La junte militaire au pouvoir en Guinée ne veut plus rien entendre de la Cedeao et a décidé de fixer sa période de transition à 39 mois, soit 3 ans et 3 mois.
La Cedeao demandait, on ne sait trop pour quelles raisons, à la junte « d’organiser sans tarder » des élections afin de rendre le pouvoir aux civils.
Les militaires avait renversé le président Alpha Condé en septembre 2021. Ce dernier avait violé la constitution du pays en se faisant élire pour un 3e mandat, sans que la Cedeao ne bronche. (Hervé Coulibaly)
En Guinée, les putschistes fixent la transition à « 39 mois »
Le Monde avec AFP
C’est un camouflet pour les voisins de la Guinée. Le chef de la junte militaire à Conakry a annoncé, samedi 30 avril, avoir opté pour une durée de transition « de 39 mois » , défiant ainsi les partenaires régionaux du pays qui demandent un délai bien plus court.
Cela reporte d’éventuelles élections à 2025.
« De toutes les consultations engagées à tous les niveaux (…), il ressort une proposition médiane d’une durée consensuelle de la transition de 39 mois », a déclaré le colonel Mamady Doumbouya dans une adresse télévisée à la Nation.
L’officier, qui a renversé le président Alpha Condé en septembre et s’est fait proclamer chef de l’Etat depuis lors, a tenu ces propos après la clôture, vendredi, de deux consultations politiques contestées – une conférence dite de réconciliation et « un cadre de concertation inclusif » – toutes deux boudées par un grand nombre de partis politiques.
« Le CNRD [Comité national du rassemblement et du développement, l’organe dirigeant de la junte] et le gouvernement à leur tour soumettront au CNT [Conseil national de transition], qui tient lieu de Parlement, cette proposition qui est consécutive à de larges et patientes consultations », a déclaré le colonel-président.
Fin mars, s’impatientant devant leur refus manifeste d’annoncer une date pour des élections destinées à rendre le pouvoir aux civils, la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) avait sommé les autorités de Conakry de lui présenter « au plus tard le 25 avril » un calendrier de transition « acceptable », sous peine d’une extension des sanctions économiques décidées contre le pays après le coup d’Etat.
Mais la junte a laissé passer le délai et demandé à « avoir davantage de temps par rapport à l’échéance du 25 avril », afin de « permettre la poursuite des consultations », selon un communiqué de la Cédéao publié mercredi.
Violente attaque contre la Cédéao
En septembre, après le putsch à Conakry, les chefs d’Etat de la Cédéao avaient « insisté pour que la transition soit très courte », et que des élections soient organisées dans un délai ne dépassant pas « six mois ».
En clôturant le « cadre de concertation inclusif », le ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation, Mory Condé, avait déclaré vendredi que l’« ensemble des acteurs » ayant accepté d’y participer avaient « proposé des durées allant de 18 à 52 mois » pour la transition, sans préciser à partir de quelle date.
Comme au Mali ou au Burkina Faso, deux autres pays de la région où les militaires ont pris le pouvoir, la junte guinéenne semble faire peu de cas des exigences de la Cédéao.
Mardi, au lendemain de l’expiration de l’ultimatum de l’organisation régionale, le porte-parole du gouvernement mis en place par la junte, Ousmane Gaoual Diallo, s’était livré à une violente attaque contre la Cédéao.
« On n’a pas transmis un document [sur le calendrier de la transition à la Cédéao] et nous étions clairs là-dessus depuis le début que le gouvernement guinéen n’agit pas sous des contraintes ou sous le diktat de qui que ce soit », avait-il dit, n’excluant pas que la Guinée se retire de la Cédéao.
La Cédéao « doit faire sa propre autocritique », avait-il ajouté, accusant l’organisation ouest-africaine d’avoir été « distante par rapport aux cris des populations guinéennes » lors de la répression meurtrière de la contestation ayant marqué les dernières années de pouvoir de M. Condé.
Dans un communiqué publié samedi avant l’annonce du colonel Doumbouya sur la durée de la transition, le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), a déploré « que les faits et agissements du CNRD ressemblent chaque jour davantage à ceux du régime déchu d’Alpha Condé » et plaidé pour un « retour rapide à l’ordre constitutionnel normal ».
Le Monde avec AFP
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