Cote d’Ivoire / Interview : Serge Parfait Dioman, Expert International en Industries Pétrolières et Énergies
Réalisé par Jean Prisca
«Les cas avérés de leucémies infantiles sont effectivement accrus pour les populations habitant à proximité des lignes Haute Tension »
• Comment se présente sommairement la structure d’un réseau électrique Haute Tension ?
Au départ des centrales de production d’énergies électriques, la tension est successivement élevée à des milliers de volts. Elle parcourt ainsi des centaines de kilomètres de réseaux aériens et/ou souterrains, au travers de lignes raccordées à des transformateurs élévateurs ou abaisseurs selon les cas.
Ce réseau Haute Tension dispose de deux sous-catégories. La première, dite Haute Tension A (HTA) et anciennement appelée Moyenne Tension (MT) compte, en régime alternatif, les tensions de 15 000 V, 24 000 V ou 33 000 V, etc. tandis que dans la seconde catégorie dite Haute Tension B (HTB), l’on trouve les tensions de 63 000 V, 90 000 V ou 225 000 V entre autres, voire 400 000 V.
Les lignes aériennes sont suspendues à de hauts pylônes reconnaissables par leurs structures métalliques en treillis. D’autres sont portées par de simples poteaux en béton ou bois massifs très résistants. Dans tous les cas, il ne s’agit pas d’ouvrages ordinaires. Il n’est donc pas sans risque de s’en approcher sans précautions ni habilitations requises.
• Pourquoi alors disposer de lignes Haute Tension quand elles sont l’objet de risques, notamment sur la santé ?
En pratique, la Haute Tension est utile pour réduire les pertes d’énergies sur le réseau de transport. Par ailleurs, elle permet l’interconnexion électrique et favorise le transfert de grandes puissances, etc. En l’état actuel de nos connaissances, c’est techniquement ce qu’il y a de mieux à faire et c’est prouvé.
Il est vrai que les multiples ondes électromagnétiques qui nous environnent sont de sources et intensités énergétiques plus ou moins virulentes. Bon nombre de leurs effets physiologiques sont à n’en point douter connus de longues dates et nul ne saurait le nier. Toutefois, certains risques sanitaires qui leur sont attribués restent encore à prouver car ils ne font pas l’unanimité.
Les études en la matière se poursuivent donc. Celles ayant déjà abouties nous servent à consolider les directives et normes de prévention visant à ramener ces risques à des niveaux acceptables et maîtrisables. En clair, nous pourrions cohabiter avec la Haute Tension tout en sachant les limites.
• Existe-t-il divers types d’ondes électromagnétiques diffusées par les lignes aériennes Haute Tension ?
Le cas particulier des lignes Haute Tension avec lesquelles nous avons une cohabitation rapprochée, brève ou plutôt durable, mérite bien en effet d’en savoir davantage car elles sont le double foyer permanent de champs électriques et champs magnétiques.
A ce propos, il est factuellement démontré que l’influence de chacun de ces champs s’atténue quand l’on s’éloigne des lignes. Ils ont ce point caractéristique en commun. En terme d’incidence à l’égard du corps humain par ailleurs, ils ne se comportent pas du tout pareil. En effet, alors que ce champ électrique ne peut en fait traverser le corps humain, le champ magnétique associé le transperce sans difficulté quant à lui.
• Cette différence de manifestation face à des personnes exposées auxdits champs est tout de même pertinente ?
Elle l’est en effet. D’où le sens de toutes ces questions qui valent de connaître leurs répercutions respectives sur l’écosystème en général et notre santé en particulier.
Sont-ils à effets cancérogènes ? Modifient-ils nos cellules ? Agissent-ils sur nos facultés reproductives ? Les grossesses en sont-elles affectées ? etc. La bonne compréhension des mécanismes de causalités éventuelles donne en fait lieu à quelques définitions préalables pour mieux cerner la réalité.
• Par définition donc, les champs émanant de nos lignes Haute Tension seraient-ils particulièrement nocifs ?
Il importe de savoir qu’il existe des ondes d’extrêmes hautes fréquences diffusant de fortes énergies capables d’affecter nos cellules au travers d’intenses rayonnements. Et parce qu’elles vont justement jusqu’à ioniser des atomes et des molécules de tout corps, en déstabilisant leurs structures quantiques, elles sont dites « ondes ionisantes ». En pratique, elles sont appelées des « rayons » en raison de leur virulence.
Dans ce domaine spectral particulier, l’on trouve les Rayons X, les Rayons Gamma et les fameux Rayons Radioactifs, etc. On a affaire ici à des fréquences de l’odre de mille millions de millions d’Hertz, soit plus de 1000 THz (Tera-Hertz).
