour encadrer la fixation des coûts du loyer. Ce que l’Etat a fait, c’est d’instaurer un contrat de bail à usage d’habitation. Il limite le nombre de mois de caution et d’avance à 2 fois deux mois ». Sans plus.
Junior Jeremy
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