Au pouvoir pendant vingt-sept et exilé en Côte d’Ivoire depuis sa chute, en 2014, M. Compaoré a été reconnu coupable d’avoir commandité le meurtre de son prédécesseur, tué lors d’un coup d’Etat, en 1987.
L’ancien président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, a été condamné mercredi 6 avril, par contumace, à la prison à perpétuité pour sa participation à l’assassinat de son prédécesseur, Thomas Sankara, tué avec douze de ses compagnons lors d’un coup d’Etat, en 1987.
Le tribunal militaire de Ouagadougou a également condamné à la perpétuité le commandant de sa garde, Hyacinthe Kafando, et le général Gilbert Diendéré, un des chefs de l’armée lors du putsch de 1987. Blaise Compaoré, en exil depuis 2014 en Côte d’Ivoire, et Hyacinthe Kafando, en fuite depuis 2016, étaient les grands absents de ce procès qui avait débuté il y a six mois.
Ce procès historique s’est ouvert en octobre 2021, trente-quatre ans après la mort de Thomas Sankara, icône panafricaine, assassiné lors d’un coup d’Etat qui avait porté au pouvoir Blaise Compaoré. Ses avocats avaient dénoncé « un procès politique » devant « une juridiction d’exception », estimant que la procédure « ne vaut rien ».
Trente ans de prison ferme avaient été requis contre Blaise Compaoré par le parquet du tribunal militaire de Ouagadougou pour « attentat à la sûreté de l’Etat », « recel de cadavre » et « complicité d’assassinat ». La même peine avait été requise contre Hyacinthe Kafando, ancien commandant de la garde de M. Compaoré, autre grand absent du procès, en fuite depuis 2016 et accusé d’« assassinat ».
Outre ces deux absents de marque, douze autres accusés ont assisté à ce procès-fleuve, parmi lesquels le général Gilbert Diendéré, un des chefs de l’armée lors du putsch de 1987, pour qui le parquet militaire avait requis vingt ans de prison pour les mêmes chefs d’inculpation que M. Compaoré, plus « la subornation de témoins ».
Le général Diendéré purge déjà une peine de vingt ans pour une tentative de coup d’Etat en 2015.
Comme la plupart des accusés présents, il avait plaidé non coupable et les avocats de la famille Sankara ont regretté qu’aucun n’ait avoué ou ne se soit repenti. « Personne ! Nous demandons au tribunal de rendre justice aux familles. Nous ne voulons pas une vengeance, nous demandons simplement justice », a déclaré l’un d’eux, Prosper Farama.
Le procès a été perturbé par le coup d’Etat du 24 janvier du lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, qui a renversé le président élu, Roch Marc Christian Kaboré. Il a une première fois été suspendu au lendemain du putsch, puis, le 31 janvier, « jusqu’au rétablissement de la Constitution » mise en sommeil lors du coup d’Etat, puis rétablie par la junte au pouvoir, permettant sa reprise.
Mais de nouvelles interruptions sont survenues, dont une à la suite de la prestation de serment de M. Damiba devant le Conseil constitutionnel, le 16 février. La défense a alors introduit une requête, en soulignant qu’on demandait des condamnations pour « attentat à la sûreté de l’Etat », alors que le putsch du lieutenant-colonel Damiba, validé par le Conseil constitutionnel, constituait en lui-même un « attentat à la sûreté de l’Etat ». Cela « consacre la prise de pouvoir par la force comme un mode constitutionnel de dévolution du pouvoir », avaient soutenu les avocats de la défense. Un argument « non fondé » rejeté par le Conseil constitutionnel, permettant la reprise du procès.
Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat, en 1983, Thomas Sankara a été tué avec douze de ses compagnons par un commando lors d’une réunion au siège du Conseil national de la révolution (CNR) à Ouagadougou. Il avait 37 ans.
La mort de Thomas Sankara, qui voulait « décoloniser les mentalités » et bouleverser l’ordre mondial en prenant la défense des pauvres et des opprimés, a été un sujet tabou pendant les vingt-sept ans de pouvoir de M. Compaoré, contraint de partir à la suite d’une insurrection populaire, en 2014.
Lemonde.fr/AFP
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