A travers cette déclaration, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » souhaite attirer l’attention du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique sur un sujet qui alimente d’incessants débats passionnés. La question des volumes horaires des enseignants-chercheurs est un sujet de préoccupation dans les établissements d’enseignement supérieur publics de Côte d’Ivoire. Si les heures dues sont connues et statutaires, les heures complémentaires, communément appelées HC, restent une préoccupation permanente. Elles sont au cœur de nombreuses polémiques enflammées entre enseignants-chercheurs au sein de certains départements ou font l’objet de pratiques peu honorables ou recommandables de la part de certains responsables académiques qui leur permettent de gagner de l’argent sur le dos des uns et des autres.
A l’université Alassane Ouattara, pour contrer l’inflation galopante des heures complémentaires dans les unités d’enseignement à petit effectif d’enseignants-chercheurs alors que les unités d’enseignement à gros effectif n’en avaient pratiquement pas, une mutualisation des volumes horaires d’heures complémentaires a été instaurée par les autorités académiques. Cette mutualisation permet d’affecter les heures complémentaires des uns aux autres pour compenser les déficits et, l’harmonisation est effectuée en fonction des grades au sein des départements. Malgré l’existence de cette mesure d’équité et de solidarité, la clé de répartition fait toujours l’objet de vives polémiques et une absence de transparence est souvent décriée.
A l’université Félix Houphouët-Boigny, en revanche, les heures complémentaires n’ont pas été traitées dans un contexte de mutualisation. Elles sont restées la propriété des unités d’enseignement qui décident, seules et en interne, de la clé de répartition qui leur convient. La polémique, dans cette université, a été créée par la présidence quelque peu acrimonieuse (sous le professeur Abou Karamoko) qui, pour avilir les enseignants, a décidé d’autorité d’instaurer unilatéralement un taux de rémunération et de ne pas respecter le bréviaire ou vade-mecum mis en place depuis les présidents Ohouo Assepo, Téa Gokou, Aké N’gbo et Bakayoko-Ly Ramata. Le même arbitraire règne à l’université Péléforo Gon Coulibaly.
Dans la gestion de ces heures complémentaires, en plus de l’opacité qui l’entoure parfois, des abus sont constatés au niveau de certains responsables de filières ou d’unités de formation et de recherche (UFR) qui se livrent à des ponctions arbitraires sur les heures de service complémentaires et sur les rémunérations des enseignants-chercheurs. C’est le cas dans certaines UFR de l’université Alassane Ouattara, où des plaintes reviennent avec récurrence en termes d’exemple. Certains responsables académiques avaient même trouvé l’ingénieuse astuce de laisser courir les inscriptions d’étudiants jusqu’après les examens de fin d’année afin de s’offrir une bonne partie des heures complémentaires des enseignants-chercheurs sur la base d’une double comptabilité. Un premier calcul est fait qui tient compte des étudiants effectivement inscrits tandis qu’un second calcul plus opaque prend en compte les inscriptions qui surviennent après mais toujours au titre de l’année achevée. Pour le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire », ce mode d’approche aux apparences rationnelles et innocentes qui est, en fait, un désordre savamment entretenu dans la gestion des heures complémentaires et qui, certainement, profite à quelques-uns devrait prendre fin avec les nouvelles autorités académiques.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » demande au ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique de vérifier le statut de tous les bénéficiaires de ces heures afin d’éviter qu’en soient bénéficiaires des personnes qui n’en ont pas droit ou qui ne figurent pas sur la liste des enseignants-chercheurs reconnus dans le personnel. De tels abus ont existé par le passé. Pour plus de lisibilité et une meilleure maîtrise des flux financiers, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » demande aussi un audit de la gestion des heures complémentaires de ces cinq ou dix dernières années dans les établissements d’enseignement supérieur publics de Côte d’Ivoire. Pour une gestion plus rationnelle des heures du personnel, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » recommande également le recours, par les universités, à des logiciels tels que « helico », « Geisha » ou autres qui sont des logiciels de gestion des états de service des agents et chargés d’enseignement et qui permettent de gérer les heures complémentaires des personnels universitaires et les vacations d’enseignement. Ailleurs, dans les universités françaises, par exemple, ces logiciels sont d’usage.
