Avant toute chose, nous nous devons de nous interroger sur l’admiration et la confiance grandissante que nombreux Etats africains ont pour un pays qui n’est pas fondé sur le droit. La Russie incarne tout simplement la violence d’Etat. Sa continuité impériale qui est la marque d’une culture politique, n’est pas à négliger. L’idéologie anticapitaliste qui continue encore d’innerver ce pays se transmet à bon nombre d’africains et en particulier à des pays où certaines juntes militaires semblent vouloir s’installer de façon durable.
Bien évidemment, loin de moi l’idée d’évoquer ici le concept de démocratie qui irrite, tout aussi bien nos leaders d’opinion, dirigeants africains que la Russie. Par principe, nos panafricanistes, russophiles sont plus sensibles au modèle autocratique que prône V. Poutine. Rien de surprenant que nos activistes, continentaux, sur les réseaux sociaux s’adonnent au quotidien à l’apologie d’une telle dérive sociétale. Tout est prétexte ; même l’arrestation d’un contingent NSE (National support Elément, expulsion d’un porte-parole de la Mission de l’ONU MINUSMA, pour justifier leur rapprochement à Poutine.
Pour peu que nous fassions une introspection, une remontée dans l’histoire de nos indépendances, on constatera sans conteste des réussites différenciées et disparates sur le continent. Nos Etats d’Afrique peuvent être considérés comme des pays stationnaires qui connaissent une croissance économique non accompagnée de changements en profondeur de nos économies. Nos Etats font le choix depuis des décennies, de clamer à tout bout de champ, que nous possédons des richesses, des ressources naturelles. Que ne l’exploitons-nous, par la force de leurs poignées ? A l’instar des européens descendant dans les profondeurs de leurs mines pour en extraire, extirper même à flans de montagnes les maigres ressources utiles à leur bien être. Plutôt que de chercher les responsables de notre sous-développement (les firmes multinationales, les occidentaux, ou mieux encore la France).
Nous devons savoir que l’amorce de notre développement ne démarrera qu’avec notre autosuffisance alimentaire. Le choix de nos cultures de rente traduit la continuité d’un esclavage dans lequel nous nous complaisons et consentons à nous inscrire de plein gré.
Au début de nos indépendances, la Chine n’était guère mieux dotée que nombreux pays africains, hormis, son potentiel humain. La stratégie de développement autocentrée que la Chine a dû appliquer, devrait nous inspirer. Dans son principe, cette stratégie repose sur un développement interne, endogène, avec des « industries industrialisantes ». Nos Etats se doivent de privilégier l’implantation des industries valorisant nos ressources naturelles et qui induiront en aval d’autres industries.
Le conflit en Ukraine a pour mérite de nous éclairer sur le plan économique et géostratégique. Notre dépendance à l’occident n’et que davantage avérée. Hélas ! La flexion genouillère de Macky Sall (au nom de l’Union Africaine) pour négocier notre sécurité alimentaire ; obtenir du blé russe et ukrainien démontre l’extrême fragilité de notre continent décrit comme celui de l’avenir du monde. La Chine a-t-elle attendu qu’on la décrète comme étant l’usine du monde ? C’est son travail qui l’y a consacrée. Ainsi elle a acquis tout naturellement une dignité qui la positionne à la table des grands. En Afrique quelle dignité revendiquons-nous ? Peut-être celle de nos empires révolus.
A présent, il est temps de nous débarrasser de nos complexes. Pour justifier nos infortunes, nous devons arrêter d’opposer les morts et victimes de différentes guerres, de luttes et autres conflits. Il est sans aucun doute légitime de commémorer nos disparus. Mais, sortons de ces comptes d’apothicaire que nous perpétuons. Nos impératifs sont ailleurs. Notre cap aujourd’hui et demain doit être celui de notre développement. Attelons nous au travail, définissons nos stratégies de développement. Produisons pour nous nourrir, transformons nos ressources naturelles (Or, bauxite, Uranium, cobalt…). C’est bien d’abord à la force de nos poignées que nous devons extraire nos richesses, quitte à faire abstraction de Firmes Multinationales tant décriées qui ne sont pas pour nous épanouir.
A partir de ces constats non exhaustifs, nous suggérons à nos Etats de renégocier leurs accords de coopération bilatéraux et multinationaux.
Professeur Laciss Abdou
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