Photo: ASML Eindhoven/Pays-Bas: Plus de 80% de part sur le marché mondial des machines de production de puces
Entre l’essor du télétravail et celui des loisirs à la maison, la demande en composants électroniques a fortement augmenté depuis un an et demi. Au point de ralentir d’autres secteurs qui en sont gourmands, comme l’automobile.
Le Monde avec AP, AFP et Reuters
Leur production reste un processus complexe : il faut des années de recherche et développement pour concevoir, produire, commercialiser une gamme de semi-conducteurs. Ici, un « wafer » (« gaufrette ») contenant des processeurs Xeon Ice Lake d’Intel.
Leur production reste un processus complexe : il faut des années de recherche et développement pour concevoir, produire, commercialiser une gamme de semi-conducteurs. Ici, un « wafer » (« gaufrette ») contenant des processeurs.
Les semi-conducteurs sont à l’électronique ce que le pétrole est à l’industrie : un composant essentiel, mais souvent invisible, présent dans les ordinateurs, les consoles de jeux vidéo, les smartphones, les téléviseurs, les voitures, les avions, les machines à laver, les capteurs de température des climatiseurs, les panneaux solaires…
Mais la demande pour les appareils électroniques de toutes sortes a augmenté de façon spectaculaire depuis le début de la pandémie, entre l’essor du télétravail et les loisirs à la maison. Dans l’informatique d’entreprise, ce sont les dépenses dans les infrastructures cloud (informatique dématérialisée) qui se sont envolées. Progressivement, tous les objets de notre vie quotidienne deviennent numériques, de la machine à café à une simple porte.
La planète a été si gourmande en puces électroniques, que ces précieux matériaux connaissent aujourd’hui une pénurie qui ralentit certaines industries comme l’automobile. Vendredi 22 octobre, Renault a ainsi annoncé anticiper une perte de production « proche de 500 000 véhicules sur l’année », en raison de la crise des semi-conducteurs.
Les constructeurs éprouvent à retardement une crise que traverse le secteur des technologies depuis plusieurs mois, pétrie d’enjeux à la fois économiques et géopolitiques. Explications.
Un processus de fabrication complexe
Pour faire simple, les semi-conducteurs sont des matériaux qui se situent entre un conducteur et un isolant : ils gèrent et contrôlent le flux de courant dans l’électronique. Ils sont souvent fabriqués à partir de matières premières comme le silicium et le germanium, l’arséniure de gallium ou le carbure de silicium.
Leur production reste un processus complexe : selon AMD, concepteur et vendeur de microprocesseurs, « il faut des années de recherche et développement pour concevoir, développer, produire, commercialiser une gamme de semi-conducteurs ». Pour leur fabrication, il faut traiter du sable, le purifier, le liquéfier à 1 700 degrés pour obtenir des lingots de silicium, qui sont ensuite découpés en wafers (« gaufrettes »), de toutes petites galettes de silicium.
Avec la mondialisation et pour baisser les coûts, les acteurs se sont presque tous spécialisés dans une partie de leur chaîne de production : dans les brevets de conception (ARM), dans la conception et la vente (Qualcomm, Nvidia, Broadcom), dans la fabrication (TSMC, Global Foundries). Quelques rares entreprises maîtrisent encore toute la chaîne, comme Samsung et Intel, mais aussi les européennes STMicroelectronics et Infineon. Toutes ne produisent pas le même type de composants et certaines, comme le taïwanais TSMC, sont hyperspécialisées dans des puces très demandées, rendant leur fabrication encore plus stratégique.
Un marché en forte croissance
Les semi-conducteurs sont un marché en croissance quasi continue : en 2020, il représentait 442 milliards de dollars (380 milliards d’euros, + 5,4 % par rapport à 2019) et devrait continuer à croître de 17, 3 % en 2021.
La demande est tirée par plusieurs marchés : celui des mémoires qui permettent de stocker l’information ; celui des smartphones et de leurs infrastructures avec le déploiement de la 5G ; celui de l’industrie automobile (voitures électriques, voitures autonomes, contrôle des airbags, des distances de sécurité ; contrôle du moteur, de la batterie, système « start and stop », climatisation…) ; l’industrie des loisirs, avec les consoles de jeux vedettes du marché (Playstation 5 et Xbox Series X) ; l’Internet of Things (« Internet des objets », ou IoT) qui permet à des objets d’échanger des informations et de communiquer entre eux ; l’intelligence artificielle et le big data, avec des processeurs spécifiques, comme Xeon Ice Lake d’Intel.
Un enjeu de souveraineté technologique
Rendues indispensables à l’économie mondiale, ces puces électroniques sont devenues un enjeu stratégique majeur pour les grandes puissances de la planète.
La fabrication de ces composants est au cœur de la bataille que se livrent les Etats-Unis et la Chine pour la domination du secteur des hautes technologies. Si bien que les difficultés actuelles sont aussi héritières de la décision prise en septembre 2020 par Washington de restreindre la vente de technologies à SMIC, le géant chinois des semi-conducteurs, pour contrer les ambitions hégémoniques de Pékin.
La concentration géographique des lieux de production de ces puces est aujourd’hui un sujet d’inquiétudes. Une étude réalisée en avril 2021 par la Semiconductor Industry Association et le Boston Consulting Group a révélé qu’environ 75 % de la capacité mondiale de fabrication de semi-conducteurs, par exemple, est concentrée en Chine et en Asie de l’Est, une région considérablement exposée à une forte activité sismique et à des tensions géopolitiques. Et que 100 % de la capacité mondiale de fabrication des semi-conducteurs les plus avancés (inférieurs à 10 nanomètres) est actuellement située à Taïwan (92 %) et en Corée du Sud (8 %).
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La fin de l’article sur Lemonde.fr
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