Pour une meilleure maîtrise de la population estudiantine, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » demande aux administrations universitaires de circonscrire les inscriptions dans un temps et de faire respecter la règlementation en vigueur, même si des accords obtenus avec des syndicats d’étudiants expliquent le laxisme apparent. Dans la pratique, il est constaté que les cours sont débutés alors que les procès-verbaux de délibérations ne sont pas disponibles, alors que de nombreux étudiants ne sont pas inscrits et que les groupes de travaux dirigés ou de travaux pratiques ne sont pas constitués.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » demande aussi que des efforts soient faits pour faire coïncider le paiement des bourses avec la période des inscriptions pour rendre moins laborieuse la recherche de moyens pour les étudiants boursiers. Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » demande également qu’un contrôle a priori et a posteriori de l’exécution des heures de service des enseignants-chercheurs soit effectué pour s’assurer de leur traçabilité par enseignant-chercheur. Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » demande, enfin, que prenne fin l’arbitraire dans la fixation des taux de rémunération des heures complémentaires et que le vade-mecum en vigueur depuis les années 90 dans les universités publiques de Côte d’Ivoire soit respecté par toutes les universités. L’existence de taux de rémunération différents pour les mêmes services d’enseignement, tous payés par le trésor public, montre qu’il y a problème et, cela devrait, en toute logique, interpeller la tutelle. Pourquoi certaines universités, alors qu’elles l’ont observé pendant de nombreuses années, ont-elles subitement décidé d’opter pour autre chose, en l’occurrence, les universités Félix Houphouët-Boigny et Péléforo Gon Coulibaly ? La fixation du taux de rémunération des heures complémentaires relève-t-elle des compétences des présidents d’université et de leurs conseils ?
Comme indiqué subrepticement, le problème des heures complémentaires ne se situe pas au niveau de leur opportunité dont l’existence permet aux universités publiques de respecter leurs engagements de service vis-à-vis de l’Etat et des étudiants. Le phénomène des heures complémentaires n’est pas non plus une spécificité ivoirienne. Les enseignants de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, au Sénégal, bénéficient d’heures complémentaires mais cette université figure régulièrement parmi les 200 meilleures universités africaines (33e en 2021 et 37e en 2021) et est la première incontestée des universités d’Afrique francophone. Les heures complémentaires existent aussi dans le système universitaire français mais encadrées par un décret pris en 1983 et des arrêtés ministériels depuis 1989, avec une hausse constante de leur taux de rémunération qui tient compte du coût de la vie et de l’accroissement de la charge enseignante. La dernière majoration de ce taux date de 2017 après celles de 2016, 2010, 2009 et 2008. En Côte d’Ivoire, la rémunération complémentaire des enseignants-chercheurs n’a jusque-là fait l’objet d’aucun décret ni d’arrêté. C’est un vade-mecum adopté depuis 1999 mais maltraité par certains présidents d’université acrimonieux qui sert de bréviaire. Pourtant, des discussions ont été menées pour couvrir les choses du cadre règlementaire et éviter les abus de certains présidents d’université qui donnent l’impression d’être plus puissants que le ministre qui a proposé leur nomination en conseil des ministres.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » se demande où l’on en est avec le projet de décret portant revalorisation des salaires, primes, indemnités et avantages de toutes natures reconnus aux enseignants et aux chercheurs en fonction et à la retraite qui a été discuté au sein d’une cellule technique mise en place en juillet 2018 par la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, madame Ly-Ramata Bakayoko, et censée rendre ses résultats après deux semaines de travaux ?
Qu’a-t-on fait des résultats de l’atelier qui s’est tenu le jeudi 14 mars 2019 au pôle scientifique et d’innovation de l’Université Félix Houphouët-Boigny (Bingerville) sur les Heures Complémentaires (HC) et d’encadrement dans les établissements publics d’enseignement supérieur de Côte d’Ivoire sous la présidence de Dr. Albert Mabri Toikeusse Abdallah, Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique ?
A chaque fois, pourtant, il est noté, dans les rapports, que le consensus a prévalu et relevé les recommandations retenues sous réserve de leurs confirmations par un décret en conseil des ministres. Pourquoi le politique de la locomotive de l’UEMOA préfère-t-il toujours organiser, d’un nouveau ministre à un autre du même département, des séminaires coûteux et des réunions, elles aussi, coûteuses autour des préoccupations qui ont déjà fait l’objet de consensus des années auparavant et qui étaient en attente de décisions (décret ou arrêté) ?
Et pourtant, cette ruse administrative et politique qui permet de botter en touche et de gagner du temps pour retarder l’échéance de la prise de décisions à laquelle participent certaines organisations syndicales et qu’affectionnent tant les gouvernements africains n’est rentable que dans le court terme. Avec le temps, les dossiers s’entassent sur la table des ministres et l’Etat se trouve face à de nouvelles réalités financières liées à l’accroissement, d’année en année, de la charge enseignante devant la problématique irrésolue du ratio d’encadrement.
Il est temps, pour le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, de revoir la gouvernance sur cette question des heures complémentaires et bien d’autres dans les universités publiques. La mise en place des nouvelles équipes académiques est un contexte favorable pour engager les réformes attendues et sortir de la bureaucratisation qui politise la science et s’accompagne d’un manque d’efficacité et d’innovation managériale. A terme, il serait judicieux de revenir aux élections, assorties d’orientations stratégiques académiques et de positionnement des universités ivoiriennes dans un contexte international dominé par une forte compétition entre universités africaines. Les universités publiques ivoiriennes doivent concilier leur mission de service public avec les exigences d’excellence et de rayonnement international relativement au marché africain de l’enseignement supérieur.
Fait à Abidjan, le 17 mai 2022.
Pour « Les Démocrates de Côte d’Ivoire ».
Le Président
Pr. Séraphin Prao
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