Côte-d’Ivoire: Simone Gbagbo falsifie son propre combat en demandant à « ses maris Bété et à ses parents Abouré de la suivre »

Disons courageusement à Simone Gbagbo, que la Côte-d’Ivoire est « une et indivisible ». Son nouveau slogan : ” je demande à mes maris Bété , à mes parents Abouré de me suivre  » est dangereux et régressif pour la démocratisation de notre pays. C’est également une insulte grave aux libertés individuelles et collectives. Car la démocratie incarne deux valeurs essentielles : la liberté et l’égalité.

Les Betés et les Abourés sont avant tout des Ivoiriens. Faire recours au langage politico-ethnique pour mobiliser, nous entraîne vers des futures guerres régionalistes ou religieuses.. Pourquoi Simone Gbagbo s’était battue de 1973 à 2011? Quel était le sens de son combat ? L’ethnie dans le débat politique nous conduit vers la pensée unique, qui est le point de rencontre de tous les renoncements, de tous les sectarismes, de toutes les arrogances.  » Hier, nous avions critiqué l’association des élus et cadres du Nord , et pourquoi une association :  » Betés et Abourés »?  » . Je pense que Simone Gbagbo devrait être à l’écoute de l’électorat des ivoiriens quand il est à ce point trahi et abandonné dans ses valeurs par le rhdp. Le rôle d’une femme politique ou d’un homme politique est de tout faire pour ne pas exacerber les tensions ethniques, mais au contraire pour les apaiser.

J’invite Simone Gbagbo de prendre sa place au PPA-CI de Laurent Gbagbo, dont l’objectif est de rassembler les faibles contre les plus forts. L’Afrique est suffisamment émiettée ou balkanisée par les géants de ce monde. Les grandes puissances se mondialisent contre les pays faibles, et que peuvent faire les maris Betés et les parents Abourés de Simone Gbagbo ? Simone Gbagbo falsifie son propre combat. C’est bien dommage !

Liade Gnazegbo

L’intégralité du discours de Simone Gbagbo au domicile de Sa majesté Jean Gervais Tchiffi Zié

Je voudrais le remercier également pour les dons qu’il a faits. Il a fait des dons qui sont symboliques et de portée très grande et je voudrais le remercier pour cela. Le tissu tissé, ensuite la corne que les Hébreux appellent le schofar, et puis la bible qui est le document qui rassemble toute la volonté de Dieu. Ce sont des cadeaux qui sont précieux. A côté de cela, il a offert quelque chose de plus moderne, qui est un pagne que je vais porter. Je dois dire qu’à ce niveau, je dois me considérer comme bénie de Dieu.

Parce que depuis ma sortie de prison, je reçois beaucoup de cadeaux, mais principalement, des pagnes. Ce qui fait que là où je suis, je peux dire que j’ai des cantines et des cantines de pagnes. Merci aux chefs qui ont tenu à l’accompagner. On est à un moment de l’histoire de la Côte d’Ivoire qui est un moment important. Depuis des années, en tout cas principalement, moi, je me suis investie pour que ce pays aille de l’avant, que ça progresse. Générations après générations, cette nation doit progresser.

Et j’explique que, au départ, la nécessité a été de récupérer notre pays d’entre les mains des colons qui étaient venus. Ils étaient plus forts que nous, militairement. Ils nous ont donc asservis. Ils ont tenu sous leur joug près d’un siècle. Et puis, nos parents, ceux qui nous ont précédé, les générations qui nous ont précédé se sont levés, ont combattu, pour les cultures d’abord, avec le syndicat des planteurs, et puis pour la souveraineté de la Côte d’Ivoire avec à leur tête le président Houphouët. On a pu arriver à l’indépendance.

Pour que la Côte d’Ivoire soit une nation il faut sortir du parti unique, il faut donner la possibilité à toutes les sensibilités ivoiriennes de s’exprimer.

