Jeune frère du Président Ouattara, Téné Birahima Ouattara (TBO) a longtemps gravité dans l’ombre de ce dernier, avec cependant des pouvoirs très étendus. Dès 2011, alors que le pouvoir commence à se mettre en place, son nom est cité dans les tractations qui ont abouti à la fusion des deux armées qui s’étaient affrontées lors de la crise post- électorale de 2010-2011. C’est dire que dès le départ, TBO s’est porté sur les questions de sécurité et de défense sans toutefois occuper le devant de la scène. Assez rapidement il va monter en puissance sur ces questions en étant toujours en retrait.
Ainsi en 2012 il est nommé Ministre des « affaires présidentielles ». Derrière ce qualificatif assez flou, il était chargé de l’ensemble des services de renseignements et de sécurité de l’Etat, il était l’un des membres les plus influents du Conseil National de Sécurité le CNS, il supervisait la garde présidentielle, une unité d’élite dont le commandement ne relève pas de l’Etat-major des armées. Il chapeautait l’administration présidentielle, sur le volet financier. Il était également chargé des finances du parti. En 2019, il est porté à la tête de l’Unité de Lutte contre le Grand Banditisme , l’ ULGB.
Au sein du palais présidentiel, TBO faisait contrepoids au Chef d’Etat Major particulier du Président, au Secrétaire Général de la Présidence, et au Directeur du Cabinet présidentiel. Au sein du gouvernement, il faisait contrepoids au ministre de la Défense, et à celui de la Sécurité. Loin des feux de l’actualité, loin du bruit, dans une extraordinaire discrétion, sans faire la moindre vague, sans attirer l’attention sur lui, TBO a toujours concentré entre ses mains de vastes attributions. Homme au cœur de l’appareil de défense et de sécurité, il ne répond que devant le Président.
TBO est aussi vu comme un » dur » . On lui attribue l’interpellation des artistes Yodé et Siro en 2020, accusés de « propos irrespectueux » envers le Chef de l’Etat lors d’un concert. Cette même année, on lui attribue aussi l’expulsion du pays de Nathalie Yamb, cet activiste suisse-camerounaise (on dit aussi qu’elle avait la nationalité ivoirienne), très critique vis-à-vis du pouvoir. Elle était basée en Côte d’Ivoire depuis 2007. Certains prétendent que l’initiative venait d’Hamed Bakayoko, alors Ministre de la défense. La dame a plus tard dénoncé la saisie de ses comptes lors de son expulsion. Or TBO a fait l’essentiel de sa carrière dans le secteur bancaire, ce qui tend à l’incriminer.
Lors de la dernière présidentielle, des fonds importants avaient été remis à des Ministres ressortissants de régions acquises à l’opposition, pour » calmer les esprits ». Mais avec les troubles avant, pendant et après le vote, il est apparu que ces Ministres avaient tout simplement empoché cet argent, se contentant de vagues promesses sur le terrain. TBO était partisan de sanctions fortes à leur égard, mais le Président Ouattara a décidé de passer l’éponge pour ne pas donner du grain à moudre à l’opposition. Enfin TBO est accusé de surveiller du coin de l’œil tous ceux qui ont rejoint le parti présidentiel plus tard, notamment le PM Patrick Achi et toute la bande des transfuges.
C’est naturellement qu’il est nommé par intérim Ministre de la défense le 08 mars 2021, suite à l’évacuation d’hamed Bakayoko sur l’Europe, et confirmé le 06 Avril à ce poste, suite au décès de ce dernier. Existait-il une rivalité ouverte entre ces deux hommes ? En fait, Hamed Bakayoko devait manoeuvrer en tenant compte du poids des avis de TBO sur les questions militaires auprès du Président. Chacun respectait cependant le » territoire » de l’autre. Aussi dire que TBO l’aurait « empoisonné » , ou l’aurait « ensorcelé » pour lui ravir sa place comme l’ a affirmé le »prophète » Chris Yapi, est simplement une théorie à classer dans le registre des » contes et légendes d’Afrique ». Il faut être analphabète pour donner du crédit à de telles idées.
TBO règne aujourd’hui sans partage sur l’ensemble des services de défense et de sécurité. Il n’est que Ministre de la défense, mais dans les faits il a tous les attributs du Numéro 2 du régime. C’est un garçon solide, qui dans l’ombre de son frère, a acquis les fondamentaux de la gestion du pouvoir. Va-t-il se lancer en 2025 ? Évidemment à quatre années de l’échéance, il ne laisse rien transparaître sur la question. Deux groupes de soutien ont vu le jour, le » Mouvement National Téné Birahima Ouattara », et le » Mouvement Cinq Millions de Jeunes pour Téné Birahima Ouattara ». Mais depuis, on n’ a plus rien entendu. Homme de discrétion, il est possible que TBO ait désavoué ces initiatives.
Aujourd’hui, il n’ y a pratiquement aucun poids lourd dans le camp présidentiel. Nous n’avons que des jeunes. Beaucoup pensent que le PM Patrick Achi a un boulevard devant lui. Pourtant dans le cercle restreint autour du Président Ouattara, il n’est pas vraiment considéré comme étant des leurs. On le voit comme un » corps étranger ». Ainsi lorsque la question de la succession va se poser, la carte TBO sera certainement mise sur la table. C’est le seul poids lourd dans la place, et les regards vont naturellement converger vers lui. Interrogé en Septembre 2021 par le magazine Jeune-Afrique, le président Ouattara a déclaré : » pour l’instant il n’est intéressé que par les responsabilités que je lui confie. Mais en 2025, la démocratie interne va pleinement jouer pour la désignation du candidat du parti et on verra ». On remarque qu’il ne ferme pas la porte à une candidature de l’homme. Téné Birahima Ouattara va-t-il bénéficier d’un » alignement des planètes » en 2025 ?
Bonne année 2022 à tous !
Douglas Mountain
Le Cercle des Réflexions Libérales
oceanpremier4@gmail.com
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