A la suite de cette convocation, des médias algériens ont évoqué des propos d’Emmanuel Macron rapportés par « Le Monde ». Le président français a estimé qu’après son indépendance en 1962 l’Algérie s’est construite sur « une rente mémorielle », entretenue par « le système politico-militaire ».
Le Monde avec AFP
L’Algérie a décidé, samedi 2 octobre, de rappeler « pour consultations » son ambassadeur en France, a annoncé la télévision publique en citant un communiqué officiel de la présidence algérienne et en précisant qu’un autre communiqué explicatif suivrait.
« L’Algérie rappelle son ambassadeur à Paris pour consultations et un communiqué sera diffusé sur le sujet », a rapporté la télévision en montrant à l’écran un court texte en arabe de la présidence algérienne.
Selon les médias algériens, le rappel de l’ambassadeur d’Algérie à Paris est motivé par des déclarations du président français lors d’une rencontre, jeudi, avec des descendants de protagonistes de la guerre d’Algérie, destinée à apaiser « cette blessure mémorielle ».
Lors de cette discussion relatée dans Le Monde, Emmanuel Macron a estimé qu’après son indépendance en 1962 l’Algérie s’est construite sur « une rente mémorielle », entretenue par « le système politico-militaire ». Il y évoque aussi « une histoire officielle », selon lui, « totalement réécrite » qui « ne s’appuie pas sur des vérités » mais sur « un discours qui repose sur une haine de la France ».
Sous le titre « Macron au vitriol sur le “système algérien” », le média francophone 24H Algérie a repris de larges pans de notre article qui cite un dialogue entre M. Macron et une vingtaine de jeunes dont les parents ou grands-parents étaient d’anciens combattants de la guerre d’Algérie (1954-1962), des harkis (paramilitaires au service de la France) ou des rapatriés.
En réponse à une jeune fille qui a grandi à Alger, M. Macron a confié ne pas penser qu’il y ait une « haine » contre la France « de la société algérienne dans ses profondeurs, mais du système politico-militaire qui s’est construit sur cette rente mémorielle ».
Selon M. Macron, « on voit que le système algérien est fatigué, le Hirak [le mouvement prodémocratie à l’origine de la démission en 2019 du président Abdelaziz Bouteflika, mort récemment] l’a fragilisé ». Dans son entretien avec les jeunes, le président français a assuré avoir « un bon dialogue avec le président algérien, Abdelmadjid Tebboune », ajoutant toutefois : « Je vois qu’il est pris dans un système qui est très dur. »
Selon les médias locaux, un autre passage des déclarations de M. Macron a provoqué l’ire des autorités algériennes. « Est-ce qu’il y avait une nation algérienne avant la colonisation française ? Ça, c’est la question », s’est interrogé le président français, en rappelant qu’il y a eu « de précédentes colonisations ».
Sur un ton ironique, il s’est ainsi dit « fasciné de voir la capacité qu’a la Turquie à faire totalement oublier le rôle qu’elle a joué en Algérie et la domination qu’elle a exercée », en allusion à l’Empire ottoman. « Et d’expliquer qu’on [les Français] est les seuls colonisateurs, c’est génial. »
Un précédent en mai 2020
Les relations entre Paris et Alger étaient déjà tendues avant ce samedi. Mercredi, l’ambassadeur de France à Alger, François Gouyette, avait été convoqué au ministère des affaires étrangères algérien pour se voir notifier « une protestation formelle du gouvernement » après la décision de Paris de réduire de moitié les visas accordés aux Algériens souhaitant se rendre en France.
Paris a annoncé mardi une forte diminution du nombre de visas accordés aux ressortissants du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie en invoquant un « refus » de ces pays du Maghreb de délivrer les laissez-passer consulaires nécessaires au retour des immigrés refoulés de France.
« Cette décision, qui est intervenue sans consultation préalable avec la partie algérienne, comporte l’anomalie rédhibitoire d’avoir fait l’objet d’un tapage médiatique générateur de confusion et d’ambiguïté quant à ses motivations et à son champ d’application », a estimé le ministère algérien pour justifier la convocation de M. Gouyette.
C’est la seconde fois qu’Alger convoque son ambassadeur à Paris depuis mai 2020. A l’époque, l’ambassadeur, Salah Lebdioui, avait fait l’objet d’un rappel « immédiat » après la diffusion d’un documentaire sur le mouvement de contestation prodémocratie Hirak, diffusé sur France 5 et La Chaîne parlementaire.
Le Monde avec AFP
Commentaires Facebook