On est arrivé à l’indépendance, le Pdci a pris le pouvoir. Mais le Pdci a organisé le parti unique. Or, nos parents même le disent, dans une communauté, quand vous avez votre campement, vous êtes seul, vous êtes le chef de votre campement. Mais pour que vous soyez un village, il faut que vous soyez plusieurs têtes et plusieurs campements à l’intérieur du village. Pour que la Côte d’Ivoire soit une nation, au bénéfice de toutes les populations, il faut sortir du parti unique, il faut donner la possibilité à toutes les sensibilités ivoiriennes de s’exprimer et que ces sensibilités soient prises en compte dans la gestion de la Côte d’Ivoire

C’est cette vision qui a amené leur frère, leur fils, pour certains, leur père, pour d’autres, avec nous tous, de créer un parti qui va se mettre à revendiquer que la communauté ivoirienne tout entière soit prise en compte dans la gestion politique de la Côte d’Ivoire. Il faut donc autoriser, permettre que d’autres sensibilités s’expriment et se manifestent. Ça nous a conduits au multipartisme. C’est pour cela qu’aujourd’hui, quand on parle, on dit Houphouët a été le père de la nation ivoirienne.

Mais Laurent Gbagbo a été le père de la démocratie ivoirienne. Générations après générations, chacun apporte sa pierre. Aujourd’hui, dans la génération dans laquelle nous sommes, le multipartisme est déjà quelque chose. Bien sûr, ce n’est pas encore exactement comme on le souhaite. Les colons continuent de nous fatiguer encore l’esprit, de nous piétiner, de vouloir régenter notre vie. Ce n’est donc pas fini. Le combat d’Houphouët, le combat du Pdci n’est pas encore terminé. Le combat de Gbagbo n’est pas encore terminé.Sa Majesté Jean Gervais Tchiffi Zié, chef traditionnel issu de la communauté Krou, dont est natif Laurent Gbagbo, a invité Simone Ehivet Gbagbo

On doit encore combattre pour la souveraineté, pour la liberté d’opinion, pour la démocratie. Aujourd’hui, il y a un troisième combat qui se présente. Ce troisième combat qui se présente, c’est que l’Afrique, la Côte d’Ivoire doit être totalement refondée, dans son économie, dans sa gestion politique, dans le respect des citoyens, dans la collaboration entre Ivoiriens et non Ivoiriens, dans la gestion de la justice dans un pays. Un pays n’est rien tant que la justice n’est pas respectée. Tout ça, c’est le travail que nous avons à faire aujourd’hui, c’est le travail des générations nouvelles aujourd’hui.

Les colons continuent de nous fatiguer encore l’esprit, de nous piétiner, de vouloir régenter notre vie
C’est la raison pour laquelle j’ai créé, avec les femmes, ce que j’appelle le Mouvement des générations capables. Mon espoir, c’est qu’avec ce Mouvement des générations capables, nous abordions la question de la transformation des mentalités ivoiriennes, la question de l’acquisition des valeurs par les Ivoiriens, la question de la meilleure prise en charge du développement économique de notre pays, du développement politique de notre pays, de l’équipement social et technique de notre pays. Et que nous modernisions la nation ivoirienne.

Voilà le chemin dans lequel, personnellement, je suis engagée aujourd’hui. Et c’est sur ce chemin que je demande aux Ivoiriens de me suivre aujourd’hui. C’est sur ce chemin que je demande à mes maris Bété de me suivre aujourd’hui. C’est sur ce chemin que je demande à mes parents Abouré, Agni du Sud Comoé, du Zanzan, enfin à tous nos parents de la Côte d’Ivoire de me suivre pour qu’on construise la Côte d’Ivoire, pour qu’on fasse progresser la Côte d’Ivoire, pour que la Côte d’Ivoire devienne véritablement une locomotive qui va tirer, non seulement, toute la sous-région, mais qui va tirer toute l’Afrique.

Mon espoir, c’est qu’avec ce Mouvement des générations capables, nous abordions la question de la transformation des mentalités ivoiriennes.

