Edition du 14/09/2021
Le président ivoirien a profité du conseil des ministres de la rentrée pour mettre en garde le gouvernement sur le faible taux d’exécution des réformes en cours.
Il a également rappelé la prééminence de l’autorité du premier ministre Patrick Achi face au directeur exécutif du RHDP, Adama Bictogo.
Le conseil des ministres du mercredi 8 septembre a été le théâtre d’une mise au point pour le moins inhabituelle. Alors que la réunion venait à peine de commencer, le président ivoirien Alassane Ouattara a souhaité déclarer à ses ministres qu’ils évoluaient avant tout « au service du gouvernement », et non du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), le parti présidentiel.
Réunions au parti
Si Alassane Ouattara n’a cité aucun nom, le message a été reçu cinq sur cinq par son auditoire : l’autorité du premier ministre Patrick Achi doit prévaloir sur celle du directeur exécutif du parti, Adama Bictogo. Ces dernières semaines, le chef du gouvernement s’est en effet plaint à plusieurs reprises de la « trop grande influence » de Bictogo sur plusieurs ministres, et particulièrement les plus jeunes. En cause : des réunions organisées par Bictogo au siège du RHDP avec des membres du gouvernement, ou encore dans sa résidence de Cocody-Ambassade. Outre ces meetings de la discorde, plusieurs détenteurs de maroquins seraient également régulièrement sollicités afin de mener des actions de terrain pour le compte du RHDP.
Un activisme qui, selon Patrick Achi, « court-circuiterait » son autorité sur le gouvernement et mettrait plus largement à mal l’action des ministres dans l’exécution de leur mission. L’ancien secrétaire général de la présidence s’en est directement ému à plusieurs reprises à Alassane Ouattara. La veille du conseil des ministres, le 7 septembre, il avait déjà lui-même évoqué le sujet lors du conseil de gouvernement. Il avait ainsi stipulé aux ministres qu’ils ne devaient dorénavant plus répondre favorablement aux convocations de la direction du RHDP pour évoquer des dossiers gouvernementaux. Un système « d’autorisation » à solliciter auprès de la primature pourrait même prochainement être mis en place pour les ministres souhaitant s’impliquer dans certaines affaires du parti. Une manœuvre qui s’inscrit dans la volonté plus large de Patrick Achi d’imprimer sa marque sur l’exécutif ivoirien.
Tête-à-tête de Ouattara avec Bictogo
La sortie du président ivoirien s’inscrit également dans un contexte chahuté : depuis le début de l’été, Alassane Ouattara comme Patrick Achi s’agacent du faible taux d’exécution par les ministres des réformes en cours, et du retard qu’accuse le Plan national de développement (PND). Un constat dont s’est à nouveau fait écho le chef de l’Etat ivoirien lors du conseil du 8 septembre.
Ce recadrement suscite néanmoins des vagues au sein du RHDP, alors même qu’Adama Bictogo a pour habitude depuis 2017 – année de la première mandature à la primature de feu Amadou Gon Coulibaly – de s’entretenir très régulièrement avec les membres du gouvernement. Le sujet devrait de nouveau être évoqué par Alassane Ouattara lui-même avec Adama Bictogo, lors d’une rencontre prévue le 16 septembre pour discuter de la feuille de route du RHDP pour la rentrée.
Ce climat de tensions entre le chef du gouvernement et le directeur exécutif de la formation présidentielle est également un duel de personnalité : le premier, technocrate discret, apprécié des bailleurs et partenaires internationaux, ne possède qu’un entregent limité au sein du RHDP, à l’inverse d’Adama Bictogo, au profil de « tribun de la plèbe ».
Lorsque Hamed Bakayoko était chef du gouvernement, plusieurs épisodes de tensions avaient déjà affleuré au grand jour entre le prédécesseur d’Achi et Bictogo.
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