Rien à voir donc avec les fréquences en tensions et courants alternatifs d’à peine 50 ou 60 Hz (Hertz) véhiculées par les lignes Haute Tension aériennes. Elles n’émettent donc pas de virulentes inductions électromagnétiques mais des ondes d’extrêmes basses fréquences diffusant de faibles niveaux d’énergies. Ce sont des « ondes non ionisantes » appelées des « champs ».
• La fréquence du réseau de transport qui est actuellement de 50 Hz pourrait-elle éventuellement croître et évoluer vers des ondes ionisantes ?
Non du tout. Tout le réseau national est régulé de sorte que l’on ne s’éloigne pas de la consigne des 50 Hz ou 60 Hz selon le pays. Il y va du bon fonctionnement de nos appareillages et équipements électriques raccordés au réseau. Toutefois, il ne s’agit pas des seuls niveaux de fréquences observées sur les lignes de transport et d’interconnexion Haute Tension.
Pour des besoins de télécommunications opérationnelles, l’exploitant du réseau électrique y fait transiter en parallèle d’autres ondes radio de fréquences plus élevées. La bonne nouvelle est qu’elles sont toutes des ondes non ionisantes.
• Pourrions-nous alors conclure que nos lignes Haute Tension ne présentent que des risques électriques mais aucun risque sanitaire ?
En fait, les champs électriques et magnétiques des lignes Haute Tension ont certes des manifestations spectaculaires et des effets malheureusement dommageables tels que des incendies, des brûlures électriques, des électrocutions, des explosions de transformateurs, etc. mais en réalité, ils sont en incapacité d’altèrer nos cellules pour la simple raison que leurs inductions électromagnétiques sont non ionisantes.
A tort ou à raison pourtant, des gens affirment pour leur part en être affectés et en souffrir tandis que des avis d’experts s’avèrent être contradictoires pour diverses raisons que chacun semble assumer d’autre part.
Les cas avérés de leucémies infantiles sont effectivement accrus pour les populations habitant à proximité rapprochée. Chez les adultes, des effets neuro-psychiques allant de l’anxiété aux affections d’humeur, stress, crises épileptiques, céphalées et troubles du sommeil, etc. sont juste évoqués en attente de preuves formellement démontrées et admises.
En pareil cas alors, c’est le principe de précaution qui prévaut.
• En quoi consisterait-il concrètement par exemple ?
Il convient en toutes circonstances de respecter les mesures barrières de distanciation préventive établissant donc les distances limites de sécurité ainsi que les valeurs limites d’exposition aux champs des lignes Haute Tension aériennes.
Pour les réseaux électriques à 50 Hz, prière ne pas s’exposer à un champ électrique de plus de 5000 Volt par mètre (V/m) ni à un champ magnétique supérieur à 100 micro-Tesla (µT).
De petites applications pratiques, telechargeables en ligne, permettent de savoir les valeurs d’ondes électromagnétiques du milieu où l’on de trouve. Nous sommes invités à le faire.
• Il y a aussi des inquiétudes au sujet des antennes de téléphonie, qu’en est-il des risques et précautions ?
A toutes fins utiles, l’on pourrait en effet se permettre une disgression utile et nous interroger sur bien d’autres sources d’ondes électromagnétiques telles que les wifi, téléphones, micro-ondes, etc. Pour le cas d’exemple des antennes relais de téléphonie, il n’y a en principe pas d’inquiétudes à avoir.
Pour les antennes au format micro-cellulaire majoritairement rencontrées en agglomérations, la hauteur du mât qui porte l’antenne est suffisamment importante pour la rehausser loin au-delà de la distance de sécurité mininale de 1,5 mètres. Et donc à moins de grimper sur le mat pour se rapprocher de l’antenne située au sommet, l’on reste non exposé à la valeur limite du champ électrique qu’elle émet.
Cette distance de sécurité est d’au moins 2,5 mètres pour les grandes antennes de type maco-cellulaires déployées pour relayer et couvrir des dizaines de kilomètres.
• Ici également, quelles sont les valeurs limites en terme de champs électriques et magnétiques ?
Face à ces ouvrages en l’occurrence, les valeurs limites des champs électriques sont de 41 V/m (Volt par mètre) pour les antennes de la gamme 900 MHz (Mega-Hertz) et de 58 V/m pour celles de la gamme 1800 MHz.
Dans tous les cas, elles demeurent toutes également du domaine des ondes non ionisantes. Tâchons toutefois ces limites préventives.
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