Voilà mon projet. Voilà l’offre que je fais aux Ivoiriens. Voilà la proposition que je fais aux Ivoiriens. Je voudrais donc remercier Kiffy Zié de l’opportunité qu’il m’offre de m’exprimer devant les chefs. Ce sont les chefs. A cause de la crise que nous avons vécue, lui-même (Kiffy Zié, Ndlr) a dit qu’il a dû intervenir lui-même dans le débat entre deux frères (Laurent Gbagbo et Dacoury Tabley) qui étaient des anciens amis pour que la Côte d’Ivoire n’entre pas dans la crise. Malgré cela, la Côte d’Ivoire est entrée dans la crise. Sa démarche était louable, elle doit être continuée. Mais à cette époque, ça n’allait pas aboutir.

Mais, c’est Dieu qui fixe le temps. Aujourd’hui, nous sommes contraints de réussir la réconciliation des populations ivoiriennes parce que le problème est là, il existe. On ne peut le contourner. Dieu ne nous donnera pas le luxe de contourner ce problème. Le problème est là, il est posé. Ce débat, je l’ai déjà dit ça ailleurs. De mon point de vue, il ne doit pas être laissé entre les mains des politiques. Eux qui sont les chefs de village et de communauté, ils doivent s’impliquer dans ce débat. Pourquoi ? Parce que dans la crise que la Côte d’Ivoire a vécue, nous avons connu de nombreuses victimes.

Il y en a qui en sont morts. Mais leurs parents sont là, leurs descendants sont là. Ces victimes dont quelque fois le sang a souillé la nation ivoirienne, réclament vengeance. On n’a pas encore commencé à leur donner satisfaction. Ce ne sont pas les politiques seuls qui peuvent régler ce problème. Ce n’est pas le droit moderne, la justice moderne dans les tribunaux qui peut régler ce problème. Il faut que vous qui gérez les communautés, vous qui gérez les villages, il faut que vous vous impliquiez dans la résolution de ce problème pour que les cœurs s’apaisent, pour que les cœurs s’ouvrent, pour que les âmes s’ouvrent, pour que les esprits s’ouvrent.Tchiffi Zié à Simone Gbagbo

La réconciliation ne se fera pas tant que vous ne vous impliquiez pas. Mais, quand je dis que vous devriez vous impliquer, ce n’est pas pour venir faire “Ari gbo gbo” de quelqu’un. Mais c’est pour que de façon sage, responsable, vous fondant sur la vérité, vous fondant sur la justice, que vous réussirez à obtenir des personnes qui sont victimes qu’elles pardonnent. Que les personnes qui sont coupables aient le courage de dire “Nous sommes coupables. On est coupable à différents niveaux. A un tel ou tel niveau, nous nous reconnaissions coupables. Et nous demandons pardon”. Que les coupables, que les bourreaux demandent pardon.

Que les personnes qui sont coupables aient le courage de dire “Nous sommes coupables”

Ça ne se fera pas tant que vous n’allez pas vous impliquer. Ça ne se fera pas si vous vous impliquez de façon politicienne pour encourager tel camp plutôt que tel autre camp. C’est sur la base de la justice que ce travail doit être fait. Et ça doit descendre non seulement au niveau du village, au niveau des communautés, mais également au niveau des familles. Vous avez parlé tout à l’heure au niveau des couples. Je dis ok, au niveau des couples, je voudrais que nous parlions également justice, que nous parlions vérité. Et que celui qui a raison, on lui dise, tu as raison, mais il faut pardonner. Celui qui a tort, on lui dit tu as tort.

Il faut demander pardon. Le troisième élément qui est extrêmement important, parce que je peux dire dans ma bouche, je pardonne, ça ne suffit pas. Il faut qu’il y ait réparation, indemnisation. Vous me dites, il faut pardonner. Je dis, d’accord, mais tu es assis dans ma maison, comment je peux te pardonner si toi tu es assis dans ma maison et que moi je suis obligé d’aller louer une maison ailleurs pour vivre avec ma famille ? Tu as récupéré mes terres, tu as récupéré mes plantations, et puis tu me dis de pardonner.

