Décès d’Idriss Déby Itno après sa réélection, violences pré-électorales au Bénin, défaite d’Edgar Lungu en Zambie … L’année 2021 en Afrique a été marquée par des événements qui ont changé le paysage politique du continent. Dans un contexte toujours marqué par la pandémie de covid-19, l’année 2022 promet elle aussi d’avoir son lot de batailles politiques, tournant autour d’élections présidentielles, locales ou législatives importantes, selon les enjeux. De l’Angola au Sénégal en passant par le Kenya, tour d’horizon des principales échéances électorales qui marqueront l’actualité politique africaine en 2022.
Kenya : clap de fin pour Uhuru Kenyatta
Après deux mandats successifs à la tête du Kenya, le président Uhuru Kenyatta va déposer le tablier en août 2022. Fils du premier président de la République kényane, le dirigeant âgé de 60 ans n’est en effet plus éligible à un nouveau mandat conformément à la Constitution du pays. En huit ans passés à la tête du pays, ses deux mandats ont été marqués par des chantiers infrastructurels importants, un ambitieux plan de développement dénommé « Big Four Agenda », mais également par des scandales de corruption et d’évasion fiscale, ainsi que des critiques concernant sa gestion de la dette publique du pays.
1 Uhuru Kenyatta, président sortant du Kenya
Pour lui succéder, de nombreux candidats devraient se manifester dans les prochains mois. Déjà, les observateurs voient deux personnalités sortir du lot, à savoir : le vice-président William Ruto et l’opposant historique Raila Odinga. Si le premier peut se targuer d’avoir une base électorale solide renforcée par son alliance avec Uhuru Kenyatta, le second tient quant à lui sa dernière occasion d’accéder à la magistrature suprême, après plusieurs échecs lors de précédentes tentatives.
Plusieurs analystes estiment que M. Kenyatta continuera à peser sur l’échiquier politique de son pays. Preuve de sa volonté de ne pas se retirer complètement de la vie politique kényane, il a tenté ces derniers mois de faire passer une réforme constitutionnelle qui prévoyait de créer de nouveaux postes, dont ceux de Premier ministre et de vice-ministres, de faire des ministres des membres du Parlement et d’attribuer un poste au chef de l’opposition. Bien que cette réforme ait été jugée anticonstitutionnelle, le leader du Jubilee Party of Kenya dispose encore d’une assise électorale suffisante pour faire basculer la prochaine élection dans un sens ou dans l’autre, en donnant des consignes de vote.
Angola : Joao Lourenço remet son fauteuil en jeu
En 2022, l’actualité politique angolaise devrait être l’une des plus suivies du continent africain. Et pour cause, au cours du mois d’août, le président Joao Lourenço remettra en jeu son fauteuil, dans une élection présidentielle qui s’annonce tendue.
Pour rappel, M. Lourenço est à la tête du pays depuis 2017. A peine arrivé, il a lancé une campagne de lutte contre la corruption qui a fait tomber de nombreuses têtes dans le camp de son prédécesseur Eduardo dos Santos. Les enfants de ce dernier, Isabel et José Filomeno dos Santos ont ainsi été épinglés dans des scandales de corruption, ayant pour effet de dégrader les relations entre l’historique clan dos Santos et le nouveau clan Lourenço qui, rappelons-le, appartiennent tous les deux au MPLA, le parti au pouvoir.
Bien qu’il soit difficile à l’heure actuelle d’identifier une véritable figure de l’opposition capable de contester un deuxième mandat du président Lourenço dans les urnes, de nombreux observateurs estiment que le prochain scrutin aura des allures de référendum populaire pour ou contre les réformes mises en place depuis son arrivée au pouvoir. Néanmoins, le retour au pays en septembre dernier de l’ancien président, et l’annonce d’une possible candidature d’Isabel dos Santos pourraient mettre du suspense dans une élection qui, de l’avis de plusieurs experts, semble jouée d’avance.
Sénégal : élections tests pour Macky Sall
Au Sénégal, l’actualité politique en 2022 sera marquée par l’organisation d’élections législatives destinées à renouveler les 165 sièges de l’Assemblée nationale. Si le scrutin semble moins capital qu’une présidentielle, il faut néanmoins souligner que son importance n’est pas des moindres, surtout dans le contexte politique national actuel.
Lors des législatives de 2017, le président sénégalais Macky Sall avait réussi à obtenir la majorité absolue au Parlement, grâce à la victoire de la coalition Unis par l’Espoir, dont faisait partie l’Alliance pour la République (APR), son parti politique. Mais depuis, des tensions politiques ont surgi dans le pays, contribuant à dégrader le climat social.
