Serge Parfait Dioman
Expert International en Industries Pétrolières et Énergies
Vivre à proximité de lignes Haute Tension, est-ce réellement dangereux ? Si oui, à quel point est-ce et à quelles distances de sécurité au sol devrions-nous alors être au minimum ? Ces questions, nous sommes nombreux à nous les poser.
L’énergie électrique est d’ordinaire transportée puis distribuée suivant trois modes de transfert spécifiquement distincts.
En mode « souterrain », les lignes sont enterrées pour des questions de sécurité surtout. Dans bien de cas, elles le sont plus pour répondre aussi à un besoin de commodité esthétique visant à ne pas les rendre visibles en certains lieux précis. En zones urbaines en l’occurrence, c’est majoritairement la disposition conseillée au centre ville.
Dans le mode « aérien », les lignes sont visibles et portées par de hauts poteaux et pylônes, à des hauteurs permettant de circuler en dessous sans les accrocher au passage. Elles suivent souvent les bordures des voies routières pour rester aisément accessibles aux besoins de maintenance entres autres. Mais quelques fois, elles surplombent aussi des habitats, des marchés, des écoles, etc. Et enfin, le troisième mode est celui dit « aéro-souterrain ». Il est mixte car certains tronçons de lignes sont enterrés et d’autres sont aériens.
Dans le principe alors, des lignes électriques aériennes Haute Tension qui sillonnent les paysages d’agglomérations, l’on en trouve partout dans le monde. Jusque là, rien d’inédit donc car ce n’est manifestement pas une exclusivité africaine. Jusque là, rien d’anormal non plus car des couloirs réglementés leur sont dédiés conformément aux règles de l’art en vigueur pour l’implémentation, le supportage et le cheminement sécurisés des lignes électriques aériennes.
Néanmoins, la problématique aujourd’hui est que ces couloirs censés être libres sont occupés par diverses sortes de constructions précaires et permanentes réalisées à l’intérieur même des périmètres de sécurité établis de part et d’autres desdits couloirs. Or la cohabitation rapprochée avec les populations peuplant cet espacement déclaré non habitable est un risque accidentogène à l’origine de plusieurs décès du fait du « Danger de Mort » auquel l’on s’expose à y résider à des risques et périls malheureusement avérés.
Les 20 mètres d’écart requis au minimum de part et d’autre de l’emprise au sol des lignes Haute Tension, ne sont déjà pas respectés par les occupants des lieux dont certains ont les pieds de pylônes carrément installés dans leurs maisons.
Or les simulations et essais pratiques effectués sur divers terrains montrent qu’en cas de rupture d’un câble porté par un pylône de 60 mètres de haut par exemple, celui-ci tombera en chute libre au sol en se déportant dans un rayon moyen pouvant excéder ces 20 mètres. Pour plus de sécurité toutefois, l’on affine les calculs en y rajoutant une marge d’écart supplémentaire dépendant des caractéristiques physiques de la ligne, du type de relief traversé, de la tension nominale, de la hauteur des édifices les plus proches, etc.
La situation actuelle est telle que l’on a presque fini par oublier qu’à l’origine, ces lignes avaient en réalité été érigées loin des aires habitées par les populations. Sauf qu’au fil des années, ces dernières s’y sont insouciamment rapprochées, occasionnant de regrettables accidents électriques.
Nous avons tous bien conscience que quiconque touche à une ligne électrique sous tension recevra immédiatement un choc électrique pouvant aller d’une simple secousse à une mort éventuellement subite. Dans ce cas mortel alors, la victime est dite « électrocutée » sinon, elle est dite « électrisée » quand il n’y a heureusement pas de perte en vie humaine.
Pour notre gouverne et notre sécurité toutefois, il importe de savoir que l’on peut, dans certaines circonstances, être soit électrisé ou électrocuté sans avoir à entrer en contact franc avec une ligne Haute Tension, c’est à dire sans même l’avoir touchée. En effet, en plus de la tension et du courant notés dans une ligne électrique, celle-ci émet des forces invisibles et agissant à distance sur tout corps présent dans son milieu environnant. L’une d’elle est le « champ électrique ».
La foudre et ses arcs d’éclairs observés entre terre et ciel sont des exemples de manifestations naturelles de champs électriques atmosphériques. L’Ecole Supérieure Interafricaine de l’Electricité (ESIE) de Bingerville, en Côte d’Ivoire, était à l’époque l’unique grande école d’ingénieur en Afrique dotée d’un laboratoire équipée pour l’étude en réel de ces champs disruptifs capables d’amorcer un passage de courant dans l’air ambiant et atteindre n’importe quelle cible exposée.
L’intensité du champ électrique se mesure en Volt par mètre (V/m). L’expression de cette unité de mesure montre bien que les effets induits à distance par ledit champ électrique sont non seulement liés au niveau de tension de la ligne mais ils dépendent aussi de la « distance d’approche » qui nous sépare d’elle. En d’autres mots, plus l’on se rapproche d’une ligne Haute Tension aérienne et plus l’on n’aura nul besoin de la toucher pour être foudroyé à distance.
Certaines conditions atmosphériques particulières telles que l’humidité ou la pluie entre autres le favorisent davantage. En effet, le courant circule certes dans les câbles sous tension mais il peut tout aussi circuler au travers de l’air et atteindre toute personne qui pénètre dans le voisinage rapproché de ces conducteurs électriques sans être habilitée et vêtue des EPI (Équipements de Protections Individuelles) adéquats.
Attention donc aux fausses informations et autres trucages vidéos glorifiant les « supers pouvoirs » illusoires de gens déambulant sur des lignes électriques. Ce n’est pas réel. Tout autant que résider dans l’espacement des couloirs de sécurité réservés aux lignes Hautes Tensions est dangereux.
Pour preuve, l’actualité récente des faits divers sociaux fait état d’enfants mortellement foudroyés lors d’escalades de pylônes et poteaux électriques pris pour des espaces de jeu. Des explosions de transformateurs type « haut de poteaux », des ruptures de lignes, des engins de chantier entrés en contact avec une ligne sous tension, etc. ont été également rapportés. Mais passé le temps des vives émotion, les populations déguerpies reviennent s’installer en ces lieux où des personnes ont pourtant laissé leur vie tandus que les plus chanceuses ont été gravement brûlées ou sévèrement handicapées à vie.
Par ailleurs, au regard du mode « souterrain » où les câbles sont enterrés, la problématique des distances de sécurité ne se pose pas dans les mêmes termes et surtout pas de manière aussi cruciale. Car en pratique, le champ électrique (V/m) qui se propage sous forme linéaire et le champ magnétique (en nanoTesla, nT) qui se ptopage quant à lui sous forme circulaire s’atténuent tous considérablement en dessous des seuils jugés critiques. Les questionnements et inquiétudes actuels ne concernent donc que le mode « aérien ».
Et même si les experts de la médecine semblent pour leur part pour l’instant ne pas s’accorder sur la causalité des effets sanitaires de leucémies infantiles, crises de nervosité, céphalées chroniques, etc. imputable au champ magnétique, les accidents dus au champ électrique quant à eux sont suffisamment réels pour songer à libérer ces lieux avant que le pire ne s’y produise en connaissance de cause.
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