Je pardonne, d’accord, mais rends-moi ma plantation. Je pardonne mais rends-moi ma terre. Je pardonne, mais tu as pris ma femme, rends-moi ma femme. Je pardonne, tu as pris mon mari, mais rends-moi mon mari. Donc, il y a nécessité d’aller jusqu’à la réparation, nécessité d’aller jusqu’à l’indemnisation, à ce moment-là, les cœurs vont s’apaiser et les esprits vont s’apaiser. Il y a encore aujourd’hui, pleins de gens qui sont en prison. Nos officiers de l’armée sont encore en prison. Ils sont en prison depuis 2011. Nous sommes en 2021.

Ce sont des pères de familles. Il y en a même leurs femmes les ont quittés pendant qu’ils sont en prison. Il y en a qui ont perdu leurs épouses parce qu’ils n’avaient plus d’argent pour les soigner. Et ils sont en prison. Il y en a dont les enfants ne vont plus à l’école parce qu’il n’y a pas d’argent les mettre à l’école. Et ils sont en prison. Blé Goudé est encore à La Haye. Au moment où on prenait Blé Goudé pour partir à La Haye, on n’a pas demandé qu’il ait un passeport. On l’a pris comme ça, on l’a mis dans un avion, et on l’a transféré.

Au moment où on prenait Gbagbo Laurent pour l’amener à La Haye, moi j’étais assise devant la télé et j’ai regardé. Il y avait un direct. Ils l’ont mis dans un avion, le Grouman présidentiel et le Grouman est parti jusqu’à La Haye. On l’a descendu. Gbagbo, aucun papier. Et ils n’ont pas demandé de papier. Ils l’ont pris de La Haye, ils l’ont mis dans un véhicule et ils l’ont conduit directement à la prison de Scheveningen. Tout ça filmé et publié en direct sur France 24. Pourquoi pour le retour de Blé Goudé, il faut qu’il ait un passeport ? Le Grouman est encore ici.

Le Grouman ne devrait pas aller le chercher et puis le ramener ? Voyez, l’injustice ne peut pas régler, ne peut pas permettre de régler le problème de la réconciliation. Vous qui êtes les chefs, vous qui représentez une opinion publique qui peut être forte, si vous vous impliquez avec sincérité dans ce débat, on pourra aboutir à une bonne réconciliation. Il y a un grave problème qui est en train de venir. Regardez comment les gens organisent les déguerpissements, dans nos cités. Regardez comment ils ont chassé des milliers de pères de famille à Koumassi, à Yopougon.

L’injustice ne peut pas régler, ne peut pas permettre de régler le problème de la réconciliation
Que dites-vous, les chefs ? Ce sont des gens qui, pour certains, étaient propriétaires des terres sur lesquelles ils ont bâti leur maison. Ils sont propriétaires des maisons et des gens viennent à 4h du matin pour casser les maisons, les chasser des maisons. Aujourd’hui, ils sont devenus des sans domicile fixe. Aujourd’hui, on dit, on a commencé un dialogue politique qui commence aujourd’hui (Hier, Ndlr), et on invite quelques chefs de partis et puis on dit on va aller au dialogue politique. Mais le dialogue politique ne se fait pas avec des chefs de partis. Le dialogue politique se fait avec la population.

Et la population, aujourd’hui, est organisée. Vous les chefs traditionnels, pourquoi vous n’êtes pas au dialogue politique ? Les chefs d’associations, des organisations de la société civile, pourquoi ceux-ci ne sont pas au dialogue politique ? Les associations de droit de l’homme, pourquoi ne sont-elles pas à ce dialogue politique ? Voilà une initiative qui va se retrouver garée encore dans un coin et ça va amener d’autres problèmes à la Côte d’Ivoire.

Donc, vous, les chefs, il faut que vous vous engagiez dans ce débat pour que la Côte d’Ivoire finisse par retrouver sa paix, pour que les Ivoiriens finissent par retrouver la tranquillité de l’esprit. Que les dons, les talents que Dieu nous a distribués, nous puissions les laisser s’épanouir, que nous puissions les mettre à la disposition de nos citoyens, de la société.

Avec Elvire Ahonon
Afriksoir.net

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