Depuis sa réélection en 2019 sur fond de condamnation en justice de deux de ses principaux opposants, le pays a été émaillé par des manifestations violentes suscitées par des revendications à caractère sociopolitique. En mars 2021, alors que le pays subissait de plein fouet les conséquences économiques de la covid-19, des émeutes violentes ont éclaté dans les rues de Dakar pour protester contre l’arrestation d’Ousmane Sonko, figure de l’opposition, et considéré comme l’un des principaux adversaires politiques de M. Sall.
Moins d’un an après ces faits, les prochaines législatives sonnent comme un test pour le chef de l’Etat qui reste flou sur ses ambitions d’un troisième mandat, et face à une opposition qui promet de mener une bataille électorale sérieuse contre la mouvance présidentielle. Une première répétition grandeur nature de cette échéance électorale importante sera l’organisation des élections locales 2022, attendues pour ce mois de janvier.
Gambie : deuxièmes législatives post-Jammeh
Après avoir organisé sa première élection présidentielle de l’ère Adama Barrow, la Gambie s’apprête à tenir les deuxièmes législatives de son histoire, depuis la chute de l’ancien dictateur Yahya Jammeh. Si cette élection est une occasion de célébrer la nouvelle démocratie gambienne, il faut souligner qu’elle intervient dans un contexte politique et social tendu.
La campagne électorale de 2021 avait donné lieu à des tensions entre le président Barrow et ses opposants. Critiqué pour sa gestion du pays depuis son arrivée au pouvoir, le dirigeant avait également essuyé un camouflet dans sa tentative d’introduire de nouvelles révisions constitutionnelles, imposant notamment la limitation des mandats présidentiels et la possibilité pour le président de désigner son vice-président. Suite à cet échec, l’ancien homme d’affaires a créé son propre parti, le National People’s Party (NPP) avec lequel il s’est présenté à l’élection qu’il a remportée.
En avril prochain, il s’agira pour M. Barrow de reconquérir un Parlement qui lui était favorable à son arrivée au pouvoir. Rappelons que l’actuel parti majoritaire au Parlement gambien est l’UDP de l’opposant historique Oussainou Darboe, arrivé deuxième à la présidentielle de décembre 2021.
Lesotho : qui pour succéder à Tom Thabane ?
Cette année, le Lesotho va organiser des élections législatives pour renouveler son Parlement. Au total, 120 sièges seront à pourvoir avec à la clé, un poste de Premier ministre du gouvernement conformément au système de monarchie constitutionnelle en vigueur dans le pays.
Prévu pour septembre 2022, le prochain scrutin intervient dans un contexte sociopolitique tendu dans ce royaume d’Afrique australe. Depuis 2020, le Premier ministre Thomas Thabane, et sa femme Maesaiah Thabane sont poursuivis pour l’assassinat de l’ancienne première dame Lipopelo Thabane. Soupçonné avec son actuelle épouse d’être impliqué dans le meurtre de son ancienne femme il y a environ trois ans, le désormais ex-chef de gouvernement avait dû démissionner, après avoir été mis sous pression pendant plusieurs semaines par son propre parti, afin qu’il quitte ses fonctions.
3 Thomas
Thomas Thabane, ex-Premier ministre du Lesotho
Alors que ce procès sulfureux est encore au cœur de l’actualité lesothane, le pays devra composer avec la covid-19 et le manque de budget qui avaient déjà poussé à un report du scrutin de juin à septembre. A nouveau, trois partis se disputent le leadership au Parlement : la Convention de tous les Basotho (ABC), le Congrès démocratique et le Congrès du Lesotho pour la démocratie.
Mali, Libye, Somalie
Bien que plusieurs pays se préparent à tenir des scrutins importants, l’année 2022 sera également celle de toutes les incertitudes pour d’autres. Au Mali, le gouvernement de Transition a annoncé qu’il organiserait des élections générales, d’ici cinq ans, amenuisant un peu plus les espoirs d’un scrutin en février prochain. En Somalie, les tensions entre le Premier ministre, Mohamed Hussein Roble, et le président Mohamed Farmajo continuent de compliquer la poursuite d’un processus électoral qui doit permettre de renouveler le Parlement et d’élire un nouveau président. Quant à la Libye, le report systématique des élections, depuis les pourparlers entre les principaux acteurs de la guerre civile font de la tenue du premier scrutin libre et démocratique du pays un véritable serpent de mer, depuis plusieurs années.
Moutiou Adjibi Nourou
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