Alassane Doumbia, Pierre et David Billon… Au cœur de la galaxie Sifca

Par Anna Sylvestre-Treiner, Baudelaire Mieu, Estelle Maussion

Colosse aux plus de 17 000 employés, le groupe ivoirien Sifca est incontournable dans trois secteurs agricoles clés et dans une demi-dizaine de pays d’implantation. Quelles relations ses dirigeants entretiennent-ils entre eux ? Qui a leur oreille et quelles alliances ont-ils noué ? Jeune Afrique a mené l’enquête.

Ils sont à la tête d’un champion agro-industriel ouest-africain (830 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2020), premier employeur privé de Côte d’Ivoire. L’entreprise familiale, fondée en 1964 par Pierre Billon puis dirigée par Yves Lambelin (assassiné en 2011 durant la crise post-électorale ivoirienne), s’est développée malgré les aléas des cours des matières premières qu’elle produit (huile de palme, hévéa, sucre). Le groupe compte des filiales en Côte d’Ivoire, au Nigeria, au Liberia, au Ghana, au Sénégal et en France, pour plus de 33 000 employés dont plus de 17 000 salariés permanents.

Alassane Doumbia, au nom du père
Très discrets, les dirigeants de Sifca ont su cultiver un réseau efficace et des alliances stratégiques, notamment avec Michelin et Wilmar. Au sein du quatuor, c’est Alassane Doumbia, fils adoptif de Yves Lambelin et président du conseil d’administration, qui prend les décisions. Mais il ne le fait pas sans l’aval des trois fils du fondateur : Pierre, DG du groupe, David, administrateur, et Jean-Louis, proche conseiller. Pour ces héritiers, les affaires se font en famille.

Alassane Doumbia, au nom du père

20 septembre 2016 à 10:47
Par Frédéric Maury
Mis à jour le 17 mai 2021 à 17:38

Peu connu, le fils adoptif d’Yves Lambelin, disparu en 2011, a été nommé président de Sifca, le premier groupe agro-industriel ivoirien.

Il serait facile de débuter un portrait d’Alassane Doumbia par une date charnière dans sa vie, privée comme professionnelle : le 4 avril 2011. Celle de la disparition d’Yves Lambelin. Son père adoptif fait alors partie des quatre personnes enlevées au Novotel d’Abidjan. À cette date, son fils est loin de la capitale économique ivoirienne, alors en pleine crise postélectorale. « Le 1er avril 2011, j’étais à Lagos. Le 3, au Ghana, et je me souviens qu’il [Yves Lambelin] se moquait de moi en me traitant de peureux », retient Alassane Doumbia. À l’époque, le quadragénaire (né le 14 juillet 1976 à Dabou, près d’Abidjan) travaille entre le Liberia et le Togo, ne passant que deux à trois jours par semaine dans son pays. Aujourd’hui, c’est dans un État en grande partie reconstruit que réside en permanence Alassane Doumbia.

Yves Lambelin a laissé deux orphelins : Sifca, qu’il a dirigée pendant trente ans, et son fils, qui garde au fond de lui cette envie profonde de s’engager toujours plus pour le groupe agro-industriel ivoirien. « Mon père a donné toute sa vie à ce groupe », rappelle Doumbia. Entré à la fin des années 1970 dans le groupe cacaoyer ivoirien, d’abord en tant que directeur technique puis comme directeur général une dizaine d’années plus tard, Yves Lambelin, avec l’appui de la famille Billon, a construit à marche forcée le numéro un mondial du cacao, puis, après la libéralisation du secteur en 1999, le numéro un africain de l’hévéa et de l’huile de palme. Un géant dont les revenus ont franchi la barre symbolique du milliard de dollars en 2011, avant de redescendre depuis en raison de l’effondrement des cours du caoutchouc. « Il voulait toujours avoir un temps d’avance », se rappelle Alassane Doumbia.

DOUMBIA POSSÈDE ENVIRON 23% DU GÉANT AGRO-INDUSTRIEL

Peu connu du grand public, à la différence de la famille Billon, première actionnaire de Sifca et dont l’un des fils (Jean-Louis) s’est lancé en politique, Alassane Doumbia n’en est pas moins devenu un homme clé du groupe. « Pendant quelques années, c’est un véritable triumvirat qui a dirigé Sifca : Pierre Billon, Alassane Doumbia et Bertrand Vignes, le directeur général », soulignait Joël Krief, un banquier d’affaires (AM Capital) proche de cette entreprise depuis une vingtaine d’années, lors d’une interview accordée à Jeune Afrique il y a quelques mois.

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