Contraint à l’exil depuis son acquittement par la CPI/ Charles Blé Goudé fait-il si peur ?

La Haye / Côte-d’Ivoire – L’ancien chef des jeunes patriotes ayant mobilisé la rue sous le mandat de Gbagbo alors aux prises avec des rebelles est toujours bloqué aux Pays-Bas.

Depuis 2011, la trajectoire du président du Congrès Panafricain pour la Justice et l’Égalité des Peuples (COJEP), est émaillée d’obstacles sans qu’il n’y comprenne lui-même grand grand-chose.

Après le 11 avril, il passe trois ans en cabale au Ghana avant d’être cueilli par des policiers ghanéens en mission pour le compte des autorités ivoiriennes. Extradé en Côte d’ivoire, il subit une sévère torture en détention avant d’être expédié à La Haye pour y être jugé.

On se souvient de ses phrases cultes : « je ne serai pas la honte de ma génération » ou encore « De La Haye, je reviendrai ».

C’était prémonitoire.

Blé Goudé gagne son procès conjointement avec Gbagbo en première instance en janvier 2019 et définitivement en appel, le 31 mars de l’année suivante. Mais Charles Blé Goudé ne peut revenir dans son pays. Il doit subir une nouvelle épreuve. La bataille du passeport sujette à plusieurs intrigues. Si pour Laurent Gbagbo qui a regagné la Côte d’ivoire depuis le 17 juin 2021, il est totalement absurde que Blé Goudé soit encore à La Haye, le pouvoir Ouattara lui, ne semble pas pressé. Tout se passe comme s’il avait un autre agenda.

Charles Blé Goudé a beau montrer patte blanche, il a beau remuer ciel et terre à coup de battage médiatique allant même jusqu’à s’humilier, rien de bon ne pointe à l’horizon pour lui. C’est le statu quo. Alassane Ouattara et son camp veulent jouer la montre. Selon des confidences, Charles Blé Goudé est comme Guillaume Soro, black-listé par le chef de l’exécutif qui exècre les anciens dirigeants de la Fesci. Il les considère comme des marxistes, aux antipodes de l’évolution qu’il veut imprimer à la société ivoirienne.

Ses demandes polies, sa nouvelle posture adoucissante sont pour l’instant loin d’attendrir Alassane Ouattara qui a les yeux rivés sur 2025, l’année de la future présidentielle.

Mais Zadi Gbapê est-il encore l’ogre redoutable des années Gbagbo ?

Dans l’absolu, l’ex-prisonnier de Scheveningen a perdu bien des plumes sur la balance de la popularité. Onze longues années d’absence, sans support médiatique véritable pour le faire vivre dans les cœurs, son mouvement politique qui a subi les coups de boutoir du pouvoir et les batailles en interne ont fini par entamer sa puissance d’il y a 18 ans. C’est désormais un homme meurtri, amer abandonné par certains de ses amis, un homme dont la stratégie souffre de quelques tares avec une démarche illisible, mais qui ne demande qu’à revenir dans son pays pour se reconstruire.

Onze ans qu’il est absent et les nouvelles générations n’ont pas forcément souvenance de ses exploits politiques. Mais le pouvoir redoute encore sans contexte le caméléon politique pour le maintenir loin de sa terre natale.

Charles Blé Goudé avec son art du verbe qu’il manie à souhait est capable de monter rapidement en première ligne s’il était présent sur le terrain. Et cela ne fait pas pour l’instant l’affaire du pouvoir. Mais pas que. Le génie de Kpo doit aussi faire face à l’adversité de ses anciens partenaires du camp Gbagbo qui lui reprochent jusqu’ici la transformation de son mouvement politique pro-Gbagbo Cojep en un parti politique désormais concurrent.

Dans sa réclusion hivernale de La Haye rythmée par les restrictions pandémiques, acquitté mais maintenu mentalement en prison par le régime d’Abidjan, Blé Goudé Charles réfléchit, reçoit, écoute, il se projette, il scrute l’horizon au-delà de la mer du nord toute proche, et cherche sa voie qui le ramènera en Côte-d’ivoire, ce pays qui l’a vu naître il y a bientôt 50 ans de cela, à quelques 7000 km.

SD à Abidjan

sdebailly@yahoo.fr

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