L’éducation inclusive, en donnant une chance à tous les enfants, quels que soient leurs besoins particuliers, permet de construire un monde sans barrières.
Pas de mot. Mais des signes pour dessiner avec patriotisme les paroles de l’hymne national. Ici, la force des gestes dit tout aussi haut la fierté d’appartenir à la Côte d’Ivoire. Et pour ce pays, terre d’espérance, tous ses fils comptent. Tous, même ceux qui portent un handicap. Et ces enfants sourds savent qu’ils peuvent aussi compter sur leur pays. En effet, la Côte d’Ivoire a inscrit la protection des droits des personnes en situation de handicap au cœur de sa Constitution.
Un engagement dit et réaffirmé encore par la secrétaire d’Etat chargée de la Protection sociale, Clarisse Kayo Mahi, cet après-midi du 20 octobre 2021, à l’Institut National Ivoirien pour la Promotion des Aveugles (INIPA).
« Aucun enfant n’est en marge du programme de l’école inclusive initiée par le gouvernement ivoirien. L’Etat a mis en place une politique qui prend en compte tous les enfants quels que soient leurs besoins spécifiques », a-t-elle soutenu, lors de la cérémonie d’excellence organisée par l’INIPA et l’Ecole Ivoirienne des Sourds (ECIS) pour célébrer leurs pensionnaires admis aux examens à grand tirage session 2021.
Ce jour-là, ils sont une centaine d’élèves des classes de CM2, 3e et Terminale à être récompensés.
Pour les récipiendaires, leurs parents et leurs encadreurs, ces prix sont le couronnement de tant d’efforts et de sacrifices. Tous voudraient y voir la promesse d’une victoire sur le sort, même si le chemin pour eux, on le sait, imposera d’autres obstacles. Mais, tous veulent y croire.
Comme cette mère de famille qui fréquente assidûment le lycée moderne d’Andokoi (Yopougon) pour copier les cours de sa fille malentendante en classe de 6e.
« Cette école n’a pas suffisamment d’encadreurs spécialisés. La priorité est donc accordée aux classes de 3ème et de Terminale. Je viens copier les cours pour que ma fille puisse étudier après », raconte-t-elle.
Pour les élèves aveugles qui réussissent au Bac, l’orientation est la grande difficulté.
Les grandes écoles n’ont pas les infrastructures et l’équipement nécessaires pour les recevoir et les parents hésitent à les soutenir financièrement.
« De nombreuses familles estiment que payer les études d’un enfant aveugle dans une grande école ou une université privée est un investissement à fonds perdu. Elles préfèrent se concentrer sur leurs enfants valides », déplore François Miézan qui arpente, chaque année, les couloirs du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique pour plaider la cause des nouveaux bacheliers non-voyants.
« Au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, nous sommes conscients de leurs difficultés. Tout est donc mis en œuvre pour leur permettre de poursuivre leurs études dans les meilleures conditions. Des dispositions particulières sont prises pour les orienter à l’université Félix Houphouët-Boigny », assure le directeur des systèmes d’information, Abdou Maïga.
Un projet porteur d’espoir
La Côte d’Ivoire veut aller encore plus loin pour construire une société sans barrières. C’est dans ce cadre que s’inscrit le Projet « Éducation Inclusive en Côte d’Ivoire, promouvoir une éducation inclusive de qualité pour les enfants en situation de handicap ». Il a été réalisé du 1er juin 2017 au 31 août 2021 dans dix (10) villes (Abidjan, Dabou, Agboville, Toumodi, Yamoussoukro, Bouaké, Oumé, Man, Abengourou et Korhogo).
Fruit de la collaboration entre l’Etat de Côte d’Ivoire et plusieurs partenaires techniques, il avait pour objectif de contribuer à promouvoir l’accès des enfants en situation de handicap à une éducation de qualité, adaptée à leurs besoins spécifiques, dans leurs communautés de base, à travers les établissements scolaires existants.
Le projet a mobilisé 12 Directions Régionales de l’Éducation Nationale, 18
Inspections d’enseignement préscolaire et primaire, 28 écoles primaires ordinaires, ainsi que plusieurs structures techniques publiques et privées d’encadrement spécialisé des personnes handicapées.
Il a permis de former des professionnels sur la thématique de l’inclusion des enfants en situation de handicap dans les écoles ordinaires. Ainsi, 232 enseignants dont 108 femmes d’écoles primaires, 125 encadreurs, superviseurs et administrateurs des services éducatifs (dont 30 femmes) et 93 travailleurs sociaux ont été formés à la question du handicap, de l’éducation inclusive en faveur des enfants en situation de handicap et à l’encadrement des enfants sourds ou non-voyants en milieu scolaire ordinaire.
Pour l’année scolaire 2020-2021, 698 enfants en situation de handicap ont bénéficié de cette initiative. Ce sont 207 enfants dont 84 filles dans les centres de préparation, 400 enfants dont 176 filles dans les écoles primaires. 81 enfants dont 32 filles ayant fréquenté les écoles inclusives et ayant été orientés dans les collèges.
Les résultats scolaires des enfants en situation de handicap sont encourageants. Avec un Taux d’admission de 100 % à l’entrée en 6ème. Un taux d’admission en classe supérieure (pour les classes intermédiaires) de 87,8 %. Et 57,85 % des enfants en situation de handicap dans les écoles partenaires ont une moyenne égale ou supérieure à la moyenne générale de leur classe.
Ces résultats montrent bien qu’il est possible de réduire les vulnérabilités. Mais, sur le chemin, beaucoup reste encore à faire. Les défis, notamment l’insuffisance de compétences techniques, l’inexistence ou l’insuffisance d’écoles préscolaires inclusives, de centres de préparation et d’écoles inclusives, la méconnaissance des textes qui facilitent l’accès à l’éducation des enfants en situation de handicap par les populations, la discrimination dans le recrutement des candidats pour intégrer les centres de formation et l’insuffisance d’enseignants formés en langue des signes et d’interprètes dans les établissements secondaires… doivent être absolument levés pour rendre véritablement demain meilleur.
CICG
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